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Hygiène

Les mesures barrière à la lumière de l’Histoire. Épisode 2 : la distanciation sociale et le port du masque


Rédigé par Joëlle Hayek le Lundi 12 Avril 2021 à 09:45 | Lu 641 fois


En décembre, nous revenions sur l’histoire du lavage des mains*, première et plus essentielle des mesures barrières. Pour ce second épisode, nous nous pencherons sur la distanciation sociale et le port du masque, deux gestes qui ont, eux aussi, acquis leurs lettres de noblesses au fil des siècles. Petit voyage dans le temps.



Désignant toutes les actions individuelles et collectives susceptibles de ralentir la progression d’une épidémie, les comportements-barrière ont été pratiqués dès l’Antiquité, avant d’être repris à plus grande échelle lors des vagues successives de peste noire à partir du milieu du XIVème siècle. Même si le rôle des microbes n’avait pas encore été identifié – il faut pour cela attendre la fin du XIXème siècle et les découvertes de Louis Pasteur –, le bon sens a poussé le public à les considérer efficaces contre certaines maladies que l’on ne qualifiait pas encore d’infectieuses. Trois ont en particulier concentré toutes les attentions : le lavage des mains, dont nous avions parlé dans l’épisode précédent, la distanciation sociale, ou du moins physique, et le port du masque, en particulier un modèle emblématique qui est resté dans l’imaginaire collectif.

Le masque, un dispositif qui s’affine au fil des épidémies

Commençons par l’éloignement physique, prôné par Érasme et ses contemporains pour se protéger contre la syphilis, identifiée en tant que maladie en Europe à la fin du XVèmesiècle. Dans ses Colloquesparus en 1529, le philosophe et humaniste hollandais évoque ainsi la défense « de boire dans un gobelet commun »« de coucher à deux dans un même lit »et de « saluer par un baiser ». Le port du masque n’est (déjà) pas en reste : Érasme recommande également de « faire comme les alchimistes, de prendre un masque qui permette aux yeux de voir par de petits trous vitrés ». Une intuition reprise près de deux cents ans plus tard par Charles de Lorme qui, au XVIIèmesiècle, imagine le fameux masque « à bec de canard », garni de plantes aux propriétés désinfectantes, pour protéger les médecins de la contamination aérienne par la peste. Le dispositif s’affine au fil des années et des épidémies, jusqu’à s’introduire dans le milieu hospitalier à la suite des travaux de Pasteur – encore lui. 
Pour parer au danger d’une contagion infectieuse par les voies respiratoires, en particulier la diphtérie, le Docteur Henri Henrot imagine par exemple dès 1868 un masque respiratoire composé « d’une armature emprisonnant le nez et la bouche, et fermée à l’extérieur par deux toiles métalliques entre lesquelles on place des rondelles de coton. Tous les germes infectieux restent attachés à ces rondelles et l’air est ainsi rigoureusement filtré », décrit en 1915 le quotidien français Le Temps. Mais le port du masque peine à séduire le grand public, alors même qu’il est recommandé par l’Académie de Médecine lors des deux épidémies de grippe de 1918 – la fameuse Grippe Espagnole – et 1929. Est notamment évoquée son incompatibilité avec la mode parisienne, comme le souligne – avec un certain mordant – le quotidien Le Gauloisen 1919 : « Les Parisiennes consentiront-elles à se défigurer pour sauvegarder leurs bronches ? J’ai bien peur qu’elles ne prennent ce masque-là en grippe »


*Voir Hospitalia #51 (décembre 2020), page 88 : « De Ignace Semmelweis à Didier Pittet. Le lavage des mains à la lumière de l’histoire ».

 
Article publié dans le numéro de février d'Hospitalia à consulter ici.
 
 






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