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Biologie

Quel avenir pour la biologie médicale ?


Rédigé par Aurélie Pasquelin le Lundi 10 Juillet 2023 à 15:22 | Lu 1924 fois


Pour mieux faire face aux nouvelles dynamiques à l’œuvre dans le monde de la santé, les biologistes médicaux ont initié il y a maintenant plusieurs années une réflexion autour des potentielles évolutions de leur spécialité. De sa médicalisation à son industrialisation, en passant par une intégration plus poussée des technologies numériques, plusieurs pistes sont aujourd’hui possibles – et parfois nécessaires –, amenant dans leur sillage des questionnements sur des problématiques connexes, comme l’attractivité de la biologie médicale auprès des jeunes générations.



Le Dr Lionel Barrand, président du syndicat Les Biologistes Médicaux – Les Biomed. ©DR
Le Dr Lionel Barrand, président du syndicat Les Biologistes Médicaux – Les Biomed. ©DR
Financiarisation, innovation, crise sanitaire, réglementation, industrialisation, attractivité… De nombreux paramètres apparus ces dernières années ont fait évoluer les pratiques des biologistes médicaux et soulevé plusieurs questions fondamentales, amenant les acteurs du secteur à tenter de cerner les différents scénarios possibles pour écrire l’avenir de leur spécialité. Dans un rapport publié en octobre dernier, et intitulé « La biologie médicale en France : évolutions et enjeux », l’Académie Nationale de Pharmacie a ainsi listé quatre problématiques principales auxquelles la spécialité fait face : la « financiarisation et l’industrialisation, avec l’entrée massive des sociétés d’investissement au capital des laboratoires » ; « une diminution des échanges avec les patients et [une] altération du dialogue clinico-biologique » ; la « désaffection des jeunes médecins et, dans une moindre mesure, des jeunes pharmaciens » ; une « diminution dramatique des biologistes médicaux hospitalo-universitaires en charge de la formation de la future génération et acteurs de la recherche en Biologie médicale ».

« Nous sommes actuellement à un moment charnière : soit nous basculons vers une médicalisation, soit vers un fonctionnement de prestataires de service, où les laboratoires ne feront plus que des productions d’analyses, sans interprétation », constate pour sa part le Docteur Lionel Barrand, président du syndicat Les Biologistes Médicaux – Les Biomed –, qui regroupe à la fois des internes, des hospitaliers et des libéraux. Récemment, le syndicat a d’ailleurs listé ses propres propositions pour l’avenir de la biologie médicale. Parmi celles-ci, le « maintien du N site N biologistes », soit le fait de « garder un nombre suffisant de biologistes pour gérer les différents sites français », poursuit Lionel Barrand, qui redoute ici de basculer vers un système « à l’allemande, qui fonctionne avec peu de biologistes, est plus cher par examen, plus chronophage pour les médecins préleveurs, et moins performant en termes de proximité et de délai de rendu », s’alarme-t-il.
 

Investir le champ du dépistage

Les Biomed appellent donc à une plus grande médicalisation de leur spécialité, un enjeu aujourd’hui au centre de leur projet, souhaitant entre autres s’investir dans les soins non programmés ou dans la prévention et le dépistage. Sur ce dernier point, le syndicat imagine par exemple de mieux « utiliser les ressources humaines et informatiques [des laboratoires de biologie médicale], en paramétrant des alertes automatiques dans les logiciels afin de savoir quel patient doit effectuer quel bilan, et le contacter pour orientation dans le parcours de soins ». Pour ce qui est du dépistage, « les biologistes médicaux ont aussi un rôle majeur à jouer dans le cas des infections sexuellement transmissibles, avec le dépistage sans ordonnance par exemple », abonde le biologiste qui imagine, dans certains cas, pouvoir donner ou prescrire une partie du traitement. De la même manière, Lionel Barrand demande à ce que la spécialité, et surtout les laboratoires de biologie médicale de ville, « puisse vacciner » pour plusieurs pathologies, dont la grippe.

Consolider l’expertise

« Il n’est pas rare que des personnes de plus de 70 ans viennent dans un LBM de ville pour un bilan sanguin. En saison, certains posent des questions sur la vaccination contre la grippe. Il serait donc tout à fait envisageable que l’établissement ait un petit stock de vaccins pour pouvoir réaliser l’injection à ce moment-là », imagine le Dr Barrand qui appelle, dans une même logique de médicalisation de la discipline, à une « consolidation de l’expertise » des biologistes qui tendrait vers plus de prescriptions et de consultations. « Les biologistes médicaux réalisent certes déjà certaines consultations, en génétique ou en assistance médicale à la procréation, par exemple, mais c’est un champ somme toute assez restreint. Pourquoi ne pas l’étendre aux pharmaciens biologistes, pour des prescriptions simples en rapport avec les recommandations ? », poursuit-il.

L’intégration des nouvelles technologies

Si l’avenir de la biologie médicale semble donc résider dans un repositionnement des biologistes au sein du système de santé, ce n’est pourtant pas le seul bouleversement majeur auquel la spécialité devrait faire face. Les progrès technologiques, tels que le développement des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD), le séquençage haut débit, l’implantation de l’intelligence artificielle et l’exploitation des données de masse sont eux aussi source de questionnements autour de l’évolution et de l’adaptation de la discipline. « L’accélération du numérique en santé voulue par le gouvernement, le développement d’innombrables applications “Santé” sur Internet via les téléphones mobiles, la disponibilité tous azimuts des données en vie réelle, l’utilisation des données de l’open data, les algorithmes et les outils de l’intelligence artificielle (IA) sont autant d’innovations qui doivent être des centres de grand intérêt, mais aussi de vigilance pour les biologistes médicaux », alerte ainsi le rapport de l’Académie Nationale de Pharmacie publié en octobre dernier.

Prescriptions connectées, automatisation de certaines tâches, accompagnement à la prévention… De nombreuses solutions ont déjà retenu l’attention des biologistes médicaux. « Nous nous impliquons fortement dans le Ségur du numérique en santé pour notamment mettre en place la prescription connectée, qui évitera les erreurs de saisie et limitera la redondance des actes », confie Lionel Barrand qui constate néanmoins que d’autres chantiers devront d’abord être finalisés : « Nous transmettons encore trop de résultats par fax ou courrier, il faut absolument accélérer la dématérialisation ».
 

Une spécialité aux multiples facettes

Depuis plusieurs années, la biologie médicale fait face à un manque d’attractivité auprès des jeunes, et notamment des jeunes médecins. Anciennement « Syndicat des Jeunes Biologistes », le syndicat des Biologistes Médicaux travaille de longue date sur cette problématique, organisant des séminaires et des webinaires à destination des étudiants en pharmacie et en médecine. Génétique, microbiologie, assistance médicale à la procréation… Les différents champs couverts par la biologie médicale sont pour le syndicat « une force », qui nécessite néanmoins d’être « connue et expliquée ». L’un des objectifs de ces interventions est donc de présenter les différents profils et visages de la discipline, car « même si un étudiant en médecine a réalisé un stage en biologie médicale, ce qui n’est déjà pas le cas de tous, il est important qu’il sache que son expérience n’est qu’une bribe de tous les champs couverts par notre riche discipline », constate Lionel Barrand, président des Biologistes Médicaux.






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