En 2012, l’inauguration de la Cité sanitaire s’était accompagnée de grands changements organisationnels dans la fonction logistique. Pourriez-vous nous en parler ?
Antoine Wallaert : Le mot d’ordre était alors de repenser l’organisation des flux pour libérer du temps soignant. Dès 2008, des réflexions avaient été menées en ce sens avec les professionnels de santé, ce qui s’était déjà traduit par de premières évolutions. Quatre années de travaux ont toutefois été nécessaires pour entièrement revoir l’organisation de la logistique. L’une des actions principales avait été de créer une réelle supply chain en regroupant, sous une direction commune, des services qui étaient jusque-là dissociés : les achats, la manutention et le transport, et le magasin – ce qui permettait de centraliser la chaîne d'approvisionnement du volet hôtelier. Les approvisionnements biomédicaux, informatiques et pharmaceutiques sont pour leur part toujours gérés par des services dédiés.
Avez-vous, à cette occasion, revu la typologie des produits pris en charge par cette nouvelle direction ?
Antoine Wallaert : Bien sûr. Nous avons repris plusieurs tâches concernant le volet hôtelier, avec toujours cette volonté de libérer du temps soignant. Depuis 2012, le département Blanchisserie, Achats, Logistique est ainsi en charge de l’épicerie sèche, des fournitures et des consommables hôteliers (essuie-tout, changes…), des produits d’entretien et des cartouches d’encre, mais aussi, par exemple, de l’acheminement et de la récupération du linge, des déchets et des archives.
Toujours en 2012, vous avez également installé un système de Transport automatique lourd (TAL)…
Antoine Wallaert : Ce système avait été intégré au projet avant même la construction de la Cité sanitaire, dont le bail emphytéotique évoque d’ailleurs l’installation de flux de type TAL. Onze robots, surnommés « tortues », sont ainsi aujourd’hui chargés d’effectuer les transports au sein des bâtiments : ils déplacent actuellement plus de 600 charges par jour, et sont opérationnels de 6h30 à 19h30. Complètement autonomes, ils sont contrôlés à distance par un superviseur, qui peut intervenir en cas de problème. Une douzaine d’interventions, dont la durée est le plus souvent comprise entre 5 et 10 minutes, sont d’ailleurs quotidiennement nécessaires pour régler des incidents mineurs. Il peut par exemple s’agir d’un objet quelconque laissé sur le sol – comme un balai –, et qui empêche la « tortue » de passer. Le rôle du superviseur est donc essentiel, car il est garant du bon fonctionnement du système.
Cette automatisation a-t-elle engendré une baisse des effectifs logistiques ?
Antoine Wallaert : Non, bien au contraire. Alors qu’il n’y avait que dix manutentionnaires en 2012, le site de la Cité sanitaire en compte aujourd’hui seize. Cela s’explique en grande partie par l’élargissement de nos missions et par l'architecture des bâtiments, qui augmente la durée des déplacements. Néanmoins, c’est un réel gain pour l’hôpital puisque les services de soins estiment que l’équivalent de dix postes a pu être redirigé vers les soins, les soignants n’étant plus amenés à effectuer eux-mêmes les tâches logistiques.
Après plus de dix ans d’utilisation, est-il prévu de changer les « tortues » ?
Jordan Plévert : Une maintenance est effectuée régulièrement. Les batteries sont par exemple remplacées tous les deux ans. La question du changement de ces robots pourrait se poser à partir de 2026, mais si les automates fonctionnent toujours, nous pourrions repousser cette échéance. Quoi qu’il en soit, le système restera en place, mais des changements ciblés pourraient être apportés, pour renouveler le parc de robots – qui garderont toutefois la même apparence – ou améliorer la performance de l’ensemble.
Quels sont vos projets pour les mois et années à venir ?
Antoine Wallaert : L’objectif étant de couvrir 100 % des flux avec les tortues, nous sommes donc aujourd’hui à la recherche des flux résiduels. Par exemple, les automates seront bientôt en charge du courrier, qu’ils transporteront sur les grandes distances avant de passer le relais aux agents de la Fonction logistique d’étage (FLE) pour la livraison du dernier mètre dans les services. Elle aussi mise aussi en place en 2012, la FLE est une composante organisationnelle stratégique, dont les actions viennent compléter celles des tortues tout en nous offrant une meilleure visibilité sur les approvisionnements.
Ces aménagements, vous l’avez évoqué, ont été mis en place sur le site principal du CH de Saint-Nazaire. Qu’en est-il du site d’Heinlex ?
Antoine Wallaert : Regroupant actuellement les unités de psychiatrie et de soins de longue durée, ainsi qu’un EHPAD, le parc d’Heinlex est prochainement appelé à accueillir de nouveaux services. Nous souhaitons donc nous saisir de l’occasion pour revoir également la fonction logistique. Le site a toutefois des spécificités qui lui sont propres. Il est par exemple composé de plusieurs bâtiments implantés au cœur d’un parc. Cette architecture pavillonnaire ne permet pas d’y installer des tortues, mais nous pouvons repenser certaines organisations et adapter des actions mises en œuvre au sein de la Cité sanitaire pour, une fois de plus, libérer du temps soignant. Il s’agit d’ailleurs d’une demande de la part des professionnels de santé exerçant sur le site d’Heinlex, qui nous ont sollicités à ce sujet.
Sur ce type de projets transversaux, comment assurez-vous le lien avec les professionnels de santé ?
Antoine Wallaert : Nous ne devons pas oublier que la raison d’être de la logistique hospitalière, c’est d’assurer une gestion optimale des flux au bénéfice des activités de soin. Nous sommes là en support des soignants, il est donc normal de les intégrer à nos réflexions et de les associer à nos différents groupes de travail. C’était le cas lorsque nous avions mis les organisations à plat en 2012, et cela l’est toujours aujourd’hui, dans le cadre de travaux thématiques ou d’expérimentations. Et la démarche paie : en 2022, nous avions diffusé un questionnaire d'évaluation sur la qualité des prestations logistiques, obtenant de très bons retours ! Seuls 10 % des items appelaient des améliorations. Nous avons gagné la confiance des services de soins, qui perçoivent désormais clairement le département logistique comme un partenaire fiable. Pour preuve, nous sommes davantage sollicités pour apporter notre avis dans des cas particuliers, comme un déménagement.
> Article paru dans Hospitalia #66, édition de septembre 2024, à lire ici
Antoine Wallaert : Le mot d’ordre était alors de repenser l’organisation des flux pour libérer du temps soignant. Dès 2008, des réflexions avaient été menées en ce sens avec les professionnels de santé, ce qui s’était déjà traduit par de premières évolutions. Quatre années de travaux ont toutefois été nécessaires pour entièrement revoir l’organisation de la logistique. L’une des actions principales avait été de créer une réelle supply chain en regroupant, sous une direction commune, des services qui étaient jusque-là dissociés : les achats, la manutention et le transport, et le magasin – ce qui permettait de centraliser la chaîne d'approvisionnement du volet hôtelier. Les approvisionnements biomédicaux, informatiques et pharmaceutiques sont pour leur part toujours gérés par des services dédiés.
Avez-vous, à cette occasion, revu la typologie des produits pris en charge par cette nouvelle direction ?
Antoine Wallaert : Bien sûr. Nous avons repris plusieurs tâches concernant le volet hôtelier, avec toujours cette volonté de libérer du temps soignant. Depuis 2012, le département Blanchisserie, Achats, Logistique est ainsi en charge de l’épicerie sèche, des fournitures et des consommables hôteliers (essuie-tout, changes…), des produits d’entretien et des cartouches d’encre, mais aussi, par exemple, de l’acheminement et de la récupération du linge, des déchets et des archives.
Toujours en 2012, vous avez également installé un système de Transport automatique lourd (TAL)…
Antoine Wallaert : Ce système avait été intégré au projet avant même la construction de la Cité sanitaire, dont le bail emphytéotique évoque d’ailleurs l’installation de flux de type TAL. Onze robots, surnommés « tortues », sont ainsi aujourd’hui chargés d’effectuer les transports au sein des bâtiments : ils déplacent actuellement plus de 600 charges par jour, et sont opérationnels de 6h30 à 19h30. Complètement autonomes, ils sont contrôlés à distance par un superviseur, qui peut intervenir en cas de problème. Une douzaine d’interventions, dont la durée est le plus souvent comprise entre 5 et 10 minutes, sont d’ailleurs quotidiennement nécessaires pour régler des incidents mineurs. Il peut par exemple s’agir d’un objet quelconque laissé sur le sol – comme un balai –, et qui empêche la « tortue » de passer. Le rôle du superviseur est donc essentiel, car il est garant du bon fonctionnement du système.
Cette automatisation a-t-elle engendré une baisse des effectifs logistiques ?
Antoine Wallaert : Non, bien au contraire. Alors qu’il n’y avait que dix manutentionnaires en 2012, le site de la Cité sanitaire en compte aujourd’hui seize. Cela s’explique en grande partie par l’élargissement de nos missions et par l'architecture des bâtiments, qui augmente la durée des déplacements. Néanmoins, c’est un réel gain pour l’hôpital puisque les services de soins estiment que l’équivalent de dix postes a pu être redirigé vers les soins, les soignants n’étant plus amenés à effectuer eux-mêmes les tâches logistiques.
Après plus de dix ans d’utilisation, est-il prévu de changer les « tortues » ?
Jordan Plévert : Une maintenance est effectuée régulièrement. Les batteries sont par exemple remplacées tous les deux ans. La question du changement de ces robots pourrait se poser à partir de 2026, mais si les automates fonctionnent toujours, nous pourrions repousser cette échéance. Quoi qu’il en soit, le système restera en place, mais des changements ciblés pourraient être apportés, pour renouveler le parc de robots – qui garderont toutefois la même apparence – ou améliorer la performance de l’ensemble.
Quels sont vos projets pour les mois et années à venir ?
Antoine Wallaert : L’objectif étant de couvrir 100 % des flux avec les tortues, nous sommes donc aujourd’hui à la recherche des flux résiduels. Par exemple, les automates seront bientôt en charge du courrier, qu’ils transporteront sur les grandes distances avant de passer le relais aux agents de la Fonction logistique d’étage (FLE) pour la livraison du dernier mètre dans les services. Elle aussi mise aussi en place en 2012, la FLE est une composante organisationnelle stratégique, dont les actions viennent compléter celles des tortues tout en nous offrant une meilleure visibilité sur les approvisionnements.
Ces aménagements, vous l’avez évoqué, ont été mis en place sur le site principal du CH de Saint-Nazaire. Qu’en est-il du site d’Heinlex ?
Antoine Wallaert : Regroupant actuellement les unités de psychiatrie et de soins de longue durée, ainsi qu’un EHPAD, le parc d’Heinlex est prochainement appelé à accueillir de nouveaux services. Nous souhaitons donc nous saisir de l’occasion pour revoir également la fonction logistique. Le site a toutefois des spécificités qui lui sont propres. Il est par exemple composé de plusieurs bâtiments implantés au cœur d’un parc. Cette architecture pavillonnaire ne permet pas d’y installer des tortues, mais nous pouvons repenser certaines organisations et adapter des actions mises en œuvre au sein de la Cité sanitaire pour, une fois de plus, libérer du temps soignant. Il s’agit d’ailleurs d’une demande de la part des professionnels de santé exerçant sur le site d’Heinlex, qui nous ont sollicités à ce sujet.
Sur ce type de projets transversaux, comment assurez-vous le lien avec les professionnels de santé ?
Antoine Wallaert : Nous ne devons pas oublier que la raison d’être de la logistique hospitalière, c’est d’assurer une gestion optimale des flux au bénéfice des activités de soin. Nous sommes là en support des soignants, il est donc normal de les intégrer à nos réflexions et de les associer à nos différents groupes de travail. C’était le cas lorsque nous avions mis les organisations à plat en 2012, et cela l’est toujours aujourd’hui, dans le cadre de travaux thématiques ou d’expérimentations. Et la démarche paie : en 2022, nous avions diffusé un questionnaire d'évaluation sur la qualité des prestations logistiques, obtenant de très bons retours ! Seuls 10 % des items appelaient des améliorations. Nous avons gagné la confiance des services de soins, qui perçoivent désormais clairement le département logistique comme un partenaire fiable. Pour preuve, nous sommes davantage sollicités pour apporter notre avis dans des cas particuliers, comme un déménagement.
> Article paru dans Hospitalia #66, édition de septembre 2024, à lire ici
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