Nicole Flambard, DSI du CH de Maubeuge
La transformation numérique des établissements de santé représente plus que jamais un enjeu stratégique. Quelles évolutions observez-vous ?
Nicole Flambard : L’utilisation accrue du numérique est désormais présente dans tous les domaines. La dématérialisation, le développement de la télémédecine, la montée en puissance des outils e-santé, l’arrivée de nouveaux services en ligne, la robotisation… sont autant de tendances qui continuent de s’accélérer. Encore relativement récente, l'utilisation de l'intelligence artificielle pour l’exploitation des données de santé devrait elle aussi s’accroître, et trouver des applications étendues pour améliorer la prise en charge du patient tout au long de son parcours de vie, en matière de prévention comme de diagnostic.
Quel l’impact ces dynamiques ont-elles sur votre métier ?
Le DSI doit désormais avoir des connaissances pluridisciplinaires. Auparavant plutôt perçus comme des techniciens, nous sommes aujourd’hui des managers : notre fonction est devenue plus stratégique, pour à la fois répondre aux enjeux de notre système de santé et rechercher des leviers de performance pour nos hôpitaux. À cet égard, nous sommes au cœur de l’action, car la numérisation et la digitalisation créent ici des attentes bien réelles. Et, parce que les systèmes d’information de santé doivent être co-construits avec la communauté médico-soignante, nos relations avec elle évoluent aussi. L’accompagnement du DSI reste essentiel, notamment sur le plan technique, afin de garantir l’interopérabilité et la sécurité des outils métiers.
Qu’entendez-vous par là ?
Les professionnels de santé sont des citoyens comme les autres : ils utilisent les technologies numériques dans leur vie quotidienne, pour des applications personnelles et à travers des outils grand public – donc pensés pour être très intuitifs. La donne est différente pour les usages professionnels. Le DSI a donc ici un rôle de conseiller, pour expliquer les enjeux propres à un établissement hospitalier : la facilité d’utilisation est certes nécessaire, mais il faut également tenir compte d’un certain nombre de contraintes, liées à la protection des données personnelles, l’ouverture vers l’extérieur, la prévention des cyberattaques… qui complexifient la mise à disposition de cet ensemble technologique qu’est le système d’information hospitalier. Les DSI doivent s’adapter, pour répondre de manière plus rapide aux demandes des professionnels de l’hôpital, pour les écouter et les accompagner dans tous les changements induits par le virage numérique, tout en conservant leur rôle de fournisseur de services, chargé d’assurer la sécurité et l'intégrité de l'écosystème informatique.
Comment imaginez-vous l’hôpital de demain et quelle serait alors la place du DSI ?
Pour moi, l'hôpital de demain sera un hôpital plus ouvert, plus connecté et plus accessible. Il devra permettre aux patients de gagner en confort et en confiance, car il proposera des parcours limitant au maximum les moments de stress, voire d’incompréhensions. La télémédecine, les objets connectés et l’intelligence artificielle auront ici un rôle important à jouer, mais l’humain conservera une place centrale. La technologie viendra surtout en appui des soignants, afin qu’ils puissent disposer de plus de temps à consacrer aux patients. Elle leur offrira un accès plus rapide et plus fiable aux données, dossiers et documents nécessaires à la prise en charge. L’avenir de nos hôpitaux sera donc certainement marqué par des usages numériques accrus, mais il sera, aussi, nécessairement lié aux enjeux de la cybersécurité et du développement durable. C’est d’ailleurs un point sur lequel nous sommes déjà de plus en plus vigilants : conserver trop de données, ou faire tourner trop de serveurs, sont des actions qui ont un impact environnemental. Aujourd’hui, et plus encore demain, le DSI devra prendre ce facteur en compte lors de la mise en place de nouvelles solutions.
Identifiez-vous des leviers ou des écueils particuliers pour accompagner ces virages ?
Les freins actuels ont essentiellement trait aux situations financières des hôpitaux, que l’on sait compliquées. On nous demande d’être économiques et écologiques, mais aussi innovants ; il nous faut donc développer une forte capacité d’adaptation pour innover à moindre coût, alors même que les avancées de la technologie nous offrent une multitude de possibilités d'innovation. D’ailleurs, c’est dans ce champ des possibles que se situe à mon sens le levier principal. Dans l’univers hospitalier, les DSI ont de tout temps été des fournisseurs de services. Si notre métier était à l’origine centré sur le support technique, la donne a évolué. Comme nous l’avons évoqué plus haut, nous devons désormais mieux accompagner les différents métiers de l’hôpital dans la recherche, la sélection et l’appropriation de solutions qui leur permettront de relever les enjeux qui sont les leurs et d’anticiper ceux à venir.
Le mot de la fin ?
Notre métier a assurément changé, puisqu’il nous faut aujourd’hui concilier les évolutions de la technologie avec celles de l’hôpital : les nouveaux besoins, les contraintes financières et règlementaires, les mutualisations, l’ouverture sur le territoire… Tous ces paramètres nous imposent une coordination de tout instant, pour assurer une cohérence d’ensemble, et donc garantir la sécurité de l’établissement. C’est d’ailleurs un champ sur lequel nous sommes de plus en plus présents, à travers la cybersécurité bien sûr, mais aussi via les systèmes de vidéoprotection et de contrôles d’accès, qui se basent désormais sur l’informatique. De la même manière, l’expertise du DSI est nécessaire pour sécuriser l’utilisation des objets connectés, a fortiori lorsque ceux-ci remontent les informations directement dans le dossier du patient. Ce sont là autant de paramètres qui interviennent dans la sécurisation d’un établissement de santé. Et le sujet est clairement d’actualité, comme en témoigne la sortie du programme national CaRE, venu s’ajouter aux autres programmes nationaux en lien avec la santé numérique. Tous ont la même ambition : offrir de nouvelles opportunités pour faire émerger des outils plus qualitatifs, plus efficaces et plus sûrs.
> Article paru dans Hospitalia #63, édition de décembre 2023, à lire ici
Nicole Flambard : L’utilisation accrue du numérique est désormais présente dans tous les domaines. La dématérialisation, le développement de la télémédecine, la montée en puissance des outils e-santé, l’arrivée de nouveaux services en ligne, la robotisation… sont autant de tendances qui continuent de s’accélérer. Encore relativement récente, l'utilisation de l'intelligence artificielle pour l’exploitation des données de santé devrait elle aussi s’accroître, et trouver des applications étendues pour améliorer la prise en charge du patient tout au long de son parcours de vie, en matière de prévention comme de diagnostic.
Quel l’impact ces dynamiques ont-elles sur votre métier ?
Le DSI doit désormais avoir des connaissances pluridisciplinaires. Auparavant plutôt perçus comme des techniciens, nous sommes aujourd’hui des managers : notre fonction est devenue plus stratégique, pour à la fois répondre aux enjeux de notre système de santé et rechercher des leviers de performance pour nos hôpitaux. À cet égard, nous sommes au cœur de l’action, car la numérisation et la digitalisation créent ici des attentes bien réelles. Et, parce que les systèmes d’information de santé doivent être co-construits avec la communauté médico-soignante, nos relations avec elle évoluent aussi. L’accompagnement du DSI reste essentiel, notamment sur le plan technique, afin de garantir l’interopérabilité et la sécurité des outils métiers.
Qu’entendez-vous par là ?
Les professionnels de santé sont des citoyens comme les autres : ils utilisent les technologies numériques dans leur vie quotidienne, pour des applications personnelles et à travers des outils grand public – donc pensés pour être très intuitifs. La donne est différente pour les usages professionnels. Le DSI a donc ici un rôle de conseiller, pour expliquer les enjeux propres à un établissement hospitalier : la facilité d’utilisation est certes nécessaire, mais il faut également tenir compte d’un certain nombre de contraintes, liées à la protection des données personnelles, l’ouverture vers l’extérieur, la prévention des cyberattaques… qui complexifient la mise à disposition de cet ensemble technologique qu’est le système d’information hospitalier. Les DSI doivent s’adapter, pour répondre de manière plus rapide aux demandes des professionnels de l’hôpital, pour les écouter et les accompagner dans tous les changements induits par le virage numérique, tout en conservant leur rôle de fournisseur de services, chargé d’assurer la sécurité et l'intégrité de l'écosystème informatique.
Comment imaginez-vous l’hôpital de demain et quelle serait alors la place du DSI ?
Pour moi, l'hôpital de demain sera un hôpital plus ouvert, plus connecté et plus accessible. Il devra permettre aux patients de gagner en confort et en confiance, car il proposera des parcours limitant au maximum les moments de stress, voire d’incompréhensions. La télémédecine, les objets connectés et l’intelligence artificielle auront ici un rôle important à jouer, mais l’humain conservera une place centrale. La technologie viendra surtout en appui des soignants, afin qu’ils puissent disposer de plus de temps à consacrer aux patients. Elle leur offrira un accès plus rapide et plus fiable aux données, dossiers et documents nécessaires à la prise en charge. L’avenir de nos hôpitaux sera donc certainement marqué par des usages numériques accrus, mais il sera, aussi, nécessairement lié aux enjeux de la cybersécurité et du développement durable. C’est d’ailleurs un point sur lequel nous sommes déjà de plus en plus vigilants : conserver trop de données, ou faire tourner trop de serveurs, sont des actions qui ont un impact environnemental. Aujourd’hui, et plus encore demain, le DSI devra prendre ce facteur en compte lors de la mise en place de nouvelles solutions.
Identifiez-vous des leviers ou des écueils particuliers pour accompagner ces virages ?
Les freins actuels ont essentiellement trait aux situations financières des hôpitaux, que l’on sait compliquées. On nous demande d’être économiques et écologiques, mais aussi innovants ; il nous faut donc développer une forte capacité d’adaptation pour innover à moindre coût, alors même que les avancées de la technologie nous offrent une multitude de possibilités d'innovation. D’ailleurs, c’est dans ce champ des possibles que se situe à mon sens le levier principal. Dans l’univers hospitalier, les DSI ont de tout temps été des fournisseurs de services. Si notre métier était à l’origine centré sur le support technique, la donne a évolué. Comme nous l’avons évoqué plus haut, nous devons désormais mieux accompagner les différents métiers de l’hôpital dans la recherche, la sélection et l’appropriation de solutions qui leur permettront de relever les enjeux qui sont les leurs et d’anticiper ceux à venir.
Le mot de la fin ?
Notre métier a assurément changé, puisqu’il nous faut aujourd’hui concilier les évolutions de la technologie avec celles de l’hôpital : les nouveaux besoins, les contraintes financières et règlementaires, les mutualisations, l’ouverture sur le territoire… Tous ces paramètres nous imposent une coordination de tout instant, pour assurer une cohérence d’ensemble, et donc garantir la sécurité de l’établissement. C’est d’ailleurs un champ sur lequel nous sommes de plus en plus présents, à travers la cybersécurité bien sûr, mais aussi via les systèmes de vidéoprotection et de contrôles d’accès, qui se basent désormais sur l’informatique. De la même manière, l’expertise du DSI est nécessaire pour sécuriser l’utilisation des objets connectés, a fortiori lorsque ceux-ci remontent les informations directement dans le dossier du patient. Ce sont là autant de paramètres qui interviennent dans la sécurisation d’un établissement de santé. Et le sujet est clairement d’actualité, comme en témoigne la sortie du programme national CaRE, venu s’ajouter aux autres programmes nationaux en lien avec la santé numérique. Tous ont la même ambition : offrir de nouvelles opportunités pour faire émerger des outils plus qualitatifs, plus efficaces et plus sûrs.
> Article paru dans Hospitalia #63, édition de décembre 2023, à lire ici