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EDGAR, un ambitieux projet collaboratif pour les ESPIC


Rédigé par Joëlle Hayek le Mercredi 9 Octobre 2024 à 10:51 | Lu 478 fois


Lauréat de l’appel à projets France 2030 relatif à la constitution d’entrepôts de données de santé hospitaliers, le projet EDGAR entend fédérer les entrepôts de données de santé locaux des membres de l’association RESPIC, un réseau dédié à la recherche rassemblant dix établissements de santé privés d’intérêt collectif*. Nous découvrons cette initiative avec Julie Boissier, déléguée RESPIC, et Pauline Touche, responsable du projet EGDAR.



Pourriez-vous, pour commencer, nous présenter RESPIC ?

Julie Boissier : Créée en 2019, cette association-loi 1901 concrétise la collaboration d’Établissements de santé privés d'intérêt collectif (ESPIC) investis depuis toujours dans la recherche clinique, et qui ont ainsi souhaité réunir leurs forces et leurs moyens pour exploiter au mieux leur potentiel et continuer de participer au développement de la recherche en France. RESPIC, pour la « Recherche en ESPIC », porte à cet égard plusieurs ambitions pour faciliter l’accès des patients à l’innovation diagnostique et thérapeutique. Le projet EDGAR, acronyme signifiant « Entrepôts de Données de santé Groupés de l’Association RESPIC », est aujourd’hui notre réalisation la plus visible, s’imposant comme l’action phare de l’année 2024.

Justement, dans quel contexte EDGAR a-t-il vu le jour ?

Julie Boissier : RESPIC était déjà engagé dans une réflexion stratégique autour des données de santé. D’ailleurs, l’enjeu d’une structuration des données pensée collectivement faisait, au-delà du RESPIC, partie des objectifs du partenariat signé avec Unicancer en 2021 pour favoriser la constitution d’entrepôts de données de santé (EDS) communicants.  Ainsi, le lancement de l’appel à projets visant à soutenir le développement d’EDS nous a semblé être l’opportunité idéale pour appuyer ces travaux et pouvoir ainsi asseoir et structurer le projet EDGAR.

En quoi consiste plus concrètement celui-ci ?

Julie Boissier : Porté par un consortium coordonné par l’Hôpital Foch, EDGAR ambitionne de fédérer, dans un premier temps, huit EDS locaux, qui utiliseront une solution commune et des modèles communs d’interopérabilité. Ces EDS comprendront les données de plus de 3,2 millions de patients pour 36 spécialités sur le périmètre national, ce qui permettra de générer des bases de données importantes afin de favoriser les recherches multicentriques, associant les membres du RESPIC ou d’autres établissements, et de faciliter le développement d’algorithmes robustes.

Pauline Touche : EDGAR comprendra également une plateforme s’appuyant sur ces EDS locaux et à partir de laquelle il sera possible de mettre en commun, de manière totalement sécurisée, des données pour réaliser des recherches multicentriques plus facilement et plus rapidement. EDGAR disposera enfin d’un guichet unique offrant un accès mutualisé, simplifié et accéléré aux partenaires académiques et industriels souhaitant collaborer avec les membres du consortium.

EDGAR, un ambitieux projet collaboratif pour les ESPIC
Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Pauline Touche : Nous travaillons, dans un premier temps, à la mise en place des EDS locaux dans les établissements qui n’en disposent pas encore. Il s’agit donc de constituer d’abord les « data lakes », grâce à la mise en place de connecteurs, c’est-à-dire de flux des données produites par les soins, puis de structurer ces données au format d’interopérabilité OMOP (Observational Medical Outcomes Partnership). Cette seconde phase nécessitera un peu de temps car il nous faut aussi, en parallèle, respecter un certain nombre de spécificités concernant la standardisation et l’interopérabilité des données du socle commun, dont le groupe de travail est coordonné par le Health Data Hub. Cela étant dit, nous pourrons répondre aux premières demandes de faisabilité dès que les « data lakes » seront finalisés. 

Comment la communauté médico-soignante et les patients accueillent-ils EDGAR ?

Julie Boissier : L’enthousiasme est palpable à chaque fois que le projet est présenté aux professionnels de santé : les attentes autour d’EDGAR sont bien réelles, à la fois pour la recherche médicale et paramédicale ! Quant à l’accueil du projet par les patients, ceux pris en charge dans un établissement disposant déjà d’un EDS opérationnel – je pense notamment à l’Hôpital Foch – sont déjà sensibilisés à ce sujet. Des campagnes d’information sont progressivement menées dans les autres établissements du consortium.

Pauline Touche : Nous pouvons nous appuyer ici sur les supports pédagogiques et les infographies déjà disponibles, ce qui est très appréciable. C’est d’ailleurs toute la force d’un tel projet collaboratif, puisque l’expérience des uns sert aux autres. Nous le constatons également au sein du groupe de travail des Délégués à la protection des données (DPO). À savoir aussi, nous comptons créer un portail de transparence unique dédié aux patients, sur le modèle du guichet d’entrée unique destiné aux partenaires, pour faciliter l’accès à l’information.

Quel conseil donneriez-vous aux établissements souhaitant constituer un EDS ?

Julie Boissier : Celui de privilégier les projets collaboratifs, car ils permettent des retours d’expérience très utiles. Et si cela n’est pas possible, de ne pas hésiter à solliciter ses pairs pour échanger sur les pratiques des uns et des autres, notamment auprès des lauréats de l’appel à projets France 2030. La constitution d’un EDS est un projet à la fois très ambitieux et très structurant ; elle a tout à gagner d’un partage des savoirs et des connaissances. Nous le constatons tous les jours : le fait d’être plusieurs a rapidement permis d’initier une dynamique vertueuse portée par l’intelligence collective.

Pauline Touche : Sur le plan technique, je recommanderais de ne pas s’en tenir à un format d’interopérabilité franco-français. Les établissements de santé sont aujourd’hui totalement libres de choisir le modèle de structuration des données ou le thesaurus qu’ils souhaitent, car rien n’est tranché à l’échelle nationale. Une veille technologique est donc essentielle pour prendre des décisions éclairées. Il existe bien sûr des passerelles pour changer de modèle, mais cela reste long et complexe. Nous nous étions posé de nombreuses questions avant d’opter pour OMOP-CDM, car celui-ci est le modèle majoritaire en Europe et dans le monde, mais le standard FHIR se développe fortement, et peut également être utilisé pour la structuration des flux de données. C’est pourquoi il ne faut pas, là aussi, hésiter à échanger avec ses pairs et ses partenaires.

(*) Les membres du consortium EDGAR sont l’Hôpital Foch (Suresnes), le Groupe Hospitalier Paris Saint-Joseph, l’Institut Mutualiste Montsouris (Paris), le Groupement des Hôpitaux de l’Institut Catholique de Lille, l’Hôpital Saint-Joseph (Marseille), l’Hôpital Européen Marseille, l’Hôpital Fondation Adolphe de Rothschild (Paris), et le Groupe Hospitalier Diaconnesses Croix Saint-Simon (Paris). Sont également membres de l’association RESPIC le Centre Hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc (Lille) et Groupe Hospitalier Mutualiste de Grenoble.

> Article paru dans Hospitalia #66, édition de septembre 2024, à lire ici 
 






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