Responsable du CPias Nouvelle-Aquitaine, vous avez repris en octobre dernier la présidence de la SF2H, un poste que vous aviez déjà occupé entre 2015 et 2019. Pourquoi ce retour ?
Dr Pierre Parneix : Après deux mandats en tant que président de la SF2H, je ne pensais pas forcément revenir. Cependant, l’actualité récente et mes travaux avec le Pr Didier Pittet pour l’évaluation de la gestion de la crise sanitaire, m’ont donné envie de m’investir davantage dans des missions nationales. Le Dr Bruno Granbastien n’ayant pas voulu se représenter à la présidence de la SF2H, j’ai décidé d’être candidat à cette fonction que j’avais particulièrement appréciée.
Quels sont les grands projets à venir pour la SF2H ?
L’un des principaux objectifs de la société reste le développement de notre profession et sa reconnaissance. À la demande du ministère des Solidarités et de la Santé, nous avons d’ailleurs réalisé une réévaluation de nos missions et de nos effectifs optimaux qui, je le rappelle, restent encore faibles par rapport aux standards internationaux. Alors qu’aujourd’hui la moyenne nationale se situe à un praticien pour 800 lits ou places, et un infirmier pour 400 lits ou places, notre objectif est de faire évoluer ces chiffres pour atteindre un praticien pour 500 lits et un infirmier pour 150 lits. Dans la feuille de route nationale relative à la Prévention des infections associées aux soins et bon usage des antibiotiques 2022-2025, nous fixons également un objectif intermédiaire d’un praticien pour 600 lits et d’un infirmier pour 300 lits. Augmenter nos effectifs est aujourd’hui primordial pour pouvoir réaliser l’ensemble des actions et limiter ainsi le risque d’infection. Pour conforter ces équipes, nous devons miser sur un développement quantitatif et qualitatif. C’est pourquoi la SF2H poursuit ses travaux afin de créer une formation d’infirmier en pratique avancée (IPA) pour la prévention et le contrôle de l’infection. Couplée à la formation spécialisée transversale proposée depuis peu aux professionnels médicaux, cette démarche aura sans nul doute un impact positif sur la prévention des infections associées aux soins.
Dans votre motivation initiale, vous évoquiez notamment la refonte de la prévention et du contrôle des infections respiratoires. Qu’en est-il exactement ?
Ces derniers mois, nous nous sommes rendu compte que certains points restaient à préciser en ce qui concerne la prévention des infections respiratoires. Nous devons, par exemple, réfléchir à l’efficacité des masques, faire évoluer la technologie et les connaissances pour être prêts si d’autres crises surviennent. En 2018, nous appelions déjà à la multiplication des tailles et formes de masques, pour qu’ils puissent s’adapter à toutes les morphologies. Aujourd’hui, rien n’a vraiment changé. Pourtant, si l’on veut plus de sécurité, il faut s’en donner les moyens ! Le ministère de l’Économie a d’ailleurs récemment publié un document insistant sur l’achat de masques de qualité et de production européennes, en proposant notamment une modification dans le cahier des charges des appels d’offres publics, afin que le critère du prix ne compte plus que pour 20 % de la décision. Ce type de décision est primordiale pour que la prévention soit pleinement efficace mais aussi valorisée, favorisant ainsi l’investissement et le développement de l’industrie.
Comptez-vous poursuivre vos actions de communication ?
Bien entendu. La SF2H continue à être présente pour promouvoir la prévention auprès de tous, y compris du grand public. Pour aller plus loin, nous avons d’ailleurs créé en novembre dernier une commission des jeunes professionnels. Mieux intégrés, ils sont ou seront des vecteurs actifs pour toujours mieux sensibiliser à la prévention des infections. La communication est un enjeu réel, qui impose une implication collective et de la pédagogie. Il faut continuer à porter des messages positifs. Prenez les fake news : on en trouve dans les médias ou sur internet, mais il y a aussi de « bonnes » informations. Nous devons former les professionnels et la population à mieux comprendre cela, à chercher à savoir d’où viennent les informations et si l’on peut leur faire confiance.
Pensez-vous que la crise sanitaire ait changé la donne en matière d’appropriation des bonnes pratiques d’hygiène ?
Personne ne pensait, auparavant, assister à une telle utilisation des masques ou des solutions hydro-alcooliques. Cette situation est déjà, en soi, une révolution culturelle forte qui fait le terreau de la prévention. Nous devons, désormais, chercher à pérenniser ces pratiques. La SF2H s’inscrit naturellement dans cette démarche qui doit notamment se traduire par une poursuite des investissements. La prévention doit rester accessible à tous. Il serait dommage de réduire de petits budgets qui sont essentiels pour maintenir le niveau de prévention actuel.
Autre sujet incontournable de l’hygiène hospitalière, la lutte contre l’antibiorésistance. Quelles seront ici les actions de la SF2H ?
Nous portons cette thématique depuis longtemps. En juin prochain, elle sera d’ailleurs l’un des quatre sujets majeurs traités lors de notre congrès qui se déroulera à Lyon. L’antibiorésistance est un sujet continu qui nécessite de penser des stratégies afin de créer une culture chez les professionnels. Tous doivent en comprendre les enjeux, qui sont multiples et intègrent par exemple une dimension écologique, avec la présence de désinfectant dans les effluents. Bien entendu, nous devons également poursuivre nos efforts pour limiter l’usage des antibiotiques. Dans la future feuille de route de l’antibiorésistance, la SF2H demande à ce que la prévention des infections soit identifiée comme l’une des stratégies de lutte contre l’antibiorésistance. En tant qu’hygiénistes, nous le savons et ne cessons de le répéter : la prévention est l’arme numéro un pour limiter et maîtriser les risques d’infections.
Article publié dans l'édition de février 2022 d'Hospitalia à lire ici.
Dr Pierre Parneix : Après deux mandats en tant que président de la SF2H, je ne pensais pas forcément revenir. Cependant, l’actualité récente et mes travaux avec le Pr Didier Pittet pour l’évaluation de la gestion de la crise sanitaire, m’ont donné envie de m’investir davantage dans des missions nationales. Le Dr Bruno Granbastien n’ayant pas voulu se représenter à la présidence de la SF2H, j’ai décidé d’être candidat à cette fonction que j’avais particulièrement appréciée.
Quels sont les grands projets à venir pour la SF2H ?
L’un des principaux objectifs de la société reste le développement de notre profession et sa reconnaissance. À la demande du ministère des Solidarités et de la Santé, nous avons d’ailleurs réalisé une réévaluation de nos missions et de nos effectifs optimaux qui, je le rappelle, restent encore faibles par rapport aux standards internationaux. Alors qu’aujourd’hui la moyenne nationale se situe à un praticien pour 800 lits ou places, et un infirmier pour 400 lits ou places, notre objectif est de faire évoluer ces chiffres pour atteindre un praticien pour 500 lits et un infirmier pour 150 lits. Dans la feuille de route nationale relative à la Prévention des infections associées aux soins et bon usage des antibiotiques 2022-2025, nous fixons également un objectif intermédiaire d’un praticien pour 600 lits et d’un infirmier pour 300 lits. Augmenter nos effectifs est aujourd’hui primordial pour pouvoir réaliser l’ensemble des actions et limiter ainsi le risque d’infection. Pour conforter ces équipes, nous devons miser sur un développement quantitatif et qualitatif. C’est pourquoi la SF2H poursuit ses travaux afin de créer une formation d’infirmier en pratique avancée (IPA) pour la prévention et le contrôle de l’infection. Couplée à la formation spécialisée transversale proposée depuis peu aux professionnels médicaux, cette démarche aura sans nul doute un impact positif sur la prévention des infections associées aux soins.
Dans votre motivation initiale, vous évoquiez notamment la refonte de la prévention et du contrôle des infections respiratoires. Qu’en est-il exactement ?
Ces derniers mois, nous nous sommes rendu compte que certains points restaient à préciser en ce qui concerne la prévention des infections respiratoires. Nous devons, par exemple, réfléchir à l’efficacité des masques, faire évoluer la technologie et les connaissances pour être prêts si d’autres crises surviennent. En 2018, nous appelions déjà à la multiplication des tailles et formes de masques, pour qu’ils puissent s’adapter à toutes les morphologies. Aujourd’hui, rien n’a vraiment changé. Pourtant, si l’on veut plus de sécurité, il faut s’en donner les moyens ! Le ministère de l’Économie a d’ailleurs récemment publié un document insistant sur l’achat de masques de qualité et de production européennes, en proposant notamment une modification dans le cahier des charges des appels d’offres publics, afin que le critère du prix ne compte plus que pour 20 % de la décision. Ce type de décision est primordiale pour que la prévention soit pleinement efficace mais aussi valorisée, favorisant ainsi l’investissement et le développement de l’industrie.
Comptez-vous poursuivre vos actions de communication ?
Bien entendu. La SF2H continue à être présente pour promouvoir la prévention auprès de tous, y compris du grand public. Pour aller plus loin, nous avons d’ailleurs créé en novembre dernier une commission des jeunes professionnels. Mieux intégrés, ils sont ou seront des vecteurs actifs pour toujours mieux sensibiliser à la prévention des infections. La communication est un enjeu réel, qui impose une implication collective et de la pédagogie. Il faut continuer à porter des messages positifs. Prenez les fake news : on en trouve dans les médias ou sur internet, mais il y a aussi de « bonnes » informations. Nous devons former les professionnels et la population à mieux comprendre cela, à chercher à savoir d’où viennent les informations et si l’on peut leur faire confiance.
Pensez-vous que la crise sanitaire ait changé la donne en matière d’appropriation des bonnes pratiques d’hygiène ?
Personne ne pensait, auparavant, assister à une telle utilisation des masques ou des solutions hydro-alcooliques. Cette situation est déjà, en soi, une révolution culturelle forte qui fait le terreau de la prévention. Nous devons, désormais, chercher à pérenniser ces pratiques. La SF2H s’inscrit naturellement dans cette démarche qui doit notamment se traduire par une poursuite des investissements. La prévention doit rester accessible à tous. Il serait dommage de réduire de petits budgets qui sont essentiels pour maintenir le niveau de prévention actuel.
Autre sujet incontournable de l’hygiène hospitalière, la lutte contre l’antibiorésistance. Quelles seront ici les actions de la SF2H ?
Nous portons cette thématique depuis longtemps. En juin prochain, elle sera d’ailleurs l’un des quatre sujets majeurs traités lors de notre congrès qui se déroulera à Lyon. L’antibiorésistance est un sujet continu qui nécessite de penser des stratégies afin de créer une culture chez les professionnels. Tous doivent en comprendre les enjeux, qui sont multiples et intègrent par exemple une dimension écologique, avec la présence de désinfectant dans les effluents. Bien entendu, nous devons également poursuivre nos efforts pour limiter l’usage des antibiotiques. Dans la future feuille de route de l’antibiorésistance, la SF2H demande à ce que la prévention des infections soit identifiée comme l’une des stratégies de lutte contre l’antibiorésistance. En tant qu’hygiénistes, nous le savons et ne cessons de le répéter : la prévention est l’arme numéro un pour limiter et maîtriser les risques d’infections.
Article publié dans l'édition de février 2022 d'Hospitalia à lire ici.