À Lille, le développement durable est intégré à une direction transversale, notamment articulée autour de la qualité. Pourquoi ce choix ?
Nathalie Borgne : Il s’agit là d’une volonté de notre directeur général, qui a ainsi souhaité réunir les thématiques sur lesquelles s’appuie la construction de notre démarche qualité. La direction Qualité, Risques, Expérience Patient, Développement Durable et Éthique recouvre donc plusieurs notions structurantes pour le projet d’établissement et le projet médico-soignant. Cela étant dit, le développement durable représente un engagement ancien et historique du CHU de Lille qui est, rappelons-le, le quatrième CHU de France. Avec plus de 16 000 salariés et une dizaine d’hôpitaux spécialisés répartis sur 60 hectares – au sein d’un campus de 350 hectares –, son activité est équivalente à celle d’une ville de 35 000 habitants, ce qui correspondrait par exemple à Poissy, en région parisienne. Travailler à la réduction de notre impact environnemental représente donc un enjeu majeur, pour nos usagers comme pour nos salariés.
Pourriez-vous nous en parler ?
Notre démarche Développement Durable a commencé à prendre forme en 2008, avec un schéma directeur et une ligne de route clairement définis. Elle a d’ailleurs été dès cette époque inscrite dans notre projet d’établissement. Mais ce n’est qu’à partir de 2012 qu’elle s’est structurée véritablement, en s’articulant autour de trois fils rouges : préserver la santé de nos usagers, réduire les risques associés à nos activités, et agir pour la durabilité de nos ressources – et en particulier nos ressources humaines, qui à l’hôpital sont particulièrement précieuses. Or un établissement fortement engagé en faveur du développement durable est un établissement plus attractif, car il mobilise à la fois les notions de Responsabilité sociale et environnementale (RSE) et de Qualité de vie au travail (QVT). C’est pourquoi nous faisons de ce sujet l’un des socles du projet d’établissement, du projet médico-soignant et du projet managérial.
Comment avez-vous procédé pour initier cette dynamique ?
Nous avons agi en plusieurs temps. Entre 2008 et 2011, nous avons commencé par mettre en place différentes actions autour du concept de développement durable. Puis, de 2012 à 2016, nous avons cherché à leur donner du sens. Cette approche a été consolidée entre 2018 et 2022 avec un pilotage délégué, afin que tous les professionnels du CHU soient acteurs du développement durable. Nous disposons d’ailleurs déjà d’un réseau de plus de 200 ambassadeurs, c’est-à-dire des salariés volontaires pour porter un projet, et avons constitué plusieurs groupes thématiques autour desquels nos équipes ont su se fédérer. La démarche a également été élargie à l’échelle du Groupement Hospitalier de Territoire Lille Métropole Flandre Intérieur, dont le CHU de Lille est l’établissement support : en 2019, le développement durable a été inscrit dans le projet Qualité du GHT, et devrait à ce titre nourrir le projet médico-soignant de territoire, actuellement en cours de rédaction.
Où en êtes-vous aujourd’hui, du moins en ce qui concerne le CHU ?
Nous en sommes désormais à la quatrième étape de la démarche, qui devrait se concrétiser à partir de 2023. Nous avons, pour cela, effectué le bilan des actions menées depuis 2008, ce qui nous a permis de formaliser quatre nouveaux axes de travail : la maîtrise des consommations énergétiques, les achats responsables, la réduction des déchets, et enfin l’optimisation des transports. Nous avons déjà travaillé sur ces sujets au cours des dernières années mais, pour la période qui s’ouvre, toutes les actions que nous mènerons devront s’inscrire dans ces axes et les alimenter. C’est notamment le cas de la réflexion autour de l’écoconception des soins.
Nathalie Borgne : Il s’agit là d’une volonté de notre directeur général, qui a ainsi souhaité réunir les thématiques sur lesquelles s’appuie la construction de notre démarche qualité. La direction Qualité, Risques, Expérience Patient, Développement Durable et Éthique recouvre donc plusieurs notions structurantes pour le projet d’établissement et le projet médico-soignant. Cela étant dit, le développement durable représente un engagement ancien et historique du CHU de Lille qui est, rappelons-le, le quatrième CHU de France. Avec plus de 16 000 salariés et une dizaine d’hôpitaux spécialisés répartis sur 60 hectares – au sein d’un campus de 350 hectares –, son activité est équivalente à celle d’une ville de 35 000 habitants, ce qui correspondrait par exemple à Poissy, en région parisienne. Travailler à la réduction de notre impact environnemental représente donc un enjeu majeur, pour nos usagers comme pour nos salariés.
Pourriez-vous nous en parler ?
Notre démarche Développement Durable a commencé à prendre forme en 2008, avec un schéma directeur et une ligne de route clairement définis. Elle a d’ailleurs été dès cette époque inscrite dans notre projet d’établissement. Mais ce n’est qu’à partir de 2012 qu’elle s’est structurée véritablement, en s’articulant autour de trois fils rouges : préserver la santé de nos usagers, réduire les risques associés à nos activités, et agir pour la durabilité de nos ressources – et en particulier nos ressources humaines, qui à l’hôpital sont particulièrement précieuses. Or un établissement fortement engagé en faveur du développement durable est un établissement plus attractif, car il mobilise à la fois les notions de Responsabilité sociale et environnementale (RSE) et de Qualité de vie au travail (QVT). C’est pourquoi nous faisons de ce sujet l’un des socles du projet d’établissement, du projet médico-soignant et du projet managérial.
Comment avez-vous procédé pour initier cette dynamique ?
Nous avons agi en plusieurs temps. Entre 2008 et 2011, nous avons commencé par mettre en place différentes actions autour du concept de développement durable. Puis, de 2012 à 2016, nous avons cherché à leur donner du sens. Cette approche a été consolidée entre 2018 et 2022 avec un pilotage délégué, afin que tous les professionnels du CHU soient acteurs du développement durable. Nous disposons d’ailleurs déjà d’un réseau de plus de 200 ambassadeurs, c’est-à-dire des salariés volontaires pour porter un projet, et avons constitué plusieurs groupes thématiques autour desquels nos équipes ont su se fédérer. La démarche a également été élargie à l’échelle du Groupement Hospitalier de Territoire Lille Métropole Flandre Intérieur, dont le CHU de Lille est l’établissement support : en 2019, le développement durable a été inscrit dans le projet Qualité du GHT, et devrait à ce titre nourrir le projet médico-soignant de territoire, actuellement en cours de rédaction.
Où en êtes-vous aujourd’hui, du moins en ce qui concerne le CHU ?
Nous en sommes désormais à la quatrième étape de la démarche, qui devrait se concrétiser à partir de 2023. Nous avons, pour cela, effectué le bilan des actions menées depuis 2008, ce qui nous a permis de formaliser quatre nouveaux axes de travail : la maîtrise des consommations énergétiques, les achats responsables, la réduction des déchets, et enfin l’optimisation des transports. Nous avons déjà travaillé sur ces sujets au cours des dernières années mais, pour la période qui s’ouvre, toutes les actions que nous mènerons devront s’inscrire dans ces axes et les alimenter. C’est notamment le cas de la réflexion autour de l’écoconception des soins.
Par exemple, quelles actions recouvre le volet sur les consommations énergétiques ?
Nous traitons notamment ici de transition écologique et de décarbonation, qui sont elles-mêmes des sujets transversaux pour lesquels treize thématiques ont déjà été identifiées. Nous avons entre autres travaillé sur la réduction des consommations énergétiques dans les blocs opératoires, avec la mise en place d’un mode « nuit » pour les systèmes de traitement de l’air, le déploiement d’ampoules basse consommation et d’interrupteurs automatiques, etc. L’an dernier, nous avons également accueilli un étudiant qui a analysé les consommations énergétiques des salles blanches de pharmacie, ce qui a permis d’adapter le projet de construction de la future Pharmacie à Usage Interne (PUI) afin d’être en meilleure adéquation avec les exigences de la norme Haute Qualité Environnementale (HQE).
Vous avez évoqué l’écoconception des soins. De quoi s’agit-il, plus particulièrement ?
Cette approche globale consiste à analyser un processus de soins afin de connaître précisément les ressources utilisées, identifier ses impacts environnementaux et sanitaires et tenter de les minimiser, en faisant entre autres appel au concept d’écologie circulaire. Il s’agit donc, pour résumer, de maîtriser son empreinte écologique et énergétique. Par exemple, dans la continuité des travaux du Pr Laurent Storme, coordonnateur du projet hospitalo-universitaire « Les 1 000 premiers jours pour la santé », les médecins et pharmaciens du service de néonatalogie se sont intéressés aux dispositifs de nutrition parentérale, notamment utilisés chez les prématurés alors même qu’ils contiennent des phtalates. En travaillant avec les fournisseurs industriels et la direction des achats, ils ont réussi à modifier les pratiques et donc à réduire l’exposition des nouveau-nés aux perturbateurs endocriniens. Et c’est loin d’être le seul exemple !
Pourriez-vous nous en citer d’autres ?
Le Dr Gabin Momal, alors interne en ophtalmologie, a étudié les impacts environnementaux des injections intravitréennes. Il en a examiné toutes les étapes, enregistrement du patient, habillage, préparation de la table d’injection, protocoles de soins, rédaction du compte-rendu, évacuation des déchets, tout en analysant le cycle de vie du plateau opératoire. Ces données objectives lui ont permis d’identifier plusieurs pistes afin que cet acte soit plus durable. Il en a d’ailleurs fait le sujet de sa thèse. Une autre équipe du bloc des urgences a mené une étude similaire sur les émissions de gaz à effet de serre lors d’une intervention chirurgicale. Les travaux ont ici porté sur l’appendicectomie, avec une fois de plus l’analyse fine des ressources mobilisées et des déchets générés. C’est désormais au tour du service d’obstétrique, où sont analysées et comparées les empreintes environnementales d’un accouchement par voie basse et d’un accouchement par césarienne.
Nous traitons notamment ici de transition écologique et de décarbonation, qui sont elles-mêmes des sujets transversaux pour lesquels treize thématiques ont déjà été identifiées. Nous avons entre autres travaillé sur la réduction des consommations énergétiques dans les blocs opératoires, avec la mise en place d’un mode « nuit » pour les systèmes de traitement de l’air, le déploiement d’ampoules basse consommation et d’interrupteurs automatiques, etc. L’an dernier, nous avons également accueilli un étudiant qui a analysé les consommations énergétiques des salles blanches de pharmacie, ce qui a permis d’adapter le projet de construction de la future Pharmacie à Usage Interne (PUI) afin d’être en meilleure adéquation avec les exigences de la norme Haute Qualité Environnementale (HQE).
Vous avez évoqué l’écoconception des soins. De quoi s’agit-il, plus particulièrement ?
Cette approche globale consiste à analyser un processus de soins afin de connaître précisément les ressources utilisées, identifier ses impacts environnementaux et sanitaires et tenter de les minimiser, en faisant entre autres appel au concept d’écologie circulaire. Il s’agit donc, pour résumer, de maîtriser son empreinte écologique et énergétique. Par exemple, dans la continuité des travaux du Pr Laurent Storme, coordonnateur du projet hospitalo-universitaire « Les 1 000 premiers jours pour la santé », les médecins et pharmaciens du service de néonatalogie se sont intéressés aux dispositifs de nutrition parentérale, notamment utilisés chez les prématurés alors même qu’ils contiennent des phtalates. En travaillant avec les fournisseurs industriels et la direction des achats, ils ont réussi à modifier les pratiques et donc à réduire l’exposition des nouveau-nés aux perturbateurs endocriniens. Et c’est loin d’être le seul exemple !
Pourriez-vous nous en citer d’autres ?
Le Dr Gabin Momal, alors interne en ophtalmologie, a étudié les impacts environnementaux des injections intravitréennes. Il en a examiné toutes les étapes, enregistrement du patient, habillage, préparation de la table d’injection, protocoles de soins, rédaction du compte-rendu, évacuation des déchets, tout en analysant le cycle de vie du plateau opératoire. Ces données objectives lui ont permis d’identifier plusieurs pistes afin que cet acte soit plus durable. Il en a d’ailleurs fait le sujet de sa thèse. Une autre équipe du bloc des urgences a mené une étude similaire sur les émissions de gaz à effet de serre lors d’une intervention chirurgicale. Les travaux ont ici porté sur l’appendicectomie, avec une fois de plus l’analyse fine des ressources mobilisées et des déchets générés. C’est désormais au tour du service d’obstétrique, où sont analysées et comparées les empreintes environnementales d’un accouchement par voie basse et d’un accouchement par césarienne.
Présente en filigrane dans ces réflexions, la question des déchets représente un axe stratégique sur lequel vous avez déjà beaucoup avancé.
Il y a en effet 65 types de déchets générés par le CHU, pour lesquels ont déjà été mises en place 43 filières de tri. Ce chiffre devrait prochainement augmenter avec l’ouverture de nouvelles filières de recyclage. Mais il nous faut également considérer la chaîne dans son ensemble et chercher à réduire les volumes de déchets produits. Il s’agit là d’une réflexion permanente qui se matérialise notamment à travers l’écoconception des soins : en évaluant la pertinence de chaque action, nous pouvons identifier et donc limiter la surconsommation des ressources.
Vous avez également beaucoup travaillé sur la question du réemploi. Que pourriez-vous nous en dire ?
C’est effectivement une réflexion initiée avant même la crise Covid. Fabrice Romelard, un jeune ingénieur de notre Pôle biologie, a créé « le Bon Coin des Laboratoires », une plateforme de réemploi leur permettant de mettre les matériels et équipements dont ils n’ont plus l’usage à disposition d’autres professionnels du CHU. L’initiative connaît un grand succès et est progressivement étendue à d’autres services et établissements, notamment pour les activités tertiaires. Nous avons par exemple réutilisé, pour un hôpital du territoire, l’équivalent de 34 000 euros de matériels en provenance du CHU et qui ne nous servaient plus.
D’autres exemples sur ce champ de l’économie circulaire ?
Nous pouvons évoquer aussi le projet Recyclotech, sur lequel nous travaillons actuellement avec le Pôle Eurasanté. Il s’agira, plus concrètement, de récupérer et de remettre en conditions, dans le respect des normes sanitaires et sécuritaires, des dispositifs médicaux de petite taille – béquilles, appareils auditifs, etc. – pour les mettre ensuite à disposition de patients en situation de vulnérabilité. Ces quelques exemples montrent bien à quel point les professionnels du CHU de Lille se sont saisis des enjeux relatifs au développement durable : ils sont impliqués, proactifs et inventifs, et nous tentons de les accompagner afin de donner corps à leurs idées et leur permettre d’en faire bénéficier le plus grand nombre.
Une autre initiative remarquable : la certification THQSE de l’hôpital Jeanne de Flandres.
L’établissement a eu ici un score de 97 %, le plus élevé obtenu à ce jour par un établissement de santé sur le label Très Haute Qualité Sanitaire, Sociale et Environnementale. La démarche avait commencé au sein du service Maternité, avant d’être étendue au secteur Femme-Enfant, puis à la Pédiatrie, et enfin au reste de l’hôpital Jeanne de Flandres. Ce projet a donc été moteur pour l’établissement, et il se poursuit aujourd’hui à travers d’autres initiatives. Cela étant dit, le label THQSE comporte de nombreux critères, dont une partie seulement est spécifique à l’hôpital Jeanne de Flandres. Les autres s’appliquent au CHU dans son ensemble, et concernent par exemple les achats, les consommations énergétiques, la restauration, etc., permettant ainsi à nos autres établissements d’être eux aussi conformes à certaines exigences du label. Nous allons d’ailleurs poursuivre cette démarche de label avec les blocs opératoires.
Pourriez-vous également évoquer l’axe Transports mentionné plus haut ?
Il comporte trois volets : les professionnels, les usagers et la logistique. En ce qui concerne les professionnels hospitaliers, nous avons mis en place un plan de mobilité douce, avec la mise à disposition de véhicules électriques, la promotion du covoiturage et surtout des déplacements à vélo, car de très nombreux salariés habitent à moins de 5 km du CHU. Stations et parkings à vélo, vestiaires et douches, forfaits mobilité, voies cyclables, nous avons beaucoup travaillé avec la ville de Lille pour favoriser le recours à ce mode de déplacement. Et les résultats sont très positifs ! 300 professionnels du CHU ont participé aux derniers Challenges de la Mobilité, où nous sommes d’ailleurs arrivés premiers au niveau régional et quatrièmes à l’échelle nationale, toutes entreprises confondues. Classés « A » dans le cadre du label Employeur Pro Vélo, nous poursuivons sur cette voie avec par exemple la mise à disposition prochaine d’un atelier vélo sur site. Les patients ne sont pas en reste, car eux aussi sont incités à privilégier, lorsqu’ils le peuvent, des modes de mobilité douce. Quant aux transports internes, nous essayons autant que possible de privilégier les véhicules électriques (voitures et vélos) et de favoriser le regroupement des flux.
Le mot de la fin ?
La démarche Développement Durable du CHU de Lille est une stratégie pérenne et qui recouvre de très nombreuses thématiques. Certaines sont en lien avec les nouvelles exigences règlementaires ou des initiatives collectives, comme le Programme Régional de Santé Environnementale. D’autres sont spécifiques à nos activités et s’inscrivent dans la continuité des actions précédentes ou des enseignements de notre bilan carbone (niveau scope 3). Et nous n’en avons évoqué qu’une portion ! Par exemple, notre schéma directeur immobilier prévoit l’élargissement des surfaces d’espaces verts, qui passeront de 20 à 22 hectares soit l’équivalent de 35 %. Inscrits dans une démarche zéro phytosanitaire, nous disposons déjà de ruches sur site et prévoyons désormais de créer des écopâturages, ainsi qu’un espace de biodiversité – ou forêt urbaine – en partenariat avec la Faculté de Pharmacie. Sans oublier le développement de toits végétalisés, qui devraient contribuer à réduire notre empreinte carbone. Vous le voyez, les sujets sont très variés. En septembre, nous organiserons d’ailleurs un événement pour fêter nos presque 15 ans d’engagement en faveur du développement durable et valoriser ainsi l’implication de nos salariés. Car, comme je le soulignais plus haut, le développement durable à l’hôpital ne peut se concevoir sans réfléchir également à un environnement propice à la durabilité de ses ressources humaines, un enjeu qui est plus que jamais d’actualité.
Article publié dans l'édition de septembre 2022 d'Hospitalia à lire ici.
Il y a en effet 65 types de déchets générés par le CHU, pour lesquels ont déjà été mises en place 43 filières de tri. Ce chiffre devrait prochainement augmenter avec l’ouverture de nouvelles filières de recyclage. Mais il nous faut également considérer la chaîne dans son ensemble et chercher à réduire les volumes de déchets produits. Il s’agit là d’une réflexion permanente qui se matérialise notamment à travers l’écoconception des soins : en évaluant la pertinence de chaque action, nous pouvons identifier et donc limiter la surconsommation des ressources.
Vous avez également beaucoup travaillé sur la question du réemploi. Que pourriez-vous nous en dire ?
C’est effectivement une réflexion initiée avant même la crise Covid. Fabrice Romelard, un jeune ingénieur de notre Pôle biologie, a créé « le Bon Coin des Laboratoires », une plateforme de réemploi leur permettant de mettre les matériels et équipements dont ils n’ont plus l’usage à disposition d’autres professionnels du CHU. L’initiative connaît un grand succès et est progressivement étendue à d’autres services et établissements, notamment pour les activités tertiaires. Nous avons par exemple réutilisé, pour un hôpital du territoire, l’équivalent de 34 000 euros de matériels en provenance du CHU et qui ne nous servaient plus.
D’autres exemples sur ce champ de l’économie circulaire ?
Nous pouvons évoquer aussi le projet Recyclotech, sur lequel nous travaillons actuellement avec le Pôle Eurasanté. Il s’agira, plus concrètement, de récupérer et de remettre en conditions, dans le respect des normes sanitaires et sécuritaires, des dispositifs médicaux de petite taille – béquilles, appareils auditifs, etc. – pour les mettre ensuite à disposition de patients en situation de vulnérabilité. Ces quelques exemples montrent bien à quel point les professionnels du CHU de Lille se sont saisis des enjeux relatifs au développement durable : ils sont impliqués, proactifs et inventifs, et nous tentons de les accompagner afin de donner corps à leurs idées et leur permettre d’en faire bénéficier le plus grand nombre.
Une autre initiative remarquable : la certification THQSE de l’hôpital Jeanne de Flandres.
L’établissement a eu ici un score de 97 %, le plus élevé obtenu à ce jour par un établissement de santé sur le label Très Haute Qualité Sanitaire, Sociale et Environnementale. La démarche avait commencé au sein du service Maternité, avant d’être étendue au secteur Femme-Enfant, puis à la Pédiatrie, et enfin au reste de l’hôpital Jeanne de Flandres. Ce projet a donc été moteur pour l’établissement, et il se poursuit aujourd’hui à travers d’autres initiatives. Cela étant dit, le label THQSE comporte de nombreux critères, dont une partie seulement est spécifique à l’hôpital Jeanne de Flandres. Les autres s’appliquent au CHU dans son ensemble, et concernent par exemple les achats, les consommations énergétiques, la restauration, etc., permettant ainsi à nos autres établissements d’être eux aussi conformes à certaines exigences du label. Nous allons d’ailleurs poursuivre cette démarche de label avec les blocs opératoires.
Pourriez-vous également évoquer l’axe Transports mentionné plus haut ?
Il comporte trois volets : les professionnels, les usagers et la logistique. En ce qui concerne les professionnels hospitaliers, nous avons mis en place un plan de mobilité douce, avec la mise à disposition de véhicules électriques, la promotion du covoiturage et surtout des déplacements à vélo, car de très nombreux salariés habitent à moins de 5 km du CHU. Stations et parkings à vélo, vestiaires et douches, forfaits mobilité, voies cyclables, nous avons beaucoup travaillé avec la ville de Lille pour favoriser le recours à ce mode de déplacement. Et les résultats sont très positifs ! 300 professionnels du CHU ont participé aux derniers Challenges de la Mobilité, où nous sommes d’ailleurs arrivés premiers au niveau régional et quatrièmes à l’échelle nationale, toutes entreprises confondues. Classés « A » dans le cadre du label Employeur Pro Vélo, nous poursuivons sur cette voie avec par exemple la mise à disposition prochaine d’un atelier vélo sur site. Les patients ne sont pas en reste, car eux aussi sont incités à privilégier, lorsqu’ils le peuvent, des modes de mobilité douce. Quant aux transports internes, nous essayons autant que possible de privilégier les véhicules électriques (voitures et vélos) et de favoriser le regroupement des flux.
Le mot de la fin ?
La démarche Développement Durable du CHU de Lille est une stratégie pérenne et qui recouvre de très nombreuses thématiques. Certaines sont en lien avec les nouvelles exigences règlementaires ou des initiatives collectives, comme le Programme Régional de Santé Environnementale. D’autres sont spécifiques à nos activités et s’inscrivent dans la continuité des actions précédentes ou des enseignements de notre bilan carbone (niveau scope 3). Et nous n’en avons évoqué qu’une portion ! Par exemple, notre schéma directeur immobilier prévoit l’élargissement des surfaces d’espaces verts, qui passeront de 20 à 22 hectares soit l’équivalent de 35 %. Inscrits dans une démarche zéro phytosanitaire, nous disposons déjà de ruches sur site et prévoyons désormais de créer des écopâturages, ainsi qu’un espace de biodiversité – ou forêt urbaine – en partenariat avec la Faculté de Pharmacie. Sans oublier le développement de toits végétalisés, qui devraient contribuer à réduire notre empreinte carbone. Vous le voyez, les sujets sont très variés. En septembre, nous organiserons d’ailleurs un événement pour fêter nos presque 15 ans d’engagement en faveur du développement durable et valoriser ainsi l’implication de nos salariés. Car, comme je le soulignais plus haut, le développement durable à l’hôpital ne peut se concevoir sans réfléchir également à un environnement propice à la durabilité de ses ressources humaines, un enjeu qui est plus que jamais d’actualité.
Article publié dans l'édition de septembre 2022 d'Hospitalia à lire ici.