Sylvain Zercher, président de l’UDIHR
Comment le secteur de la restauration hospitalière s’est-il approprié le concept de développement durable ?
Sylvain Zercher :
La préservation de l’environnement, et plus largement la question du développement durable, sont clairement entrées dans les mœurs, avec une prise de conscience collective de la nécessité de s’inscrire dans des démarches responsables. Dans la pratique, trois grands axes d’amélioration ont émergé ces dernières années. Le premier concerne les politiques d’achat des matières premières avec une hausse des approvisionnements en circuits courts. Le deuxième est plus sociétal et repose sur la volonté de s’ancrer dans un tissu économique local, notamment par le biais de collaborations avec des ESAT. Enfin, de nombreuses actions ont été menées dans le but de réduire le gaspillage alimentaire.
La lutte contre le gaspillage fait justement partie des chevaux de bataille de l’UDIHR. Quelles sont les avancées concrètes dans ce domaine ?
Notre réflexion s’est d’abord tournée vers la nécessité de mettre plus en adéquation les quantités produites avec les profils des populations accueillies au sein de nos établissements. Cela s’est traduit par la mise en œuvre d’approches différenciées suivant les services. En MCO par exemple, nous avons cherché à affiner notre production en fonction des prévisionnels. Concernant le long séjour, les efforts se sont plutôt portés sur la réévaluation du grammage. Ainsi, pour les services de gériatrie, nous avons désormais tendance à nous aligner sur les préconisations basses du GEM-RCN, alors qu’auparavant les quantités servies étaient les mêmes qu’en MCO. Enfin, pour les convives du self, nous avons misé sur la pédagogie, en servant des parts moins importantes mais avec possibilité de se resservir. Un travail important a également été effectué sur la gestion du pain et sur l’hérésie que représente le fait d’en servir – ou d’en prendre – systématiquement.
De nombreux établissements se sont également lancés dans le don alimentaire.
Effectivement, puisque nous savons que le zéro déchet est une utopie dans notre secteur, certains collègues se sont tournés vers le don pour revaloriser leurs surplus. Le premier à s’être lancé dans l’aventure est le CH du Mans avec l’ouverture d’un restaurant solidaire en 2013. Depuis, l’AP-HP, Strasbourg ou encore Bordeaux ont sauté le pas. La restauration hospitalière fait figure de précurseur dans le domaine, nous avons même servi d’exemple lors des États Généraux de la restauration. Néanmoins, la mise en place d’une politique de don représente un travail de longue haleine, avec comme principale difficulté, la recherche de partenaires associatifs en mesure de récupérer, conserver et assurer la distribution des denrées.
Vous évoquiez également l’évolution des politiques d’approvisionnement et le développement des circuits-courts. Peut-on en dire de même de la filière biologique ?
Le choix des fournisseurs se fait de plus en plus sur des critères tels que le nombre d’intermédiaires, la distance et l’origine des produits. Il faut dire que nos publics expriment une sensibilité croissante face à ces enjeux, ce qui nous incite à en faire autant. En revanche, l’emploi de produits issus de l’agriculture biologique ou de labels de qualité reste impossible à généraliser, en raison des surcoûts que cela implique. Pour développer la filière, il faudrait par exemple que les économies réalisées grâce à la baisse du gaspillage alimentaire soient utilisées pour nos approvisionnements. Dans la pratique, les budgets récupérés ont plutôt tendance à être réinvestis dans d’autres services. En la matière, il faudrait un véritable changement de mentalité !
La revalorisation des biodéchets est devenue une obligation légale suite au Grenelle II pour l’environnement. Comment se sont organisés les établissements ?
Les centres hospitaliers avaient jusqu’à 2016 pour mettre en place leurs filières de récupération selon leurs tonnages annuels produits. Cela a consisté, en un premier lieu, à évaluer le travail que représenterait le tri et la collecte de ces biodéchets, les équipements à se procurer, ou identifier les prestataires éventuels, sachant qu’il existe des disparités régionales dans l’accès à des sites de méthanisation. À l’heure actuelle, différents modes d’organisation coexistent que ce soit en autonomie ou par le biais de prestataires. Au final, la principale difficulté rencontrée par les établissements demeure la question de la récupération des déchets au niveau des services de soins.
Avez-vous des conseils en la matière ?
La réussite d’un projet de ce type dépend grandement de l’engage- ment des personnels dans les services, en raison de l’impact qu’il peut avoir sur la charge de travail et sur les organisations. Il me sem- ble donc essentiel de les impliquer dès sa conception et de travailler conjointement sur les différentes alternatives possibles, qu’il soit question de tri direct ou de retour en cuisine. L’avantage, c’est que les jeunes générations sont de plus en plus sensibles et formées à ces enjeux. Elles acceptent donc plus facilement de jouer le jeu.
Toujours en termes de préservation de l’environnement, quels sont les autres axes de réflexion sur lesquels travaille actuellement l’UDIHR ?
Nous nous intéressons notamment à la question des économies d’énergie et plus particulièrement aux pratiques professionnelles en vue de réduire les consommations en eau. Notre secteur utilise beaucoup d’eau, que ce soit lors du nettoyage ou au travers des systèmes de refroidissement, il est donc essentiel de réfléchir aux alternatives possibles, notamment lors du renouvellement de nos équipements. Un autre de nos chantiers concerne la fin de l’usage unique. Si les hôpitaux n’ont pas encore l’obligation légale de s’y conformer, nous travaillons déjà avec différents fournisseurs sur la question du remplacement des barquettes en plastique. Des modèles biodégradables, en pulpe végétale, sont ainsi en cours de mise au point. Cependant, il reste encore compliqué de trouver le revêtement idéal pour en assurer l’étanchéité. Certains de nos confrères pensent à repasser à l’inox, mais là encore des questions se posent, tant sur les impacts concernant les temps de lavage et le travail des agents que sur la problématique de migration des métaux.
Sylvain Zercher :
La préservation de l’environnement, et plus largement la question du développement durable, sont clairement entrées dans les mœurs, avec une prise de conscience collective de la nécessité de s’inscrire dans des démarches responsables. Dans la pratique, trois grands axes d’amélioration ont émergé ces dernières années. Le premier concerne les politiques d’achat des matières premières avec une hausse des approvisionnements en circuits courts. Le deuxième est plus sociétal et repose sur la volonté de s’ancrer dans un tissu économique local, notamment par le biais de collaborations avec des ESAT. Enfin, de nombreuses actions ont été menées dans le but de réduire le gaspillage alimentaire.
La lutte contre le gaspillage fait justement partie des chevaux de bataille de l’UDIHR. Quelles sont les avancées concrètes dans ce domaine ?
Notre réflexion s’est d’abord tournée vers la nécessité de mettre plus en adéquation les quantités produites avec les profils des populations accueillies au sein de nos établissements. Cela s’est traduit par la mise en œuvre d’approches différenciées suivant les services. En MCO par exemple, nous avons cherché à affiner notre production en fonction des prévisionnels. Concernant le long séjour, les efforts se sont plutôt portés sur la réévaluation du grammage. Ainsi, pour les services de gériatrie, nous avons désormais tendance à nous aligner sur les préconisations basses du GEM-RCN, alors qu’auparavant les quantités servies étaient les mêmes qu’en MCO. Enfin, pour les convives du self, nous avons misé sur la pédagogie, en servant des parts moins importantes mais avec possibilité de se resservir. Un travail important a également été effectué sur la gestion du pain et sur l’hérésie que représente le fait d’en servir – ou d’en prendre – systématiquement.
De nombreux établissements se sont également lancés dans le don alimentaire.
Effectivement, puisque nous savons que le zéro déchet est une utopie dans notre secteur, certains collègues se sont tournés vers le don pour revaloriser leurs surplus. Le premier à s’être lancé dans l’aventure est le CH du Mans avec l’ouverture d’un restaurant solidaire en 2013. Depuis, l’AP-HP, Strasbourg ou encore Bordeaux ont sauté le pas. La restauration hospitalière fait figure de précurseur dans le domaine, nous avons même servi d’exemple lors des États Généraux de la restauration. Néanmoins, la mise en place d’une politique de don représente un travail de longue haleine, avec comme principale difficulté, la recherche de partenaires associatifs en mesure de récupérer, conserver et assurer la distribution des denrées.
Vous évoquiez également l’évolution des politiques d’approvisionnement et le développement des circuits-courts. Peut-on en dire de même de la filière biologique ?
Le choix des fournisseurs se fait de plus en plus sur des critères tels que le nombre d’intermédiaires, la distance et l’origine des produits. Il faut dire que nos publics expriment une sensibilité croissante face à ces enjeux, ce qui nous incite à en faire autant. En revanche, l’emploi de produits issus de l’agriculture biologique ou de labels de qualité reste impossible à généraliser, en raison des surcoûts que cela implique. Pour développer la filière, il faudrait par exemple que les économies réalisées grâce à la baisse du gaspillage alimentaire soient utilisées pour nos approvisionnements. Dans la pratique, les budgets récupérés ont plutôt tendance à être réinvestis dans d’autres services. En la matière, il faudrait un véritable changement de mentalité !
La revalorisation des biodéchets est devenue une obligation légale suite au Grenelle II pour l’environnement. Comment se sont organisés les établissements ?
Les centres hospitaliers avaient jusqu’à 2016 pour mettre en place leurs filières de récupération selon leurs tonnages annuels produits. Cela a consisté, en un premier lieu, à évaluer le travail que représenterait le tri et la collecte de ces biodéchets, les équipements à se procurer, ou identifier les prestataires éventuels, sachant qu’il existe des disparités régionales dans l’accès à des sites de méthanisation. À l’heure actuelle, différents modes d’organisation coexistent que ce soit en autonomie ou par le biais de prestataires. Au final, la principale difficulté rencontrée par les établissements demeure la question de la récupération des déchets au niveau des services de soins.
Avez-vous des conseils en la matière ?
La réussite d’un projet de ce type dépend grandement de l’engage- ment des personnels dans les services, en raison de l’impact qu’il peut avoir sur la charge de travail et sur les organisations. Il me sem- ble donc essentiel de les impliquer dès sa conception et de travailler conjointement sur les différentes alternatives possibles, qu’il soit question de tri direct ou de retour en cuisine. L’avantage, c’est que les jeunes générations sont de plus en plus sensibles et formées à ces enjeux. Elles acceptent donc plus facilement de jouer le jeu.
Toujours en termes de préservation de l’environnement, quels sont les autres axes de réflexion sur lesquels travaille actuellement l’UDIHR ?
Nous nous intéressons notamment à la question des économies d’énergie et plus particulièrement aux pratiques professionnelles en vue de réduire les consommations en eau. Notre secteur utilise beaucoup d’eau, que ce soit lors du nettoyage ou au travers des systèmes de refroidissement, il est donc essentiel de réfléchir aux alternatives possibles, notamment lors du renouvellement de nos équipements. Un autre de nos chantiers concerne la fin de l’usage unique. Si les hôpitaux n’ont pas encore l’obligation légale de s’y conformer, nous travaillons déjà avec différents fournisseurs sur la question du remplacement des barquettes en plastique. Des modèles biodégradables, en pulpe végétale, sont ainsi en cours de mise au point. Cependant, il reste encore compliqué de trouver le revêtement idéal pour en assurer l’étanchéité. Certains de nos confrères pensent à repasser à l’inox, mais là encore des questions se posent, tant sur les impacts concernant les temps de lavage et le travail des agents que sur la problématique de migration des métaux.