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« Nous réalisions jusqu’à 18 000 scanners Covid par semaine » 


Rédigé par Anaïs Guilbaud le Vendredi 24 Juillet 2020 à 09:51 | Lu 372 fois


Que ce soit en termes d’aide au diagnostic ou pour le suivi des patients Covid hospitalisés, les équipes de radiologie ont été grandement sollicitées pendant l’épidémie, entraînant une réorganisation totale des services. Aujourd’hui s’amorce un difficile retour à la normale.



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« Nous ne pensions pas que les services de radiologie seraient autant impactés. Nous aurions eu des tests PCR rapides et fiables, tout aurait été différent ». Comme l’exprime le Docteur Philippe Cart, président du Syndicat des Radiologues Hospitaliers (SRH) et chef du service de radiologie de l’hôpital de Charleville-Mézières, nombre de professionnels de l’imagerie médicale ne s’attendaient pas à un tel raz-de-marée.
Mais avec 30 % de faux négatifs, les équipes ont eu fort à faire pour soutenir les secteurs Covid et aiguiller les patients, le scanner étant souvent le meilleur moyen d’obtenir un diagnostic fiable et rapide. « Selon le réseau SFR-Covid, qui a recensé l'activité de plus de 350 centres durant la crise, nous réalisions jusqu’à 18 000 scanners Covid par semaine », décompte ainsi Fabien Voix, président de l’Association Française du Personnel Paramédical d’Électroradiologie (AFPPE) et cadre supérieur au CHU de Poitiers.

Parcours dédiés

Mais pour assurer de telles performances, encore fallait-il dégager des ressources humaines et matérielles. « Nous sommes devenus un hôpital avec une organisation centrée sur une mono-pathologie », résume le Dr Cart. Et pour ce faire, la première étape aura été de déprogrammer les activités non-urgentes. Un « tri » fastidieux et chronophage. « Il était parfois compliqué de décider quels examens conserver, alors même que nous ne savions pas combien de temps durerait la crise », souligne Fabien Voix.
« Des circuits spécifiques doivent être mis en place, avec selon l'affluence et le nombre de scanners disponibles, des horaires dédiés sur un scanner ou un scanner totalement dédié à cette activité », écrivait la Société Française de Radiologie (SFR), dans son e-bulletin du 27 mars. La réorganisation de l’ensemble des flux, pour éviter les croisements entre patients Covid et non-Covid, aura donc constitué l’autre enjeu majeur de la gestion de crise.
Pour les personnels interrogés, cette nouvelle façon de faire se sera avérée salutaire, car au-delà d’assurer une plus grande sécurité, elle aura permis de simplifier la mise en œuvre des strictes procédures d’hygiène recommandées par la Société Française d’Hygiène Hospitalière (SF2H). D’autant que d’un point de vue technique, les scanners n’étaient pas vraiment préparés. « Au début, il fallait attendre 4 heures entre 2 scanners » raconte Philippe Cart. « Puis les recommandations se sont assouplies et il ne fallait plus qu’une heure ». Fabien Voix, de son côté, évoque une demi-heure de préparation pour « un examen d’acquisition de 5 minutes ». Depuis, le Syndicat National de l’Industrie des Technologies Médicales (SNITEM) a été sollicité pour engager une réflexion sur des machines plus facilement lavables.

Renforcement des équipes et masques au compte-gouttes

Côté humain, la crise s’est généralement traduite par un renforcement des équipes. Dans un souci de maîtrise du risque infectieux, la règle voulait en effet que les manipulateurs travaillent en binôme. L’un pouvait ainsi s’occuper du patient, de la salle d’examen et du matériel potentiellement contaminé, tandis que l’autre gérait exclusivement l’environnement « propre ». Le président de l’AFPPE explique d’ailleurs avoir pu bénéficier du soutien d’autres services mis à l’arrêt.
« Nous avons tous à peu près fait la même chose, même s’il y a eu pas mal de débrouillardise locale », souligne quant à lui le président du SRH. Mais si dans l’ensemble, les services ont réussi à s’organiser de manière efficace, la question des équipements de protection revient inlassablement dans la liste des dysfonctionnements. Le président de l’AFPPE évoque ainsi une période de trouble les premières semaines. « Il a fallu plusieurs remontées de découvertes fortuites [de cas de Covid-19] au scanner et la pression du terrain pour obtenir des dotations ». Blouses et sur-blouses ont également fait l’objet de tensions dans certains établissements.

Pistes d’amélioration

« Cette expérience nous a permis de repenser la façon dont nous gérons les épidémies. Nous pourrions d’ailleurs imaginer réintroduire le port du masque en période de grippe, notamment pour les personnels fragiles », poursuit Fabien Voix, tout en espérant que le travail effectué pour la mise en œuvre de circuits dédiés restera acquis.
En la matière, le Dr Cart évoque les difficultés rencontrées par les hôpitaux les plus récents, ces « gros blocs très concentrés, sur plusieurs étages ». Pour le radiologue, cette crise pourrait être le déclencheur de nouvelles approches architecturales et d’un retour à des structures plus séparées. Ou pourquoi ne pas imaginer des locaux modulaires et divisibles, « facilement isolables en cas d’épidémie ».
Il évoque également la réflexion menée par le Conseil Professionnel de la Radiologie française (G4) sur l’intérêt d’équiper les territoires en machines mobiles. Facilement déplaçables car installées dans des camions, elles auraient vocation à venir soutenir les services en tension, et à faciliter, en période épidémique, la mise en œuvre de circuits dédiés.

Quid du retour à la normale ?

« Nous avons montré que nous étions capables de nous débrouiller, sans passer par toutes les strates administratives habituelles.En une semaine seulement, nous sommes passés de 20 à 60 lits de réanimation, alors même que cela faisait 10 ans que nous essayions d’en obtenir 3 de plus ». Fier de la gestion de crise, Philippe Cart ne cache pas pour autant son scepticisme quant à l’issue du « Ségur de la Santé ». Fabien Voix espère quant à lui, que cette crise aura permis de faire « sortir de l’ombre » le domaine de la radiologie, et plus encore le métier de manipulateur.
En attendant, avec la reprise progressive de l’activité programmée et l’allongement des délais d’examens, tous deux prévoient un rythme soutenu pour les mois à venir. « On essaye de garder la capacité de faire du Covid, tout en évitant d’accumuler plus de retard. Ce qui continue de nous mettre en difficulté », constate le représentant de l’AFPPE. D’autant que, comme l’explique Philippe Cart, « nous voyons arriver aux Urgences, un afflux de patients avec des pathologies qui avaient totalement disparu et dans des états très dégradés ».



Article publié sur le numéro de juin d'Hospitalia à consulter ici : https://www.hospitalia.fr/Hospitalia-49-Special-Covid-19-MERCI-_a2230.html  






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