Pourriez-vous, pour commencer, évoquer votre parcours professionnel ?
Céline Gachot : Ingénieure de formation, je suis diplômée de l’Institut National des Sciences Appliquées de Rennes et ai travaillé pendant plusieurs années en société de services, dans le suivi de projets de recherche. Après cette expérience formatrice, j’ai souhaité me tourner davantage vers les usages et les usagers. Dès 2003, j’ai donc intégré le milieu hospitalier en tant que responsable informatique du Centre Hospitalier de Lannion, dans les Côtes-d’Armor. Marquées, entre autres, par une collaboration constante avec les autres établissements de la Communauté Hospitalière de Territoire (CHT) puis du Groupement Hospitalier de Territoire (GHT) d’Armor, ces années ont notamment mis en lumière le rôle structurant de la Direction – et du directeur – des Services d’Information (DSI) à l’échelle d’un GHT. C’est désormais un poste que j’occupe depuis 2019 au sein du GHT des Hôpitaux Publics Euréliens (HOPE).
Justement, quelles sont ici vos missions ?
Comme tout DSI de GHT, je suis pour l’essentiel chargée d’organiser la convergence applicative au sein du groupement, ainsi que la mutualisation des équipes des services informatiques historiques des établissements le composant. Cela étant dit, bien qu’elle soit exigée sur le plan réglementaire, cette mutualisation n’est pas encore finalisée partout, car elle impose des changements profonds. Elle nécessite donc un suivi attentif et l’engagement fort de tous. La convergence et la mutualisation représentent néanmoins deux briques fondamentales pour faciliter l'harmonisation des pratiques entre les professionnels des établissements membres d’un même groupement et le partage d’informations dans un contexte de prise en charge graduée des patients au sein du territoire. D’un point de vue global, elles représentent les premières étapes d’une réelle mutualisation des ressources à l’échelle d’un GHT. L’objectif in fine est d’offrir un service plus adapté aux utilisateurs médicaux et soignants en permettant notamment le développement de nouveaux usages plus innovants et facilitateurs dans la prise en charge des patients.
Comment faites-vous le lien entre les différents établissements du groupement ?
Je m'y déplace régulièrement, et le plus souvent possible. Cela n’est pas toujours évident mais il est à mon sens important d’y être présente physiquement. Chaque membre du groupement ayant conservé son propre système décisionnel, il peut être parfois complexe de participer à la gouvernance de tous les établissements parties. J’essaye cependant d’être le plus disponible possible pour un suivi régulier des dossiers et des usages, et pour maintenir le lien avec les équipes sur place.
Quels principaux freins rencontrez-vous dans votre exercice ?
Outre les quelques problématiques organisationnelles, comme évoquées plus haut, le principal enjeu auquel nous sommes confrontés est de pouvoir répondre à une demande très importante en termes de transformation et d’évolution du système existant, sans pour autant bénéficier d’une augmentation des effectifs. Les situations peuvent varier suivant les GHT, et des enveloppes d'investissement sont généralement fléchées pour accompagner la convergence informatique, mais cette transition se fait la plupart du temps à effectifs constants. De plus, les étapes intermédiaires – comme cela est le cas aujourd’hui – impliquent des surcoûts importants, car il faut financer les applications permettant de mettre la convergence en œuvre tout en continuant de maintenir les anciens applicatifs pour assurer la continuité de l’activité. Nous sommes donc actuellement dans une phase qui peut être compliquée pour les équipes des DSI.
Qu’en est-il de la mutualisation des équipes au sein du GHT HOPE ?
Elle n’est pas encore terminée car, comme je l’évoquais plus haut, elle est loin d’être simple ! Les équipes sont tiraillées entre le maintien en conditions opérationnelles des applications utilisées au sein de leur établissement, et la mise en œuvre de nouvelles solutions à l'échelle du groupement – un environnement qu’ils ne connaissent pas toujours et avec des utilisateurs qu'ils découvrent. Les différences et spécificités de chaque structure, la diversité des applications métiers et la multiplicité des usages sont aussi parfois difficiles à appréhender. Des informaticiens polyvalents, historiquement intégrés à de petits établissements doivent, par exemple, s’adapter à des sites plus gros, voire se spécialiser car les établissements support disposent généralement d’équipes structurées autour de plusieurs tâches, l’administration système et réseau, la hotline, la gestion des postes de travail… Ce ne sont pas les mêmes métiers, ils requièrent des savoir-faire différents. Il faut donc, bien souvent, réussir à accompagner la gestion et l’évolution des carrières, et l’acquisition de nouvelles compétences. Or toute situation imposant de tels changements peut être compliquée, surtout lorsque la décision a été prise par une tierce personne. Nous essayons donc de limiter au maximum les contraintes, en évitant par exemple de déménager les postes.
Avez-vous déjà engagé les démarches liées au Ségur Numérique ?
Nous y réfléchissons déjà, mais nous n'avons pas encore clos le programme HOP’EN, qui devrait arriver à son terme à la fin de l’année. Nous nous engagerons ensuite sur les objectifs du Ségur numérique, et notamment le programme SUN-ES. À titre personnel, j’ai beaucoup d’espoirs vis-à-vis d’une stratégie nationale engageant tous les acteurs du système de santé dans une même direction – et en attends donc beaucoup. Mais le calendrier est parfois difficile. Nous menons tous les projets tambour battant : nous n'en avons pas encore terminé avec HOP’EN que nous sommes déjà en train de lancer le Ségur numérique, dont les vagues une et deux ont déjà été annoncées. Le tout, en menant en parallèle la convergence des systèmes d’information dans les GHT. Ce calendrier serré, couplé à des effectifs maintenus à niveau constant, a lui aussi un impact important sur la charge de travail de nos équipes et par conséquent leur qualité de vie au travail.
Un mot, pour finir, sur la manière dont vous traitez les questions relatives à la cybersécurité ?
Le GHT HOPE dispose d’un Responsable de la Sécurité des Systèmes d’information (RSSI), avec lequel nous travaillons en étroite collaboration. Lui et moi partageons d'ailleurs le même bureau, et nos missions respectives bénéficient de cette synergie. Nous mettons à profit ses compétences pour mieux avancer sur nos objectifs, et tirons parti du regard « qualité » qu’il porte sur nos actions pour améliorer la structuration et la formalisation de nos démarches – et nous poser les bonnes questions, en prenant du recul sur nos pratiques et sur celles des autres. Par ce biais, le RSSI œuvre naturellement pour l’harmonisation des pratiques à l’échelle de notre groupement. Comme le DSI, il joue donc un rôle majeur dans cette stratégie de convergence, qui elle-même représente un élément central pour notre activité depuis maintenant plusieurs années.
Article publié dans l'édition de décembre 2022 d'Hospitalia à lire ici.
Céline Gachot : Ingénieure de formation, je suis diplômée de l’Institut National des Sciences Appliquées de Rennes et ai travaillé pendant plusieurs années en société de services, dans le suivi de projets de recherche. Après cette expérience formatrice, j’ai souhaité me tourner davantage vers les usages et les usagers. Dès 2003, j’ai donc intégré le milieu hospitalier en tant que responsable informatique du Centre Hospitalier de Lannion, dans les Côtes-d’Armor. Marquées, entre autres, par une collaboration constante avec les autres établissements de la Communauté Hospitalière de Territoire (CHT) puis du Groupement Hospitalier de Territoire (GHT) d’Armor, ces années ont notamment mis en lumière le rôle structurant de la Direction – et du directeur – des Services d’Information (DSI) à l’échelle d’un GHT. C’est désormais un poste que j’occupe depuis 2019 au sein du GHT des Hôpitaux Publics Euréliens (HOPE).
Justement, quelles sont ici vos missions ?
Comme tout DSI de GHT, je suis pour l’essentiel chargée d’organiser la convergence applicative au sein du groupement, ainsi que la mutualisation des équipes des services informatiques historiques des établissements le composant. Cela étant dit, bien qu’elle soit exigée sur le plan réglementaire, cette mutualisation n’est pas encore finalisée partout, car elle impose des changements profonds. Elle nécessite donc un suivi attentif et l’engagement fort de tous. La convergence et la mutualisation représentent néanmoins deux briques fondamentales pour faciliter l'harmonisation des pratiques entre les professionnels des établissements membres d’un même groupement et le partage d’informations dans un contexte de prise en charge graduée des patients au sein du territoire. D’un point de vue global, elles représentent les premières étapes d’une réelle mutualisation des ressources à l’échelle d’un GHT. L’objectif in fine est d’offrir un service plus adapté aux utilisateurs médicaux et soignants en permettant notamment le développement de nouveaux usages plus innovants et facilitateurs dans la prise en charge des patients.
Comment faites-vous le lien entre les différents établissements du groupement ?
Je m'y déplace régulièrement, et le plus souvent possible. Cela n’est pas toujours évident mais il est à mon sens important d’y être présente physiquement. Chaque membre du groupement ayant conservé son propre système décisionnel, il peut être parfois complexe de participer à la gouvernance de tous les établissements parties. J’essaye cependant d’être le plus disponible possible pour un suivi régulier des dossiers et des usages, et pour maintenir le lien avec les équipes sur place.
Quels principaux freins rencontrez-vous dans votre exercice ?
Outre les quelques problématiques organisationnelles, comme évoquées plus haut, le principal enjeu auquel nous sommes confrontés est de pouvoir répondre à une demande très importante en termes de transformation et d’évolution du système existant, sans pour autant bénéficier d’une augmentation des effectifs. Les situations peuvent varier suivant les GHT, et des enveloppes d'investissement sont généralement fléchées pour accompagner la convergence informatique, mais cette transition se fait la plupart du temps à effectifs constants. De plus, les étapes intermédiaires – comme cela est le cas aujourd’hui – impliquent des surcoûts importants, car il faut financer les applications permettant de mettre la convergence en œuvre tout en continuant de maintenir les anciens applicatifs pour assurer la continuité de l’activité. Nous sommes donc actuellement dans une phase qui peut être compliquée pour les équipes des DSI.
Qu’en est-il de la mutualisation des équipes au sein du GHT HOPE ?
Elle n’est pas encore terminée car, comme je l’évoquais plus haut, elle est loin d’être simple ! Les équipes sont tiraillées entre le maintien en conditions opérationnelles des applications utilisées au sein de leur établissement, et la mise en œuvre de nouvelles solutions à l'échelle du groupement – un environnement qu’ils ne connaissent pas toujours et avec des utilisateurs qu'ils découvrent. Les différences et spécificités de chaque structure, la diversité des applications métiers et la multiplicité des usages sont aussi parfois difficiles à appréhender. Des informaticiens polyvalents, historiquement intégrés à de petits établissements doivent, par exemple, s’adapter à des sites plus gros, voire se spécialiser car les établissements support disposent généralement d’équipes structurées autour de plusieurs tâches, l’administration système et réseau, la hotline, la gestion des postes de travail… Ce ne sont pas les mêmes métiers, ils requièrent des savoir-faire différents. Il faut donc, bien souvent, réussir à accompagner la gestion et l’évolution des carrières, et l’acquisition de nouvelles compétences. Or toute situation imposant de tels changements peut être compliquée, surtout lorsque la décision a été prise par une tierce personne. Nous essayons donc de limiter au maximum les contraintes, en évitant par exemple de déménager les postes.
Avez-vous déjà engagé les démarches liées au Ségur Numérique ?
Nous y réfléchissons déjà, mais nous n'avons pas encore clos le programme HOP’EN, qui devrait arriver à son terme à la fin de l’année. Nous nous engagerons ensuite sur les objectifs du Ségur numérique, et notamment le programme SUN-ES. À titre personnel, j’ai beaucoup d’espoirs vis-à-vis d’une stratégie nationale engageant tous les acteurs du système de santé dans une même direction – et en attends donc beaucoup. Mais le calendrier est parfois difficile. Nous menons tous les projets tambour battant : nous n'en avons pas encore terminé avec HOP’EN que nous sommes déjà en train de lancer le Ségur numérique, dont les vagues une et deux ont déjà été annoncées. Le tout, en menant en parallèle la convergence des systèmes d’information dans les GHT. Ce calendrier serré, couplé à des effectifs maintenus à niveau constant, a lui aussi un impact important sur la charge de travail de nos équipes et par conséquent leur qualité de vie au travail.
Un mot, pour finir, sur la manière dont vous traitez les questions relatives à la cybersécurité ?
Le GHT HOPE dispose d’un Responsable de la Sécurité des Systèmes d’information (RSSI), avec lequel nous travaillons en étroite collaboration. Lui et moi partageons d'ailleurs le même bureau, et nos missions respectives bénéficient de cette synergie. Nous mettons à profit ses compétences pour mieux avancer sur nos objectifs, et tirons parti du regard « qualité » qu’il porte sur nos actions pour améliorer la structuration et la formalisation de nos démarches – et nous poser les bonnes questions, en prenant du recul sur nos pratiques et sur celles des autres. Par ce biais, le RSSI œuvre naturellement pour l’harmonisation des pratiques à l’échelle de notre groupement. Comme le DSI, il joue donc un rôle majeur dans cette stratégie de convergence, qui elle-même représente un élément central pour notre activité depuis maintenant plusieurs années.
Article publié dans l'édition de décembre 2022 d'Hospitalia à lire ici.