« Aider les structures de restauration collective à s’engager dans une démarche de progrès ». Telle est l’ambition de « Mon Restau Responsable », une initiative issue de plusieurs années de travail au sein du secteur de la restauration collective. « Nous travaillons depuis 12 ans sur l’accompagnement des restaurants collectifs », raconte Patrice Raveneau, en charge de l’opération au sein de la Fondation Nicolas Hulot, engagée de longue date dans la sensibilisation à l’environnement.« Cette démarche n’est pas un label, tient à préciser Mylène Bliard, responsable du projet pour Restau’Co, le réseau interprofessionnel de la restauration collective en gestion directe. Le système participatif de garantie, qui a été choisi lors de la création de Mon Restau Responsable, est très particulier et permet à tous une participation active ».
Une démarche basée sur la co-construction
Introduit en France par l’association Nature et Progrès, le système participatif de garantie y est encore peu connu. « Il a surtout été développé dans des pays du Sud, pour certifier sans passer par un organisme extérieur », explique Patrice Raveneau. Concrètement, après avoir rempli un questionnaire d’auto-évaluation en ligne, les restaurants souhaitant s’engager dans Mon Restau Responsable reçoivent la visite d’un de leurs pairs pour échanger sur leurs pratiques et sur les améliorations envisagées. Suivant les quatre piliers de la démarche – le bien-être, « l’assiette responsable », les éco-gestes et l’engagement social et territorial –, « le restaurant présente ensuite ses engagements pour deux ans lors d’une séance publique à laquelle il invite ses parties prenantes », complète Mylène Bliard. Tous les deux ans, les restaurants doivent ensuite témoigner de leurs avancées et présenter leurs nouveaux objectifs lors d’une séance publique. « Cela créé une connexion entre les acteurs d’un même territoire ou d’un même secteur », se félicite la coordonnatrice. Le CHU d’Angers est un parfait exemple de cette coopération : après avoir découvert la démarche auprès du CHRU de Besançon, Pierre Madiot, responsable des cuisines du CHU angevin, a décidé de sauter le pas en juin 2018, en même temps qu’une quinzaine de structures du Maine-et-Loire – dont le restaurant universitaire de la Faculté de Médecine.
Des exemples concrets…
Le CHU d’Angers, dont les équipes préparent chaque jour 4 000 repas pour l’hôpital et 900 à destination de l’EHPAD voisin, est l’un des seize hôpitaux engagés dans l’opération. Pour Pierre Madiot, cet engagement est à mettre en regard avec la dimension « pragmatique etconcrète » de Mon Restau Responsable, « qui permet d’y engager l’équipe dans son entièreté »en offrant un cadre clair et lisible pour les agents comme vis-à-vis de l’extérieur. La démarche, estime en effet le responsable, représente aussi un moyen d’augmenter la visibilité de son travail. « La visite d’Audrey Pulvar [alors présidente de la Fondation Nicolas Hulot, NDLR] lors de notre inscription avait donné un réel coup de projecteur sur nos métiers de l’ombre, créant une émulation au sein de l’équipe, de l’hôpital mais aussi du territoire », se souvient Pierre Madiot. Deux ans plus tard, l’ingénieur ne regrette aucunement son engagement, qu’il vient d’ailleurs de renouveler. « Nous nous engageons à chaque fois sur des objectifs qui nous paraissent réalisables pour les deux années à venir », complète-t-il.
Affichages clairs des menus, petit-déjeuner en libre-service à la maternité, création de salles à manger dans l’unité de soins de suite, emplois en lien avec des associations de réinsertion… À Angers, les exemples de projets ne manquent pas. Sur la question spécifique du développement durable, les équipes ont notamment cherché à réduire l’usage des barquettes en plastique. En regroupant viandes et légumes, ils ont ainsi pu le diminuer de 30 % en seulement deux ans. « Outre son impact environnemental, cette action offre également une plus grande convivialité et une présentation plus appétissante pour les patients », précise Pierre Madiot.
Affichages clairs des menus, petit-déjeuner en libre-service à la maternité, création de salles à manger dans l’unité de soins de suite, emplois en lien avec des associations de réinsertion… À Angers, les exemples de projets ne manquent pas. Sur la question spécifique du développement durable, les équipes ont notamment cherché à réduire l’usage des barquettes en plastique. En regroupant viandes et légumes, ils ont ainsi pu le diminuer de 30 % en seulement deux ans. « Outre son impact environnemental, cette action offre également une plus grande convivialité et une présentation plus appétissante pour les patients », précise Pierre Madiot.
… aussi en lien avec l’UNIHA
Passionné, l’ingénieur en restauration a également choisi d’appliquer ces principes au sein d’UNIHA, la coopérative des acheteurs hospitaliers français, pour laquelle il supervise notamment les achats de surgelés. « La communauté des acheteurs est sensibilisée à ces questions depuis de nombreuses années et a déjà pu mettre en place plusieurs initiatives allant dans ce sens », explique l’intéressé. Il évoque notamment le contrat concernant les filets de poisson en « simple congélation », qui a obtenu, l’an dernier, un trophée de l’achat public et bénéficie du logo WWF. « En temps normal, le poisson pêché est congelé, puis traité en usine, la plupart du temps en Asie, pour être détaillé en filets avant d’être recongelé avec des polyphosphates permettant une meilleure rétention de l’eau », détaille Pierre Madiot. Autorisé mais limité par les normes européennes, ce procédé pose donc entre autres un problème de taille : la distance parcourue par les poissons. « La simple congélation permet de garantir une transformation et une congélation soit à bord du navire, soit à terre, dans des centres de traitements côtiers proches du lieu de pêche », note l’ingénieur.
« L’agriculture française est de qualité, il faut en profiter »
Pour aller plus loin cette année, et notamment respecter les exigences de la loi EGalim*, le responsable de la cuisine angevine compte augmenter sa part de produits sous Signes d'Identification de la Qualité et de l’Origine (SIQO)** ou élaborés en France car, insiste-t-il, « l’agriculture française est de qualité, il faut en profiter ». Ainsi, à Angers, les cuisines ne traitent plus de fraises d’Espagne, basculent sur de la tomate de pleine terre en saison, ne servent que des agrumes non-traités après récolte et des raisins exclusivement issus de cépages muscat et chasselas, récoltés en France. « Par rapport à du raisin Italia, le coût passe de 1€/kg à 3 ou 4€/kg », concède Pierre Madiot. Alors, pour faire face à ce surcoût, le responsable intervient sur deux autres paramètres : la compensation avec d’autres repas moins chers, et surtout la réduction du gaspillage alimentaire, s’équipant de fiches, logiciels et services de commandes de repas ultra-précis qui permettent « une élaboration au gramme près ». Un point essentiel pour offrir à tous, patients comme personnels, une alimentation de qualité tout en garantissant un budget maîtrisé.
*Loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, également appelée « loi Alimentation ».
**Soit l’Indication Géographique Protégée (IGP), l’Appellation d’Origine Protégée ou Contrôlée (AOP ou AOC), l’Agriculture Biologique, le Label Rouge et la Spécialité Traditionnelle Garantie (STG).
Article publié dans le numéro de décembre d'Hospitalia à consulter ici.