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Management participatif : le CH de Valenciennes fait la course en tête


Rédigé par Joëlle Hayek le Vendredi 18 Décembre 2020 à 09:53 | Lu 4078 fois


Avec une capacité de près de 2 000 lits et places et plus de 4 500 agents, le Centre Hospitalier de Valenciennes (CHV) est l’un des trois plus gros hôpitaux généraux de France. Établissement novateur à tous les niveaux, il se démarque notamment par l’adoption d’un modèle managérial participatif qui laisse une place de choix à l’agilité collective. Pour en savoir plus, nous avons rencontré Rodolphe Bourret, Directeur Général du CHV.



Rodolphe Bourret, directeur général du Centre hospitalier de Valenciennes. © CH de Valenciennes
Rodolphe Bourret, directeur général du Centre hospitalier de Valenciennes. © CH de Valenciennes
L’approche managériale mise en œuvre au CH de Valenciennes s’inspire de celle des « hôpitaux magnétiques ». Pouvez-vous nous en parler ?
Rodolphe Bourret : Né aux États-Unis, ce modèle y a été adopté par près de 500 hôpitaux dont la Mayo Clinic, un établissement de réputation mondiale qui est aujourd’hui géré par une triade, un médecin, un soignant et un administratif, chacun pilotant les domaines de compétences qui leur sont confiés. Ce fonctionnement permet notamment de faciliter l’accès hiérarchique pour fluidifier les prises de décision, en y associant plus étroitement les acteurs de terrain et surtout en leur donnant les moyens d’assumer cette responsabilité. L’approche managériale adoptée par le CHV depuis déjà huit ans est pratiquement construite sur ce même modèle, avec la mise en œuvre d’une délégation polaire poussée à son maximum pour inverser l’arborescence de la gouvernance et déléguer la prise de décision aux acteurs de proximité, en particulier les chefs de pôles. Cela étant dit, la responsabilité de ces décisions est, dans notre cas, toujours assumée par le directeur de l’établissement.

Comment fonctionne plus concrètement votre modèle ?
Nous avons conservé le principe d’une triade : dans chaque pôle, un médecin, un soignant et un cadre administratif ont une délégation étendue en termes de pilotage – près de 90 % des prérogatives du Directeur Général leur sont ainsi déléguées, ce qui différencie grandement le CHV par rapport aux autres hôpitaux français. Notre approche n’en est pas moins encadrée, en particulier au regard des dispositions du Code de la santé publique, du Code des marchés publics et du Code du travail. Ce trio a tout pouvoir d’engager des dépenses relatives aux personnels, à l’acquisition de produits pharmaceutiques et d’équipements biomédicaux, ou à la mise en œuvre de nouveaux services hôteliers ou de travaux de modernisation, pour des montants inférieurs à 75 000 euros et sur la base d’une contractualisation formalisée.

C’est-à-dire ?
Notre projet d’établissement, qui fixe les grandes orientations pour, par exemple, la période 2018-2023, s’impose à tous. Mais il est décliné en contrats de pôles : chaque pôle se saisit des orientations qui le concernent et décrit les actions qu’il mènera en ce sens pour les cinq prochaines années. Ce document fait alors l’objet d’un CPOM (Contrat Pluriannuel d’Objectifs et de Moyens) entre le chef de pôle, le Président de la CME et le Directeur Général. Le chef de pôle dispose ainsi d’une feuille de route annuelle qu’il peut mettre en œuvre en toute autonomie. Naturellement, les différents contrats de pôles et les CPOM doivent être cohérents entre eux.

Justement, comment assurer cette cohérence d’ensemble ?
Ce point de vigilance relève de la Commission Stratégique des Projets, dont le rôle est primordial pour mettre en œuvre un management véritablement participatif : l’inscription de chaque projet dans le contrat de pôle et le CPOM est attentivement évaluée, de même que sa cohésion avec le projet d’établissement et l’adhésion effective de la communauté médicale et soignante. Cette gestion matricielle – qui s’oppose donc au management descendant traditionnel – favorise la créativité et l’implication des acteurs de terrain : lorsqu’un projet naît au sein d’un pôle, et sous réserve qu’il ait obtenu l’avis positif de la Commission Stratégique et le feu vert du Directoire, il peut alors être porté par n’importe quel membre du pôle sans considérations hiérarchiques. 

Plusieurs projets ont ainsi pu être rapidement mis en œuvre. Pouvez-vous nous en évoquer quelques-uns ?
Un nouveau service de chirurgie de la main a par exemple été créé en trois mois seulement, grâce à l’entente du pôle de Chirurgie et du pôle d’Anesthésie : quatre chirurgiens supplémentaires ont été recrutés, les équipes d’anesthésistes et d’IBODE ont été renforcées, et de nouvelles plages de vacation ont été ouvertes. Toute la gestion de projet a été menée dans le cadre d’une discussion inter-pôle : les directions fonctionnelles sont uniquement intervenues pour offrir leur appui expert, par exemple sur les volets juridiques et administratifs des recrutements. Sur un autre registre, la totalité du plateau d’imagerie médicale a été renouvelée en 18 mois en site occupé : tous les équipements ont été changés et le site a été totalement reconfiguré pour améliorer l’accueil des patients, pour une enveloppe globale de 15 millions d’euros. Là aussi, la gestion de projet a été déléguée au chef du pôle Imagerie et à ses équipes, y compris pour accompagner les changements de pratiques au sein des autres pôles. Ils ont néanmoins pu s’appuyer sur la cellule Marchés du CHV, mais aussi sur les ingénieurs en organisation de la cellule Méthodologie de Projet et, bien sûr, sur la Direction Financière pour les emprunts bancaires.

Cette approche managériale devance donc certaines orientations aujourd’hui privilégiées par les pouvoirs publics.
Le gouvernement entend en effet simplifier les directives administratives et alléger les contraintes bureaucratiques pour que chacun puisse mieux se recentrer sur son cœur de métier, tout en responsabilisant les acteurs de terrain. C’est justement ce que nous nous attachons à faire au CHV. La confiance représente iciun facteur essentiel, puisqu’en tant que Directeur Général, j’assume la totalité des responsabilités pour des décisions prises par des tiers.Il faut donc savoir se faire confiance a priori, même si nous disposons aussi d’indicateurs pour vérifier le bon avancement des projets. L’autre principe du management participatif est de savoir respecter la fonction et le rôle de chacun, qu’il soit directeur, médecin, soignant, brancardier, etc. Chaque professionnel a son propre périmètre de responsabilité, il connaît les enjeux et le sens de son travail. En s’engageant sur ces postulats, le Centre Hospitalier de Valenciennes s’engage aussi en faveur de la qualité de vie au travail et de la reconnaissance du travail effectués. Nous en voyons les effets tous les jours avec, par exemple, un dialogue plutôt serein avec les partenaires sociaux. Ce qui n’est pas sans impacts sur l’attractivité de notre établissement. Pour preuve, nous avons peu de difficultés pour recruter des professionnels qualifiés, y compris pour des métiers et des spécialités en tension.




Article publié sur le numéro de septembre d'Hospitalia à consulter ici

 






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