Pour commencer, pourriez-vous nous présenter l’ANPPH ?
Sylvette Garrigou : Cette association professionnelle née en 1978 est au service de toute une profession, et regroupe à cet égard des préparateurs en pharmacie exerçant leurs activités dans les établissements de santé publics, privés, associatifs, militaires, ou dans des Services départementaux d’incendie et de secours (SDIS). Il est cependant difficile de connaître avec précision le nombre de préparateurs en pharmacie hospitalière (PPH) actifs sur le terrain : nous n’avons en effet pas de numéro RPPS – ce qui est problématique, nous y reviendrons – et tous les PPH aujourd’hui en poste ne disposent pas encore du Dipôme d’État (DE) de préparateur en pharmacie hospitalière – une évolution récente sur laquelle nous reviendrons également. Toujours est-il que selon nos estimations, les PPH représentent entre 12 et 15 % des préparateurs en pharmacie exerçant en France.
L’ANPPH s’est notamment donné pour mission de favoriser le développement des compétences des PPH. Pourriez-vous nous en parler ?
Nous sommes en effet à l’origine de la création de l’IFPPH, l’Institut de formation des préparateurs en pharmacie hospitalière. Il n’existait alors pas de dispositif de formation continue destiné aux PPH, alors même qu’il s’agit d’un métier en évolution perpétuelle. L’IFPPH est, depuis, devenu ANPPH Formation, un organisme certifié Qualiopi. Cette formation continue est d’autant plus essentielle que, comme je le disais, notre profession est régulièrement confrontée à des avancées, sur les missions, les organisations ou les technologies. Sur ce dernier point, l’implantation croissante d’automates au sein des Pharmacies à usage interne (PUI), comme les robots pour la préparation des traitements, ou les armoires connectées pour sécuriser le circuit du médicament dans les services sensibles, sont des exemples éloquents. Ces technologies peuvent être perçues comme une perte de compétences. Elles sont en réalité des opportunités pour renforcer la valeur ajoutée des préparateurs en pharmacie hospitalière : ils peuvent, par exemple, déléguer à l’automate la préparation des chimiothérapies standard pour se concentrer sur celle des traitements plus ciblés, ou se focaliser sur le suivi des traitements, l’analyse clinique, etc.
Vous continuez en outre d’œuvrer pour faire évoluer les dispositifs de formation initiale. Que pourriez-vous nous en dire ?
Depuis la rentrée 2024, le grade de licence pourra être attribué aux titulaires du Diplôme d’État (DE) de préparateur en pharmacie hospitalière, c’est-à-dire ceux qui suivront une troisième année d’études après le Diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques (DEUST) de technicien-préparateur en pharmacie. Cela leur permettra d’entrer, s’ils le souhaitent, dans le système LMD, Licence-Master-Doctorat. Cette évolution a mis douze ans à aboutir, et elle vient enfin corroborer le passage en catégorie A des PPH dans la classification de la fonction publique, elle-même mise en œuvre en 2022. Des interrogations subsistent toutefois quant aux mesures transitoires accompagnant cette refonte du parcours du formation initiale.
Toutes ces actions participent à la promotion de la profession…
La reconnaissance de notre profession se heurte en effet à un écueil : dans le Code de la santé publique, les préparateurs en pharmacie sont évoqués dans le chapitre relatif aux professionnels de la pharmacie, et non dans celui adressant les auxiliaires médicaux. Nous pouvons donc parfois être « oubliés ». Par exemple, les PPH ne sont pas représentés au sein du Haut Conseil des professions paramédicales, où sont pourtant élaborées les fiches métiers. Dans la même veine, comme je le soulignais plus haut, nous n’avons pas de numéro RPPS ni de carte professionnelle. Un palliatif a été trouvé pour les préparateurs en pharmacie d’officine dans le cadre du Ségur : ils peuvent désormais obtenir un numéro RPPS après validation de leur inscription sur le portail RPPS+ par le titulaire de l’officine. Mais cette option est difficilement applicable aux préparateurs en pharmacie hospitalière, car leur employeur n’est pas le pharmacien gérant, mais l’établissement de santé au sein duquel ils exercent. Nous avons proposé que les PPH puissent s’inscrire par le même biais que les techniciens de laboratoire, c’est-à-dire via l’Agence régionale de santé. Cela n’est semble-t-il pas possible, les réflexions se poursuivent donc pour aboutir à une solution.
Un dernier point : il y a récemment eu des crispations sur la mise en œuvre des revalorisations salariales liées au passage en catégorie A évoqué plus haut. Quelle est ici la position de l’ANPPH ?
Cette mise en œuvre s’est effectivement faite de manière hétérogène au sein des établissements de santé, générant des crispations et des mouvements de grève au printemps 2024. Nous avons nous-mêmes été interpellés à ce sujet, et avons fait remonter ces inquiétudes aux tutelles. Mais il nous est difficile de mener ici des actions spécifiques : l’ANPPH est une association professionnelle et non un syndicat. Nous n’avons pas les compétences requises pour adresser les questions salariales – nous n’avons par exemple pas de juriste. Cette position peut avoir été perçue comme un manque de soutien pour la profession. Je tiens donc à rappeler que nous nous mobilisons depuis des années pour promouvoir le métier de préparateur en pharmacie hospitalière et faire reconnaître ses compétences. Notre soutien s’est effectué en amont, à travers l’entrée dans le système LMD, qui a notamment permis le passage en catégorie A – qui se traduira à terme par de nouvelles opportunités en termes d’évolution de carrière –, et par extension la revalorisation salariale. Mais la manière dont celle-ci est mise en œuvre est à l’extérieur de notre champ de compétences.
Le mot de la fin ?
Il n’existe pas, aujourd’hui, de syndicat dédié aux préparateurs en pharmacie hospitalière, contrairement par exemple aux pharmaciens hospitaliers. Peut-être est-ce une piste à creuser… Je rappellerais cependant aussi que notre soutien à la profession prend de nombreuses autres formes : les liens créés avec nos confrères de l’Association européenne des techniciens en pharmacie (EAPT), les travaux menés sur la pharmacie de demain dans le cadre du Conseil national professionnel des PPH (CPPH), les échanges entretenus avec les associations d’étudiants et fédérations d’interne pour pérenniser notre métier par le renouvellement des générations… Sans oublier notre combat pour porter la voix des préparateurs en pharmacie au sein du Haut Conseil des professions paramédicales !
> Article paru dans Hospitalia #66, édition de septembre 2024, à lire ici
Sylvette Garrigou : Cette association professionnelle née en 1978 est au service de toute une profession, et regroupe à cet égard des préparateurs en pharmacie exerçant leurs activités dans les établissements de santé publics, privés, associatifs, militaires, ou dans des Services départementaux d’incendie et de secours (SDIS). Il est cependant difficile de connaître avec précision le nombre de préparateurs en pharmacie hospitalière (PPH) actifs sur le terrain : nous n’avons en effet pas de numéro RPPS – ce qui est problématique, nous y reviendrons – et tous les PPH aujourd’hui en poste ne disposent pas encore du Dipôme d’État (DE) de préparateur en pharmacie hospitalière – une évolution récente sur laquelle nous reviendrons également. Toujours est-il que selon nos estimations, les PPH représentent entre 12 et 15 % des préparateurs en pharmacie exerçant en France.
L’ANPPH s’est notamment donné pour mission de favoriser le développement des compétences des PPH. Pourriez-vous nous en parler ?
Nous sommes en effet à l’origine de la création de l’IFPPH, l’Institut de formation des préparateurs en pharmacie hospitalière. Il n’existait alors pas de dispositif de formation continue destiné aux PPH, alors même qu’il s’agit d’un métier en évolution perpétuelle. L’IFPPH est, depuis, devenu ANPPH Formation, un organisme certifié Qualiopi. Cette formation continue est d’autant plus essentielle que, comme je le disais, notre profession est régulièrement confrontée à des avancées, sur les missions, les organisations ou les technologies. Sur ce dernier point, l’implantation croissante d’automates au sein des Pharmacies à usage interne (PUI), comme les robots pour la préparation des traitements, ou les armoires connectées pour sécuriser le circuit du médicament dans les services sensibles, sont des exemples éloquents. Ces technologies peuvent être perçues comme une perte de compétences. Elles sont en réalité des opportunités pour renforcer la valeur ajoutée des préparateurs en pharmacie hospitalière : ils peuvent, par exemple, déléguer à l’automate la préparation des chimiothérapies standard pour se concentrer sur celle des traitements plus ciblés, ou se focaliser sur le suivi des traitements, l’analyse clinique, etc.
Vous continuez en outre d’œuvrer pour faire évoluer les dispositifs de formation initiale. Que pourriez-vous nous en dire ?
Depuis la rentrée 2024, le grade de licence pourra être attribué aux titulaires du Diplôme d’État (DE) de préparateur en pharmacie hospitalière, c’est-à-dire ceux qui suivront une troisième année d’études après le Diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques (DEUST) de technicien-préparateur en pharmacie. Cela leur permettra d’entrer, s’ils le souhaitent, dans le système LMD, Licence-Master-Doctorat. Cette évolution a mis douze ans à aboutir, et elle vient enfin corroborer le passage en catégorie A des PPH dans la classification de la fonction publique, elle-même mise en œuvre en 2022. Des interrogations subsistent toutefois quant aux mesures transitoires accompagnant cette refonte du parcours du formation initiale.
Toutes ces actions participent à la promotion de la profession…
La reconnaissance de notre profession se heurte en effet à un écueil : dans le Code de la santé publique, les préparateurs en pharmacie sont évoqués dans le chapitre relatif aux professionnels de la pharmacie, et non dans celui adressant les auxiliaires médicaux. Nous pouvons donc parfois être « oubliés ». Par exemple, les PPH ne sont pas représentés au sein du Haut Conseil des professions paramédicales, où sont pourtant élaborées les fiches métiers. Dans la même veine, comme je le soulignais plus haut, nous n’avons pas de numéro RPPS ni de carte professionnelle. Un palliatif a été trouvé pour les préparateurs en pharmacie d’officine dans le cadre du Ségur : ils peuvent désormais obtenir un numéro RPPS après validation de leur inscription sur le portail RPPS+ par le titulaire de l’officine. Mais cette option est difficilement applicable aux préparateurs en pharmacie hospitalière, car leur employeur n’est pas le pharmacien gérant, mais l’établissement de santé au sein duquel ils exercent. Nous avons proposé que les PPH puissent s’inscrire par le même biais que les techniciens de laboratoire, c’est-à-dire via l’Agence régionale de santé. Cela n’est semble-t-il pas possible, les réflexions se poursuivent donc pour aboutir à une solution.
Un dernier point : il y a récemment eu des crispations sur la mise en œuvre des revalorisations salariales liées au passage en catégorie A évoqué plus haut. Quelle est ici la position de l’ANPPH ?
Cette mise en œuvre s’est effectivement faite de manière hétérogène au sein des établissements de santé, générant des crispations et des mouvements de grève au printemps 2024. Nous avons nous-mêmes été interpellés à ce sujet, et avons fait remonter ces inquiétudes aux tutelles. Mais il nous est difficile de mener ici des actions spécifiques : l’ANPPH est une association professionnelle et non un syndicat. Nous n’avons pas les compétences requises pour adresser les questions salariales – nous n’avons par exemple pas de juriste. Cette position peut avoir été perçue comme un manque de soutien pour la profession. Je tiens donc à rappeler que nous nous mobilisons depuis des années pour promouvoir le métier de préparateur en pharmacie hospitalière et faire reconnaître ses compétences. Notre soutien s’est effectué en amont, à travers l’entrée dans le système LMD, qui a notamment permis le passage en catégorie A – qui se traduira à terme par de nouvelles opportunités en termes d’évolution de carrière –, et par extension la revalorisation salariale. Mais la manière dont celle-ci est mise en œuvre est à l’extérieur de notre champ de compétences.
Le mot de la fin ?
Il n’existe pas, aujourd’hui, de syndicat dédié aux préparateurs en pharmacie hospitalière, contrairement par exemple aux pharmaciens hospitaliers. Peut-être est-ce une piste à creuser… Je rappellerais cependant aussi que notre soutien à la profession prend de nombreuses autres formes : les liens créés avec nos confrères de l’Association européenne des techniciens en pharmacie (EAPT), les travaux menés sur la pharmacie de demain dans le cadre du Conseil national professionnel des PPH (CPPH), les échanges entretenus avec les associations d’étudiants et fédérations d’interne pour pérenniser notre métier par le renouvellement des générations… Sans oublier notre combat pour porter la voix des préparateurs en pharmacie au sein du Haut Conseil des professions paramédicales !
> Article paru dans Hospitalia #66, édition de septembre 2024, à lire ici