« En quelques jours, la France est passée de 10 000 à 1 million de téléconsultations par semaine ». Tel était le constat de Claude Kirchner, président du Comité National Pilote d'Éthique du Numérique (CNPEN), quelques semaines seulement après le début de la pandémie*. Décrite comme une « réelle modalité de prise en charge » par le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, lors de son discours à SantExpo en novembre dernier, cette nouvelle façon de soigner n’est que l’un des champs offerts par les technologies numériques appliquées à la santé. Pour autant, si elle n’est que la partie émergée de l’iceberg, l’augmentation spectaculaire du nombre de téléconsultations durant les premiers mois de la crise sanitaire n’en est pas moins symptomatique d’une tendance qui se confirme : le numérique s’impose chaque jour un peu plus dans nos vies, et le secteur de la santé n’y fait pas exception.
Une forte impulsion politique et budgétaire
Pour accompagner ce changement, une multitude d’initiatives voit le jour au niveau national, pour la plupart issues de la feuille de route du numérique en santé. Lancée en avril 2019, celle-ci est portée par la Délégation ministérielle du numérique en santé, qui a elle-même publié de très nombreux outils en seulement trois ans : doctrines techniques, trajectoires, référentiels… L’année 2021 n’y fait pas exception, notamment marquée par l’arrivée de l’Identité Nationale de Santé et son utilisation désormais obligatoire pour le référencement des données de santé, ainsi que le lancement de la phase test de Mon Espace Santé, future plateforme numérique dédiée aux usagers. Regroupant une messagerie sécurisée, un dossier médical partagé, un agenda de santé ainsi qu’un catalogue de service, elle devrait s’ouvrir à tous dans le courant de l’année 2022.
Ce projet prévu de longue date bénéficie sans conteste de l’actuelle impulsion politique et budgétaire relative au numérique en santé. Ces derniers mois, ce « bond en avant » budgétaire s’est ainsi matérialisé avec le Ségur du Numérique en Santé, dit Ségur Numérique, et son enveloppe record de deux milliards d’euros – soit 1,4 milliard pour le secteur sanitaire sur trois ans, et 600 millions pour le médico-social sur cinq ans. L’un des objectifs affichés est, sans surprise, d’accélérer encore la mise en œuvre de la feuille de route du numérique en santé, plus particulièrement en ce qui concerne le partage des données de santé, véritable nerf de la guerre. Les pouvoirs publics ambitionnent ainsi de passer « de 10 millions à 250 millions de documents médicaux échangés d’ici 2023 ».
Ce projet prévu de longue date bénéficie sans conteste de l’actuelle impulsion politique et budgétaire relative au numérique en santé. Ces derniers mois, ce « bond en avant » budgétaire s’est ainsi matérialisé avec le Ségur du Numérique en Santé, dit Ségur Numérique, et son enveloppe record de deux milliards d’euros – soit 1,4 milliard pour le secteur sanitaire sur trois ans, et 600 millions pour le médico-social sur cinq ans. L’un des objectifs affichés est, sans surprise, d’accélérer encore la mise en œuvre de la feuille de route du numérique en santé, plus particulièrement en ce qui concerne le partage des données de santé, véritable nerf de la guerre. Les pouvoirs publics ambitionnent ainsi de passer « de 10 millions à 250 millions de documents médicaux échangés d’ici 2023 ».
« Accélération », mot phare de l’année 2021
Dans la continuité de ces actions, une semaine seulement après l’annonce du plan d’investissement France 2030 en octobre dernier, les pouvoirs publics ont également lancé la Stratégie d’Accélération Santé Numérique (SASN). Dotée de 650 millions d’euros provenant du Programme d’Investissement d’Avenir (PIA), cette stratégie quinquennale s’inscrit dans une volonté de « dynamiser une médecine 5P (personnalisée, préventive, prédictive, participative et des preuves) au bénéfice du citoyen, du patient et du système de santé ». Elle se divise en cinq axes disposant chacun d’une enveloppe définie, avec par exemple, 60 millions d’euros dévolus au Programme et équipements prioritaires de recherche (PEPR). « Nous vivons actuellement une période d’accélération des thématiques liées à la santé numérique », constatait alors Bruno Sportisse, président-directeur général de l’INRIA, l’institut chargé, avec l’INSERM, de piloter ce programme. Il a par ailleurs noté qu’il était « important de maîtriser au maximum tous les champs liés au numérique en santé : la diversité des données, des modèles… » pour mieux répondre aux enjeux sanitaires actuels et à venir.
Quelle stratégie pour le pilotage des données de santé ?
Ce même constat est posé par les établissements de santé eux-mêmes, qui mobilisent leurs ressources pour s’adapter à de nouveaux outils, imaginer de nouvelles pratiques, et surtout réfléchir à la manière dont ils pourraient exploiter les nouveaux volumes de données, qui eux-mêmes vont de pair avec le développement du numérique. « Parce que les CH et CHU sont des acteurs majeurs de la recherche et de la santé, ils peuvent s’impliquer dans la data qui, structurée, est un véritable atout », a ainsi estimé Jean-François Lefebvre, directeur général du CHU de Limoges, lors d’une conférence SantExpo dédiée au pilotage des données de santé. Cette tendance semble d’ailleurs se confirmer au sein des établissements français, comme en témoignent les projets interrégionaux de structuration des données – à l’instar de l’Ouest Datahub**, qui regroupe les informations de santé de plus de cinq millions de patients répartis sur six hôpitaux.
Pourtant l’utilisation et le stockage des données de santé posent de nombreuses questions. Ainsi, l’Ouest Datahub a choisi de ne pas centraliser les données des établissements, chacun possédant son propre Centre de Données Cliniques (CDC). « La gouvernance des données de santé nécessite un cadre quant à l’usage qui en est fait, et ce, afin de rappeler à tous que ces données appartiennent avant tout au patient », a précisé Me Laurence Huin, avocate associée au Cabinet Houdart, lors de la même conférence. « Nous devons embarquer les citoyens dans la gestion de leurs données », a ajouté Stéphanie Combes, directrice générale du Health Data Hub, qui d’ailleurs compte une direction citoyenne. Même constat pour Gérard Raymond, président de France Assos Santé, qui a appelé à « l’intégration des usagers dans la gestion de leurs données ». « Pour que les usagers aient confiance, il faut qu’ils aient conscience de l’amélioration qu’apporte le numérique à la qualité de notre système de santé », a-t-il conclu.
Pourtant l’utilisation et le stockage des données de santé posent de nombreuses questions. Ainsi, l’Ouest Datahub a choisi de ne pas centraliser les données des établissements, chacun possédant son propre Centre de Données Cliniques (CDC). « La gouvernance des données de santé nécessite un cadre quant à l’usage qui en est fait, et ce, afin de rappeler à tous que ces données appartiennent avant tout au patient », a précisé Me Laurence Huin, avocate associée au Cabinet Houdart, lors de la même conférence. « Nous devons embarquer les citoyens dans la gestion de leurs données », a ajouté Stéphanie Combes, directrice générale du Health Data Hub, qui d’ailleurs compte une direction citoyenne. Même constat pour Gérard Raymond, président de France Assos Santé, qui a appelé à « l’intégration des usagers dans la gestion de leurs données ». « Pour que les usagers aient confiance, il faut qu’ils aient conscience de l’amélioration qu’apporte le numérique à la qualité de notre système de santé », a-t-il conclu.
Numérisation à l’hôpital : l’exemple du CHU de Rennes
De nombreux projets sont aujourd’hui en cours au sein des établissements de santé pour favoriser l’implantation des outils numériques. Initié en janvier 2019 pour une mise en routine prévue en mars 2020, le projet de numérisation des services d’anatomie pathologique du CHU de Rennes a été finalisé en 100 % numérique en avril 2021. « De nombreux services avaient déjà bénéficié d’une numérisation, il était donc tout naturel de numériser l’anatomie pathologique », a expliqué Christine Pichon, Directrice des Systèmes d’Information (DSI) du CHU, lors d’une intervention à SantExpo. Composée de neuf pathologistes et d’une trentaine d’agents non médicaux, l’équipe d’anatomie pathologique du CHU de Rennes bénéficie donc d’un système incluant des scanners haute définition, une puissante infrastructure de stockage et des logiciels de visionnage avancé des images.
L’objectif ? Analyser les lames sur un écran plutôt que sur le microscope. Cette technique, qui permet de mettre à profit des outils d’aide au diagnostic basés sur l’intelligence artificielle, permet aussi « d’échanger plus facilement des informations, et est donc utile pour le travail multisite, le télétravail, l’enseignement ou encore le partage d’images à d’autres cliniciens et spécialistes », a indiqué Frédéric Rimattei, directeur général adjoint du CHU. Source d’une meilleure qualité de vie au travail et donc d’attractivité accrue pour les professionnels spécialistes de la discipline, la numérisation du service d’anatomie pathologique devrait également favoriser de nouveaux échanges entre les hôpitaux bretons. Travaillant déjà en lien avec le CHU de Brest et le Centre Hospitalier Bretagne-Atlantique de Vannes, le CHU de Rennes espère d’ailleurs mutualiser certains logiciels d’IA et développer une « télé-anapath » régionale.
De nombreux projets sont aujourd’hui en cours au sein des établissements de santé pour favoriser l’implantation des outils numériques. Initié en janvier 2019 pour une mise en routine prévue en mars 2020, le projet de numérisation des services d’anatomie pathologique du CHU de Rennes a été finalisé en 100 % numérique en avril 2021. « De nombreux services avaient déjà bénéficié d’une numérisation, il était donc tout naturel de numériser l’anatomie pathologique », a expliqué Christine Pichon, Directrice des Systèmes d’Information (DSI) du CHU, lors d’une intervention à SantExpo. Composée de neuf pathologistes et d’une trentaine d’agents non médicaux, l’équipe d’anatomie pathologique du CHU de Rennes bénéficie donc d’un système incluant des scanners haute définition, une puissante infrastructure de stockage et des logiciels de visionnage avancé des images.
L’objectif ? Analyser les lames sur un écran plutôt que sur le microscope. Cette technique, qui permet de mettre à profit des outils d’aide au diagnostic basés sur l’intelligence artificielle, permet aussi « d’échanger plus facilement des informations, et est donc utile pour le travail multisite, le télétravail, l’enseignement ou encore le partage d’images à d’autres cliniciens et spécialistes », a indiqué Frédéric Rimattei, directeur général adjoint du CHU. Source d’une meilleure qualité de vie au travail et donc d’attractivité accrue pour les professionnels spécialistes de la discipline, la numérisation du service d’anatomie pathologique devrait également favoriser de nouveaux échanges entre les hôpitaux bretons. Travaillant déjà en lien avec le CHU de Brest et le Centre Hospitalier Bretagne-Atlantique de Vannes, le CHU de Rennes espère d’ailleurs mutualiser certains logiciels d’IA et développer une « télé-anapath » régionale.