Par l’ordonnance du 26 janvier 2017, la Haute Autorité de santé (HAS) a reçu la mission de transmettre au Parlement et au Gouvernement, chaque année, une analyse prospective du système de santé français en s’attardant sur un thème précis. Pour sa troisième édition, l’institution a choisi de s’intéresser à deux facteurs « susceptibles d’améliorer la santé de tous et de contribuer à réduire certaines inégalités » : le sexe et le genre. « De nombreux déterminants influent sur la qualité de la prise en charge de tous, le sexe et le genre en font partie, c’est pour cela qu’il est important d’y apposer un regard neuf », a indiqué le Pr Dominique Le Guludec, présidente de la HAS, lors d’une conférence de présentation du rapport.
« Il faut prendre la mesure du chemin à parcourir pour diminuer les stéréotypes », a ajouté Christian Saout, membre du Collège de la Haute Autorité de santé. S’intéressant aux différences biologiques, comportementales et sociales, le rapport met en lumière des pans plus ou moins visibles dans la différence de prise en charge entre les individus, que ce soit à cause de leur sexe ou de leur genre. Car les deux concepts sont « très différents », a ainsi rappelé Muriel Salle, maîtresse de conférences en histoire contemporaine à l’Université Lyon 1, spécialiste des questions de genre et enseignante, notamment, auprès d’étudiants en médecine.
« Il faut prendre la mesure du chemin à parcourir pour diminuer les stéréotypes », a ajouté Christian Saout, membre du Collège de la Haute Autorité de santé. S’intéressant aux différences biologiques, comportementales et sociales, le rapport met en lumière des pans plus ou moins visibles dans la différence de prise en charge entre les individus, que ce soit à cause de leur sexe ou de leur genre. Car les deux concepts sont « très différents », a ainsi rappelé Muriel Salle, maîtresse de conférences en histoire contemporaine à l’Université Lyon 1, spécialiste des questions de genre et enseignante, notamment, auprès d’étudiants en médecine.
La médecine, « historiquement androcentrée »
« Le sexe relève de la biologie et s’y réfère pour différencier les hommes et les femmes sur le champ de la reproduction », a indiqué la spécialiste en alertant ici sur les « ambiguïtés » qui peuvent exister « suivant les échelles prises en compte ». À l’inverse, l’enseignante caractérise le genre par « l’apprentissage et la culture ». Elle précise : « Le genre définit des catégories, des hiérarchies, une universalité, une transversalité… », décrivant d’ailleurs la médecine comme « historiquement androcentrée ». « Dès les 18ème et 20ème siècles, la norme masculine s’est imposée pour être seulement remise en cause au milieu du 20ème siècle », a-t-elle noté. De cet androcentrisme découlent plusieurs idées reçues mises en lumière dans le rapport de la HAS. Celui-ci insiste par exemple sur les maladies cardiovasculaires, les AVC ou encore l’ostéoporose qui, dans l’imaginaire collectif, sont des pathologies « réservées aux femmes » ou « réservées aux hommes ».
De nombreux impacts médicaux
« Du côté des femmes, les signes d’un infarctus étaient encore, il y a peu, trop souvent confondus avec ceux d’une crise d’angoisse », indique ainsi la HAS qui, dans sa proposition numéro six, recommande d’ailleurs de « considérer explicitement le sexe dans les essais cliniques sur les produits de santé et les actes médicaux ». La pratique pose en effet encore problème puisque « aujourd’hui encore, la recherche médicamenteuse sur les animaux est réalisée sur 75 % de mâles et les essais cliniques sont effectués sur 67 % d’hommes », a rappelé Cara Tannenbaum, médecin et professeure à l’Université de Montréal, également directrice scientifique de l’Institut de la santé des femmes et des hommes du Canada. Des pratiques qui ne sont pas sans répercussions. On estime en effet « que les femmes sont deux fois plus à risque que les hommes de développer des effets indésirables aux médicaments », a-t-elle ajouté. En cause, les différences liées au sexe, mais aussi les différences de genre avec, par exemple, une consommation plus forte de produits coupe-faim ou de psychotropes chez les femmes.
Des êtres multiples, à « l’intersection »
Et c’est loin d’être le seul constat du dernier rapport de la HAS, qui invite à « poser un regard renouvelé sur la question du sexe en santé » en dépassant notamment « la binarité classiquement admise » – alertant par là-même sur la prise en charge des personnes intersexes et trans. « L’intersectionnalité d’un individu, c’est-à-dire son sexe, son genre, son âge, son origine, son éducation…, est ce qui le définit », a indiqué Cara Tannenbaum. Elle insiste dès lors sur la nécessité « d’étudier cet ensemble pour prévenir tous les effets, y compris les effets cumulatifs ». Un autre enjeu saisi à bras-le-corps par la HAS qui appelle, dans sa proposition numéro dix, à l’intégration des personnes intersexes et trans dans les essais cliniques. Plus largement, face à « un enchevêtrement complexe et des réalités plurielles », le rapport enjoint les acteurs de santé à « une prise de conscience ». Les auteurs s’adressent également aux pouvoirs publics afin qu’ils tiennent « compte des différences liées au sexe ou au genre » via, notamment, le recours au débat public, la réalisation d’études d’impact, l’implication du monde universitaire et des acteurs associatifs, l’intégration de ces préoccupations dans les procédures d’évaluation des politiques publiques, ou encore la mobilisation de la statistique publique et l’analyse des données disponibles.
Des notions à intégrer dans les formations
Autre voie pour améliorer la prise en compte du sexe et du genre en santé, l’évolution des formations initiales et continues est elle aussi demandée par le rapport. « En théorie, les professionnels de santé doivent accompagner tous les patients. Mais en pratique, on voit encore beaucoup de difficultés, de craintes et de méconnaissances », a constaté Cyrielle Claverie, présidente de la commission santé, bien-être et bientraitance du Conseil national consultatif des personnes handicapées. Elle appelle donc à « un travail global dans les universités, les lycées… ». Muriel Salle abonde : « La pédagogie, c’est la répétition ». Elle note cependant que « la sensibilité des jeunes générations sur ces sujets est sans commune mesure avec ce que l’on a connu auparavant ». « Ce sont aussi leurs nouvelles attentes qui doivent nous pousser à faire tous ces efforts », a résumé Christian Saout avant de conclure : « La formation est essentielle pour donner les clés, sensibiliser, acquérir des connaissances et à terme offrir un accompagnement pluridisciplinaire personnalisé et donc adapté à chacun ».
- La conférence ainsi que le rapport sont disponibles en ligne sur le site de la HAS : www.has-sante.fr/jcms/p_3223570/fr/sexe-genre-et-sante-rapport-d-analyse-prospective-2020
- La conférence ainsi que le rapport sont disponibles en ligne sur le site de la HAS : www.has-sante.fr/jcms/p_3223570/fr/sexe-genre-et-sante-rapport-d-analyse-prospective-2020