L’édition 2023 est spéciale, dans le sens où elle combine les 63èmes Journées d’Études et de Formation IHF avec la 10ème Conférence Européenne de l’Ingénierie Hospitalière. Pourriez-vous nous en parler ?
Bruno Cazabat : Notre association a effectivement été choisie pour organiser cette conférence biennale, émanation du groupe régional Europe de la Fédération Internationale de l’Ingénierie Hospitalière (IFHE EU), et que nous avions déjà eu le plaisir d’accueillir en 2011. Les Ingénieurs Hospitaliers de France sont donc totalement mobilisés pour accueillir nos collègues européens dans les meilleures conditions et continuer ainsi de contribuer à la construction d’une ingénierie hospitalière européenne, d’autant que nous prenons également la présidence de IFHE EU pour les deux années à venir. En tout état de cause, notre congrès 2023 s’inscrira dans une dimension plus internationale que les éditions précédentes, afin de donner aux participants une vision plus élargie des expériences et des pratiques observées dans d’autres pays européens. Il faut dire que, bien que les sujets traités et les problématiques auxquelles notre profession fait face soient sensiblement les mêmes partout – décarbonation, sécurité, agilité, architecture, etc. –, les réponses apportées, les solutions et outils retenus, peuvent différer d’un pays à l’autre, ce qui ne manquera pas de nourrir et d’enrichir les échanges.
Pourriez-vous évoquer quelques temps forts ?
Je pense notamment aux deux sessions plénières du mercredi 14 juin, l’une dédiée à l’architecture hospitalière, l’autre au management de premier. En ce qui concerne la première, les participants auront l’occasion de découvrir un projet emblématique des tendances actuelles, celui de la construction de la Tour 7 sur le site du CHU de Liège, en Belgique, qui fait la part belle au développement durable. Nous nous concentrerons essentiellement sur la méthodologie retenue, même si celle-ci ne peut pas être appliquée telle quelle en France, où la règlementation n’est pas la même, ainsi que sur les technologies conceptuelles innovantes utilisées pour optimiser le projet dès sa phase de conception. Nous évoquerons également le projet du nouvel Hôpital Universitaire Saint-Ouen Grand Paris-Nord de l’AP-HP, qui met non seulement à l’honneur le bien-être de ses occupants – grâce, notamment, à l’omniprésence de la végétation –, mais se positionne déjà aussi comme un équipement à la pointe de la flexibilité et de l’évolutivité, à même d’absorber efficacement les évolutions technologiques constantes. Guidée par une exigence forte de résilience énergétique, sa conception se distingue en outre à bien des égards, avec des choix techniques innovants que nous mettrons en lumière.
Quid de la seconde plénière, relative au management de projet ?
Elle portera elle ainsi une double vision européenne et française, avec notamment un retour d’expérience de nos confrères italiens autour de l’impact de l’épidémie Covid sur la conception des établissements de santé – lesquels tendent vers plus de flexibilité et d’adaptabilité aux transformations de la médecine, tout en tenant compte de nouveaux enjeux, comme ceux liés aux maladies respiratoires. Nous accueillerons également un témoignage en provenance d’Allemagne autour de la gestion des lits 4.0, qui porte tout autant sur la disponibilité que sur l’intégrité technique et hygiénique de ce produit médical. Côté français, le CHU Amiens-Picardie présentera sa stratégique de performance énergétique, une problématique d’autant plus prégnante dans le contexte actuel.
Un enjeu auquel le Forum IHF, plus particulièrement consacré à la décarbonation, fera également référence…
Comme je l’évoquais plus haut, la décarbonation du secteur hospitalier représente désormais une tendance de fond, constatée dans l’ensemble des pays européens. Il s’agit à la fois d’une exigence de la part des équipes médico-soignantes et des usagers, de plus en plus sensibles aux enjeux de développement durable et en attente d’engagements forts en matière de RSE, que d’une demande de la part des pouvoirs publics. Le secteur tertiaire doit ainsi réduire ses émissions carbone de -40 % à l’horizon 2030, ce qui représente un objectif particulièrement ambitieux. Plusieurs chantiers sont possibles pour y parvenir : (1) les actions immédiates, à l’instar des écogestes, et celles relevant de l’ingénierie hospitalière, par exemple un meilleur réglage des équipements existants, (2) les investissements ciblés sur les économies d’énergies, comme le projet du CHU Amiens Picardie, et (3) la construction de nouveaux bâtiments intégrant cet enjeu dès leur conception, c’est-à-dire tenant compte des exigences de décarbonation dès leur programmation (localisation, orientation, etc.), en lien avec des choix techniques favorisant la performance énergétique (pompes à chaleur, éoliennes…).
Quelles sont les principales pistes qui se profilent pour l’Hôpital ?
Il y a in fine relativement peu de nouveaux projets architecturaux au sein des hôpitaux français : 80 % du patrimoine 2030 existe déjà, ou le sera à très court terme. Reste donc l’option 2, mais notre marge de manœuvre est limitée. Il est en effet difficile, sinon impossible, d’appliquer à l’Hôpital les solutions évidentes pour le reste du tertiaire ou du résidentiel, car il nous faut assurer la continuité de l’activité, ainsi que la sécurité et le confort des usagers – nous ne pouvons par exemple pas réduire les flux d’air des blocs opératoires. C’est pourquoi l’objectif défini par les pouvoirs publics pour 2030 me semble compliqué à atteindre… Tous ces sujets seront évoqués à travers les sessions plénières et le Forum IHF, mais aussi au cours des nombreux ateliers organisés le jeudi 15 et le vendredi 16 juin, lesquels proposeront également un tour d’horizon des principales problématiques et tendances constatées sur le terrain : bâtiments intelligents et digitalisation, conduite de projet et maîtrise d’ouvrage, etc. Nous attendons cette année entre 500 et 700 personnes, congressistes, visiteurs et exposants, ce qui est particulièrement prometteur !
Un mot peut-être sur les thématiques mobilisant aujourd’hui l’attention de l’association IHF ?
Je pense plus particulièrement à deux sujets, qui sont néanmoins étroitement liés. D’abord, et sans surprise, tout ce qui a trait au développement durable et aux économies d’énergie, des problématiques qui comme nous venons de le voir fédèrent de nombreuses attentes malgré la complexité inhérente aux spécificités de l’activité hospitalière. Les ingénieurs hospitaliers n’y sont pas moins engagés, en écho d’ailleurs à l’engagement des directions hospitalières. Mais, et c’est le second sujet, bien que la décarbonation représente un enjeu fort auquel plus aucun établissement de santé ne peut se soustraire – ne serait-ce que face au contexte économique actuel –, elle impose des opérations onéreuses pour améliorer la performance énergétique du patrimoine hospitalier existant. Or ces investissements ne relèvent pas du champ médical, qui reste le domaine privilégié dès lors que l’on évoque les budgets hospitaliers. En parallèle, des bâtiments plus efficaces sur le plan énergétique, et donc plus techniques, mobilisent aussi plus de moyens humains, alors même que les Hôpitaux peinent déjà à recruter des ingénieurs…
Pourquoi ?
Peu de personnes savent qu’il existe des ingénieurs à l’hôpital ! L’association IHF tente de remédier à ce problème de notoriété, mais il existe une autre difficulté, commune à tous les métiers et toutes les fonctions du secteur hospitalier public : une grille salariale qui n’a pas beaucoup évolué depuis le siècle dernier, alors que les compétences requises se sont développées et élargies. Cela dit, l’ingénierie hospitalière est un domaine passionnant, car elle couvre de très nombreux sujets. C’est une dimension qu’il nous faut mieux mettre en lumière pour attirer les jeunes générations. Car, comme nous venons de le voir, aussi louable et nécessaire soit-il, l’enjeu de la décarbonation ne peut être relevé sans moyens financiers et surtout humains à hauteur de cette ambition !
> Informations, inscriptions et programmé détaillé sur le site de l'événement
Bruno Cazabat : Notre association a effectivement été choisie pour organiser cette conférence biennale, émanation du groupe régional Europe de la Fédération Internationale de l’Ingénierie Hospitalière (IFHE EU), et que nous avions déjà eu le plaisir d’accueillir en 2011. Les Ingénieurs Hospitaliers de France sont donc totalement mobilisés pour accueillir nos collègues européens dans les meilleures conditions et continuer ainsi de contribuer à la construction d’une ingénierie hospitalière européenne, d’autant que nous prenons également la présidence de IFHE EU pour les deux années à venir. En tout état de cause, notre congrès 2023 s’inscrira dans une dimension plus internationale que les éditions précédentes, afin de donner aux participants une vision plus élargie des expériences et des pratiques observées dans d’autres pays européens. Il faut dire que, bien que les sujets traités et les problématiques auxquelles notre profession fait face soient sensiblement les mêmes partout – décarbonation, sécurité, agilité, architecture, etc. –, les réponses apportées, les solutions et outils retenus, peuvent différer d’un pays à l’autre, ce qui ne manquera pas de nourrir et d’enrichir les échanges.
Pourriez-vous évoquer quelques temps forts ?
Je pense notamment aux deux sessions plénières du mercredi 14 juin, l’une dédiée à l’architecture hospitalière, l’autre au management de premier. En ce qui concerne la première, les participants auront l’occasion de découvrir un projet emblématique des tendances actuelles, celui de la construction de la Tour 7 sur le site du CHU de Liège, en Belgique, qui fait la part belle au développement durable. Nous nous concentrerons essentiellement sur la méthodologie retenue, même si celle-ci ne peut pas être appliquée telle quelle en France, où la règlementation n’est pas la même, ainsi que sur les technologies conceptuelles innovantes utilisées pour optimiser le projet dès sa phase de conception. Nous évoquerons également le projet du nouvel Hôpital Universitaire Saint-Ouen Grand Paris-Nord de l’AP-HP, qui met non seulement à l’honneur le bien-être de ses occupants – grâce, notamment, à l’omniprésence de la végétation –, mais se positionne déjà aussi comme un équipement à la pointe de la flexibilité et de l’évolutivité, à même d’absorber efficacement les évolutions technologiques constantes. Guidée par une exigence forte de résilience énergétique, sa conception se distingue en outre à bien des égards, avec des choix techniques innovants que nous mettrons en lumière.
Quid de la seconde plénière, relative au management de projet ?
Elle portera elle ainsi une double vision européenne et française, avec notamment un retour d’expérience de nos confrères italiens autour de l’impact de l’épidémie Covid sur la conception des établissements de santé – lesquels tendent vers plus de flexibilité et d’adaptabilité aux transformations de la médecine, tout en tenant compte de nouveaux enjeux, comme ceux liés aux maladies respiratoires. Nous accueillerons également un témoignage en provenance d’Allemagne autour de la gestion des lits 4.0, qui porte tout autant sur la disponibilité que sur l’intégrité technique et hygiénique de ce produit médical. Côté français, le CHU Amiens-Picardie présentera sa stratégique de performance énergétique, une problématique d’autant plus prégnante dans le contexte actuel.
Un enjeu auquel le Forum IHF, plus particulièrement consacré à la décarbonation, fera également référence…
Comme je l’évoquais plus haut, la décarbonation du secteur hospitalier représente désormais une tendance de fond, constatée dans l’ensemble des pays européens. Il s’agit à la fois d’une exigence de la part des équipes médico-soignantes et des usagers, de plus en plus sensibles aux enjeux de développement durable et en attente d’engagements forts en matière de RSE, que d’une demande de la part des pouvoirs publics. Le secteur tertiaire doit ainsi réduire ses émissions carbone de -40 % à l’horizon 2030, ce qui représente un objectif particulièrement ambitieux. Plusieurs chantiers sont possibles pour y parvenir : (1) les actions immédiates, à l’instar des écogestes, et celles relevant de l’ingénierie hospitalière, par exemple un meilleur réglage des équipements existants, (2) les investissements ciblés sur les économies d’énergies, comme le projet du CHU Amiens Picardie, et (3) la construction de nouveaux bâtiments intégrant cet enjeu dès leur conception, c’est-à-dire tenant compte des exigences de décarbonation dès leur programmation (localisation, orientation, etc.), en lien avec des choix techniques favorisant la performance énergétique (pompes à chaleur, éoliennes…).
Quelles sont les principales pistes qui se profilent pour l’Hôpital ?
Il y a in fine relativement peu de nouveaux projets architecturaux au sein des hôpitaux français : 80 % du patrimoine 2030 existe déjà, ou le sera à très court terme. Reste donc l’option 2, mais notre marge de manœuvre est limitée. Il est en effet difficile, sinon impossible, d’appliquer à l’Hôpital les solutions évidentes pour le reste du tertiaire ou du résidentiel, car il nous faut assurer la continuité de l’activité, ainsi que la sécurité et le confort des usagers – nous ne pouvons par exemple pas réduire les flux d’air des blocs opératoires. C’est pourquoi l’objectif défini par les pouvoirs publics pour 2030 me semble compliqué à atteindre… Tous ces sujets seront évoqués à travers les sessions plénières et le Forum IHF, mais aussi au cours des nombreux ateliers organisés le jeudi 15 et le vendredi 16 juin, lesquels proposeront également un tour d’horizon des principales problématiques et tendances constatées sur le terrain : bâtiments intelligents et digitalisation, conduite de projet et maîtrise d’ouvrage, etc. Nous attendons cette année entre 500 et 700 personnes, congressistes, visiteurs et exposants, ce qui est particulièrement prometteur !
Un mot peut-être sur les thématiques mobilisant aujourd’hui l’attention de l’association IHF ?
Je pense plus particulièrement à deux sujets, qui sont néanmoins étroitement liés. D’abord, et sans surprise, tout ce qui a trait au développement durable et aux économies d’énergie, des problématiques qui comme nous venons de le voir fédèrent de nombreuses attentes malgré la complexité inhérente aux spécificités de l’activité hospitalière. Les ingénieurs hospitaliers n’y sont pas moins engagés, en écho d’ailleurs à l’engagement des directions hospitalières. Mais, et c’est le second sujet, bien que la décarbonation représente un enjeu fort auquel plus aucun établissement de santé ne peut se soustraire – ne serait-ce que face au contexte économique actuel –, elle impose des opérations onéreuses pour améliorer la performance énergétique du patrimoine hospitalier existant. Or ces investissements ne relèvent pas du champ médical, qui reste le domaine privilégié dès lors que l’on évoque les budgets hospitaliers. En parallèle, des bâtiments plus efficaces sur le plan énergétique, et donc plus techniques, mobilisent aussi plus de moyens humains, alors même que les Hôpitaux peinent déjà à recruter des ingénieurs…
Pourquoi ?
Peu de personnes savent qu’il existe des ingénieurs à l’hôpital ! L’association IHF tente de remédier à ce problème de notoriété, mais il existe une autre difficulté, commune à tous les métiers et toutes les fonctions du secteur hospitalier public : une grille salariale qui n’a pas beaucoup évolué depuis le siècle dernier, alors que les compétences requises se sont développées et élargies. Cela dit, l’ingénierie hospitalière est un domaine passionnant, car elle couvre de très nombreux sujets. C’est une dimension qu’il nous faut mieux mettre en lumière pour attirer les jeunes générations. Car, comme nous venons de le voir, aussi louable et nécessaire soit-il, l’enjeu de la décarbonation ne peut être relevé sans moyens financiers et surtout humains à hauteur de cette ambition !
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