En mars, vous terminerez votre première année à la présidence de la FEHAP. Quels enjeux avez-vous identifié pour ce mandat ?
Marie-Sophie Desaulle : Trois défis majeurs ont été distingués par notre Fédération : un changement de pratiques et d’organisations, pour que les personnes deviennent véritablement actrices de leur parcours, en choisissant le lieu où elles seront soignées et accompagnées ; l’attractivité des métiers et la valorisation des compétences de nos professionnels ; et la juste rémunération des services rendus. Ce sont autant de chantiers autour desquels la FEHAP a déjà commencé à se mobiliser.
Justement, prenons le premier défi, celui relatif aux organisations. Quelles sont ici vos pistes ?
L’accès aux soins pour tous, quels que soient l’âge, la pathologie, le degré de dépendance et la condition sociale, représente une valeur inscrite dans l’ADN du secteur privé solidaire. La FEHAP défend une politique de santé communautaire axée sur la prévention, l’accompagnement et le soin au plus proche du domicile, qui favorise l’implication des personnes dans leurs parcours et s’inscrit dans une approche territoriale. C’est pourquoi nous soutenons le plan « Ma Santé 2022 », qui prône une réforme structurelle des organisations sanitaires à partir de la personne à son domicile. Il est à ce titre nécessaire de mieux valoriser le rôle des services à domicile, première ligne de l’accès à la santé pour les personnes vulnérables, en particulier en situation de handicap, âgées poly-pathologiques ou en socialement précaires. Il est également indispensable d’améliorer la coordination des acteurs du premier recours au sein des Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), englobant tous les acteurs de la ville, y compris les centres de santé, et adossées, pourquoi pas, à des établissements sanitaires et médico-sociaux. Cette organisation est déjà une réalité au sein de la FEHAP, dont le modèle, plus souple et plus réactif, peut être source d’inspiration.
Marie-Sophie Desaulle : Trois défis majeurs ont été distingués par notre Fédération : un changement de pratiques et d’organisations, pour que les personnes deviennent véritablement actrices de leur parcours, en choisissant le lieu où elles seront soignées et accompagnées ; l’attractivité des métiers et la valorisation des compétences de nos professionnels ; et la juste rémunération des services rendus. Ce sont autant de chantiers autour desquels la FEHAP a déjà commencé à se mobiliser.
Justement, prenons le premier défi, celui relatif aux organisations. Quelles sont ici vos pistes ?
L’accès aux soins pour tous, quels que soient l’âge, la pathologie, le degré de dépendance et la condition sociale, représente une valeur inscrite dans l’ADN du secteur privé solidaire. La FEHAP défend une politique de santé communautaire axée sur la prévention, l’accompagnement et le soin au plus proche du domicile, qui favorise l’implication des personnes dans leurs parcours et s’inscrit dans une approche territoriale. C’est pourquoi nous soutenons le plan « Ma Santé 2022 », qui prône une réforme structurelle des organisations sanitaires à partir de la personne à son domicile. Il est à ce titre nécessaire de mieux valoriser le rôle des services à domicile, première ligne de l’accès à la santé pour les personnes vulnérables, en particulier en situation de handicap, âgées poly-pathologiques ou en socialement précaires. Il est également indispensable d’améliorer la coordination des acteurs du premier recours au sein des Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), englobant tous les acteurs de la ville, y compris les centres de santé, et adossées, pourquoi pas, à des établissements sanitaires et médico-sociaux. Cette organisation est déjà une réalité au sein de la FEHAP, dont le modèle, plus souple et plus réactif, peut être source d’inspiration.
Vous prônez également de nouvelles dynamiques. Pouvez-vous nous en citer quelques-unes ?
Nous soutenons en effet la création d’hôpitaux de proximité qui soient réellement coordonnés avec les acteurs du médico-social. Par exemple, dans les territoires en difficulté, les établissements de Soins de Suite et de Réadaptation (SSR) pourraient avoir un rôle plus affirmé, en particulier à travers les admissions directes. L’Hospitalisation à Domicile (HAD), qui élargit le champ des possibles dans un cadre sécurisé et de qualité, gagnerait aussi à mieux se développer. Nous souhaitons, par ailleurs, que la place des établissements sanitaires de la FEHAP dans l’offre de recours soit mieux reconnue. Cette offre ne se résume pas aux Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT) publics ! D’autant que la FEHAP s’investit pleinement dans la qualité et la pertinence des pratiques : plus de 50% de nos établissements sont certifiés sans recommandation ni réserve par la Haute Autorité de Santé (HAS), soit 30 points d’écart avec ceux du secteur public, et seulement 0,2% ne sont pas certifiés, ce qui représente le plus faible score, tous secteurs confondus.
Vous évoquiez plus haut la solidarité comme une valeur inhérente à la FEHAP. Comment celle-ci se traduit-elle sur le plan organisationnel ?
Fédérant près d’un tiers des EHPAD présents sur le territoire national, la FEHAP est particulièrement investie auprès des personnes âgées, dont le nombre va considérablement augmenter ces prochaines années. Nos modalités d’accompagnement devront donc être revues pour que ces institutions demeurent économiquement soutenables. Nous sommes d’ailleurs prêts à nous engager sur la réforme du grand âge, et regrettons de la voir encore retardée. Rappelons à ce titre que, si la FEHAP promeut une société inclusive, plus accueillante et plus respectueuse des personnes, nous savons aussi que la soutenabilité à long terme de notre système de santé construit sur la solidarité passera par une mutation profonde de ses organisations et de ses pratiques. Noussommes prêts à prendre notre part de responsabilité et avons déjà démontré notre capacité à accompagner les réformes, à innover et à nous engager dans des mutations parfois douloureuses, qui peuvent remettre en cause des situations anciennes et des pratiques bien ancrées. Mais nous ne pourrons pas suivre sans reconnaissance, sans soutien et sans accompagnement de nos établissements et services.
Nous soutenons en effet la création d’hôpitaux de proximité qui soient réellement coordonnés avec les acteurs du médico-social. Par exemple, dans les territoires en difficulté, les établissements de Soins de Suite et de Réadaptation (SSR) pourraient avoir un rôle plus affirmé, en particulier à travers les admissions directes. L’Hospitalisation à Domicile (HAD), qui élargit le champ des possibles dans un cadre sécurisé et de qualité, gagnerait aussi à mieux se développer. Nous souhaitons, par ailleurs, que la place des établissements sanitaires de la FEHAP dans l’offre de recours soit mieux reconnue. Cette offre ne se résume pas aux Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT) publics ! D’autant que la FEHAP s’investit pleinement dans la qualité et la pertinence des pratiques : plus de 50% de nos établissements sont certifiés sans recommandation ni réserve par la Haute Autorité de Santé (HAS), soit 30 points d’écart avec ceux du secteur public, et seulement 0,2% ne sont pas certifiés, ce qui représente le plus faible score, tous secteurs confondus.
Vous évoquiez plus haut la solidarité comme une valeur inhérente à la FEHAP. Comment celle-ci se traduit-elle sur le plan organisationnel ?
Fédérant près d’un tiers des EHPAD présents sur le territoire national, la FEHAP est particulièrement investie auprès des personnes âgées, dont le nombre va considérablement augmenter ces prochaines années. Nos modalités d’accompagnement devront donc être revues pour que ces institutions demeurent économiquement soutenables. Nous sommes d’ailleurs prêts à nous engager sur la réforme du grand âge, et regrettons de la voir encore retardée. Rappelons à ce titre que, si la FEHAP promeut une société inclusive, plus accueillante et plus respectueuse des personnes, nous savons aussi que la soutenabilité à long terme de notre système de santé construit sur la solidarité passera par une mutation profonde de ses organisations et de ses pratiques. Noussommes prêts à prendre notre part de responsabilité et avons déjà démontré notre capacité à accompagner les réformes, à innover et à nous engager dans des mutations parfois douloureuses, qui peuvent remettre en cause des situations anciennes et des pratiques bien ancrées. Mais nous ne pourrons pas suivre sans reconnaissance, sans soutien et sans accompagnement de nos établissements et services.
Quid du deuxième défi, celui des métiers ?
Face aux enjeux d’attractivité des métiers, de valorisation des compétences et de juste rémunération, la FEHAP a entrepris une réflexion avec ses adhérents autour de sa convention collective nationale (CCN), dans le but de mieux valoriser « Un parcours professionnel pour tous ». Cela s’est déjà traduit par le lancement d’une consultation nationale sur la CCN 51 auprès de nos adhérents. Le nouveau système – si nouveau système il y a –, devra s’articuler autour de quatre principes : la simplicité, la sécurité, la souplesse et l’adaptabilité. En ce qui concerne plus spécifiquement la valorisation de l’image des métiers du soin et de l’accompagnement, nous avons entamé une réflexion sur l’enjeu culturel, qui consisterait à changer de sémantique – par exemple l’auxiliaire de vie n’est pas une femme de ménage, elle accompagne dans son autonomie une personne âgée dépendante – face à la réalité d’un métier complexe, à responsabilité auprès d’une personne fragile. Nous nous attachons également à créer de nouvelles formations pour reconnaître les acquis et mieux valoriser les compétences. Ce qui implique, d’ailleurs, une revalorisation des salaires et l’intégration de réelles perspectives de carrière.
Pouvez-vous nous citer ici quelques réalisations concrètes ?
La FEHAP propose par exemple un cycle de formation inédit, commun aux infirmiers d’EHPAD et de SIAD (services de soins infirmiers à domicile), qui couvre l’ensemble des sujets : management, métiers, gestion, compréhension de l’univers d’intervention, etc. Les infirmiers coordonnateurs (IDEC) bénéficient ainsi d’une formation reconnue – et à terme diplômante – leur permettant de mieux encadrer, et donc de fidéliser, les salariés. Nous soutenons et coordonnons également, depuis 2015, la démarche « Associons nos savoirs », qui vise à donner la parole aux patients et à leurs représentants pour les impliquer dans les actions et programmes de formations professionnelles. Un plaidoyer a été diffusé en ce sens en septembre 2018, signé par la Ministre un mois plus tard. Depuis, nous travaillons à la création de formations intégrant une nouvelle dimension, celle de la prise en compte de la parole de la personne. Sur le plan de l’apprentissage, la FEHAP entend organiser, dès 2020, un Tour de France associant les organismes de formation, afin que les employeurs puissent mieux appréhender les avantages de l’alternance.
Venons-en au troisième grand défi, la juste rémunération du service rendu.
L’enjeu est de taille : si les tarifs hospitaliers évoluent négativement depuis plus de dix ans, le secteur privé solidaire a été le seul à subir une nouvelle baisse de ses tarifs en 2019. La situation budgétaire et financière des établissements de santé privés à but non lucratif se détériore et devient désormais très critique. La dégradation est encore plus prononcée dans le secteur MCO, avec un déficit cumulé qui a doublé entre 2017 et 2018 pour atteindre -77,8 millions d’euros. Corollaire direct de cet état de fait : l’investissement est en berne sur le secteur privé non lucratif (PNL). La capacité d’autofinancement a diminué de 27% entre 2017 et 2019, et le secteur ne dispose plus de marges de manœuvre pour investir, alors que les taux de vétusté flambent pour atteindre près de 60%. Nous demandons donc la reconnaissance et la prise en compte du différentiel de charges avec le secteur public, mais aussi l’arrêt de la reprise du crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires (CITS), qui menace la survie-même de notre secteur sanitaire. Rappelons que pour honorer l’engagement de la Ministre de verser une prime nette de 100 euros aux personnels des urgences, il en coutera 146 euros à l’hôpital public, et 201 euros dans nos établissements.
La FEHAP porte également d’autres revendications sur le plan du financement. Lesquelles ?
Nous souhaitons des réformes qui profitent à tous, aux établissements comme aux personnes accueillies. Ainsi, dans le cadre de la réforme du financement des établissements et services pour personnes en situation de handicap (SERAFIN-PH), la FEHAP propose un modèle inédit, qui permettrait de renforcer et de faciliter le rôle des personnes en situation de handicap pour les rendre actrices de leur parcours. Doublement vertueux, il garantit le modèle économique des établissements et le libre choix des prestations de soins et d’accompagnement aux personnes, tout en suscitant une émulation du secteur autour de la qualité des prestations sans reste à charge. Sur le grand âge, et dans le prolongement des annonces récemment faites par le Premier Ministre pour l’hôpital, la FEHAP demande une réforme rapide du financement de la perte d’autonomie, et propose un modèle transitoire pouvant s’appliquer dès aujourd’hui : étaler le remboursement de la dette sociale en en redéployant dès à présent une partie de la contribution (CRDS).
Vous évoquiez le secteur hospitalier public, qui connaît actuellement une crise sans précédent. Comment se positionne ici le secteur PNL ?
La Fédération a salué les mesures annoncées par Agnès Buzyn, et les efforts du gouvernement pour accompagner l’hôpital. Mais l’hôpital public n’est pas le seul hôpital du « public ». La FEHAP regrette donc la mise à l’écart des ESPIC, malgré leur mission d’intérêt général visant à proposer un accès égal aux soins pour tous sur l’ensemble du territoire : le secteur privé solidaire est en effet un acteur déterminant de l’offre de soins, y compris sur certains territoires oubliés de l’offre publique, et doit être reconnu comme tel. À titre d’exemple, 40% des passages aux urgences pédiatriques en région PACA sont assurés par des établissements PNL ! C’est pourquoi nous demandons la transparence et l’équité sur la ventilation du Fond d’intervention régional (FIR) et de l’ONDAM, y compris des Missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (MERRI), à la juste hauteur de notre participation.
L’année 2020 s’annonce donc riche en projets.
Elle annonce, surtout, la fin de notre projet stratégique 2014-2020 ! L’année 2020 sera donc l’occasion de construire le nouveau projet stratégique de la Fédération, 2021-2027, au service de nos trois défis. Bien sûr il y aura d’autres sujets d’actualité sur lesquels la FEHAP devra se pencher, et notamment la future loi Grand-Âge et Autonomie et la réforme du financement dans le champ du handicap (Serafin PH). Nous attendons que des mesures concrètes, accompagnées de financements à la hauteur des enjeux, soient annoncées durant l’année. Nous y veillerons tout particulièrement.
Arrêtons-nous, pour finir, sur le 44ème Congrès de la FEHAP, qui vient de se tenir à Marseille les 27 et 28 novembre. Quel bilan tirer de cette édition 2019?
Nous avons une fois de plus noté une belle dynamique concernant la participation, avec plus de 800 congressistes, qui ont d’ailleurs souligné la qualité des intervenants et des interventions. La présence d’Agnès Buzyn, de Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, et du Dr Thomas Mesnier, médecin urgentiste et député, pour clôturer notre Congrès témoigne de la place centrale qu’occupent notre Fédération, et surtout nos adhérents, dans le système de soins et de protection sociale.
Le fil rouge était, cette année, « La personne actrice de son parcours à l’ère du numérique ». Pourquoi ce choix ?
Ce thème contenait à lui seul l’essence-même de notre politique de santé communautaire. Il intègre en effet quatre notions fondamentales pour la FEHAP : la personne en tant qu’humain, dans sa globalité et non uniquement comme patient ou usager ; actrice, c’est-à-dire qui dispose d’une liberté de choix, et dont la volonté pour contribuer et décider de son parcours est respectée ; le parcours lui-même, nécessaire à la coordination des acteurs ; et enfin le numérique, dans un contexte de digitalisation de l’économie en général et en particulier dans la santé. La personne actrice de son parcours à l’ère du numérique, c’est donc à la fois : envisager la e-santé comme un outil permettant justement à cette personne d’être actrice dans une logique de parcours (télémédecine, applications, DMP,…) ; envisager le numérique comme l’outil qui permettra, peut-être, de combler l’écart actuel entre l’ambition des réformes et leur application concrète – par exemple en ce qui concerne l’évolution des modes de financement et le parcours ; et envisager enfin les écueils de la numérisation de la santé, comme la fracture numérique pour les personnes vulnérables, la protection des données, etc. Les enjeux sont de taille, et nombreux. Ce Congrès a eu l’ambition d’aborder l’ensemble de leurs facettes à travers 17 conférences réunissant près de 70 intervenants. Le prochain rendez-vous ? Notre Assemblée Générale, qui aura lieu le 25 mars 2020 !
Face aux enjeux d’attractivité des métiers, de valorisation des compétences et de juste rémunération, la FEHAP a entrepris une réflexion avec ses adhérents autour de sa convention collective nationale (CCN), dans le but de mieux valoriser « Un parcours professionnel pour tous ». Cela s’est déjà traduit par le lancement d’une consultation nationale sur la CCN 51 auprès de nos adhérents. Le nouveau système – si nouveau système il y a –, devra s’articuler autour de quatre principes : la simplicité, la sécurité, la souplesse et l’adaptabilité. En ce qui concerne plus spécifiquement la valorisation de l’image des métiers du soin et de l’accompagnement, nous avons entamé une réflexion sur l’enjeu culturel, qui consisterait à changer de sémantique – par exemple l’auxiliaire de vie n’est pas une femme de ménage, elle accompagne dans son autonomie une personne âgée dépendante – face à la réalité d’un métier complexe, à responsabilité auprès d’une personne fragile. Nous nous attachons également à créer de nouvelles formations pour reconnaître les acquis et mieux valoriser les compétences. Ce qui implique, d’ailleurs, une revalorisation des salaires et l’intégration de réelles perspectives de carrière.
Pouvez-vous nous citer ici quelques réalisations concrètes ?
La FEHAP propose par exemple un cycle de formation inédit, commun aux infirmiers d’EHPAD et de SIAD (services de soins infirmiers à domicile), qui couvre l’ensemble des sujets : management, métiers, gestion, compréhension de l’univers d’intervention, etc. Les infirmiers coordonnateurs (IDEC) bénéficient ainsi d’une formation reconnue – et à terme diplômante – leur permettant de mieux encadrer, et donc de fidéliser, les salariés. Nous soutenons et coordonnons également, depuis 2015, la démarche « Associons nos savoirs », qui vise à donner la parole aux patients et à leurs représentants pour les impliquer dans les actions et programmes de formations professionnelles. Un plaidoyer a été diffusé en ce sens en septembre 2018, signé par la Ministre un mois plus tard. Depuis, nous travaillons à la création de formations intégrant une nouvelle dimension, celle de la prise en compte de la parole de la personne. Sur le plan de l’apprentissage, la FEHAP entend organiser, dès 2020, un Tour de France associant les organismes de formation, afin que les employeurs puissent mieux appréhender les avantages de l’alternance.
Venons-en au troisième grand défi, la juste rémunération du service rendu.
L’enjeu est de taille : si les tarifs hospitaliers évoluent négativement depuis plus de dix ans, le secteur privé solidaire a été le seul à subir une nouvelle baisse de ses tarifs en 2019. La situation budgétaire et financière des établissements de santé privés à but non lucratif se détériore et devient désormais très critique. La dégradation est encore plus prononcée dans le secteur MCO, avec un déficit cumulé qui a doublé entre 2017 et 2018 pour atteindre -77,8 millions d’euros. Corollaire direct de cet état de fait : l’investissement est en berne sur le secteur privé non lucratif (PNL). La capacité d’autofinancement a diminué de 27% entre 2017 et 2019, et le secteur ne dispose plus de marges de manœuvre pour investir, alors que les taux de vétusté flambent pour atteindre près de 60%. Nous demandons donc la reconnaissance et la prise en compte du différentiel de charges avec le secteur public, mais aussi l’arrêt de la reprise du crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires (CITS), qui menace la survie-même de notre secteur sanitaire. Rappelons que pour honorer l’engagement de la Ministre de verser une prime nette de 100 euros aux personnels des urgences, il en coutera 146 euros à l’hôpital public, et 201 euros dans nos établissements.
La FEHAP porte également d’autres revendications sur le plan du financement. Lesquelles ?
Nous souhaitons des réformes qui profitent à tous, aux établissements comme aux personnes accueillies. Ainsi, dans le cadre de la réforme du financement des établissements et services pour personnes en situation de handicap (SERAFIN-PH), la FEHAP propose un modèle inédit, qui permettrait de renforcer et de faciliter le rôle des personnes en situation de handicap pour les rendre actrices de leur parcours. Doublement vertueux, il garantit le modèle économique des établissements et le libre choix des prestations de soins et d’accompagnement aux personnes, tout en suscitant une émulation du secteur autour de la qualité des prestations sans reste à charge. Sur le grand âge, et dans le prolongement des annonces récemment faites par le Premier Ministre pour l’hôpital, la FEHAP demande une réforme rapide du financement de la perte d’autonomie, et propose un modèle transitoire pouvant s’appliquer dès aujourd’hui : étaler le remboursement de la dette sociale en en redéployant dès à présent une partie de la contribution (CRDS).
Vous évoquiez le secteur hospitalier public, qui connaît actuellement une crise sans précédent. Comment se positionne ici le secteur PNL ?
La Fédération a salué les mesures annoncées par Agnès Buzyn, et les efforts du gouvernement pour accompagner l’hôpital. Mais l’hôpital public n’est pas le seul hôpital du « public ». La FEHAP regrette donc la mise à l’écart des ESPIC, malgré leur mission d’intérêt général visant à proposer un accès égal aux soins pour tous sur l’ensemble du territoire : le secteur privé solidaire est en effet un acteur déterminant de l’offre de soins, y compris sur certains territoires oubliés de l’offre publique, et doit être reconnu comme tel. À titre d’exemple, 40% des passages aux urgences pédiatriques en région PACA sont assurés par des établissements PNL ! C’est pourquoi nous demandons la transparence et l’équité sur la ventilation du Fond d’intervention régional (FIR) et de l’ONDAM, y compris des Missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (MERRI), à la juste hauteur de notre participation.
L’année 2020 s’annonce donc riche en projets.
Elle annonce, surtout, la fin de notre projet stratégique 2014-2020 ! L’année 2020 sera donc l’occasion de construire le nouveau projet stratégique de la Fédération, 2021-2027, au service de nos trois défis. Bien sûr il y aura d’autres sujets d’actualité sur lesquels la FEHAP devra se pencher, et notamment la future loi Grand-Âge et Autonomie et la réforme du financement dans le champ du handicap (Serafin PH). Nous attendons que des mesures concrètes, accompagnées de financements à la hauteur des enjeux, soient annoncées durant l’année. Nous y veillerons tout particulièrement.
Arrêtons-nous, pour finir, sur le 44ème Congrès de la FEHAP, qui vient de se tenir à Marseille les 27 et 28 novembre. Quel bilan tirer de cette édition 2019?
Nous avons une fois de plus noté une belle dynamique concernant la participation, avec plus de 800 congressistes, qui ont d’ailleurs souligné la qualité des intervenants et des interventions. La présence d’Agnès Buzyn, de Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des personnes handicapées, et du Dr Thomas Mesnier, médecin urgentiste et député, pour clôturer notre Congrès témoigne de la place centrale qu’occupent notre Fédération, et surtout nos adhérents, dans le système de soins et de protection sociale.
Le fil rouge était, cette année, « La personne actrice de son parcours à l’ère du numérique ». Pourquoi ce choix ?
Ce thème contenait à lui seul l’essence-même de notre politique de santé communautaire. Il intègre en effet quatre notions fondamentales pour la FEHAP : la personne en tant qu’humain, dans sa globalité et non uniquement comme patient ou usager ; actrice, c’est-à-dire qui dispose d’une liberté de choix, et dont la volonté pour contribuer et décider de son parcours est respectée ; le parcours lui-même, nécessaire à la coordination des acteurs ; et enfin le numérique, dans un contexte de digitalisation de l’économie en général et en particulier dans la santé. La personne actrice de son parcours à l’ère du numérique, c’est donc à la fois : envisager la e-santé comme un outil permettant justement à cette personne d’être actrice dans une logique de parcours (télémédecine, applications, DMP,…) ; envisager le numérique comme l’outil qui permettra, peut-être, de combler l’écart actuel entre l’ambition des réformes et leur application concrète – par exemple en ce qui concerne l’évolution des modes de financement et le parcours ; et envisager enfin les écueils de la numérisation de la santé, comme la fracture numérique pour les personnes vulnérables, la protection des données, etc. Les enjeux sont de taille, et nombreux. Ce Congrès a eu l’ambition d’aborder l’ensemble de leurs facettes à travers 17 conférences réunissant près de 70 intervenants. Le prochain rendez-vous ? Notre Assemblée Générale, qui aura lieu le 25 mars 2020 !