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« La donnée permet la mise en œuvre de l’innovation »


Rédigé par Aurélie Pasquelin le Jeudi 20 Juin 2024 à 09:17 | Lu 557 fois


Depuis janvier 2024, le groupe Ramsay Santé a regroupé l’innovation digitale et la gestion de la donnée dans une direction unique, entendant ainsi « développer des solutions et des services novateurs, renforcer la valeur apportée par les projets data et accélérer l’acculturation des équipes aux enjeux du digital et de l’exploration des données », nous explique Fabrice Morlet, désormais à la tête de cette nouvelle entité.



©LE SQUARE
©LE SQUARE
Cela faisait déjà deux ans que vous étiez directeur de la data pour le Groupe Ramsay Santé, avant de prendre aussi la direction de l’innovation digitale. Quelles sont vos missions aujourd’hui ?

Fabrice Morlet : Mon rôle au sein de cette double direction de l’innovation digitale et de la data est d’être avant tout un facilitateur, en écho aux enjeux identifiés à travers notre plan institutionnel « Yes We Care 2025 », qui lui-même vise l’amélioration continue de la qualité des soins et des parcours. Or l’accès à de nouveaux outils numériques, et les applications offertes par l’exploitation des données, contribuent à la simplification des prises en charge, et donc à l’amélioration des process de soins. La création de la nouvelle direction s’inscrit dans ce constat, pour porter une politique globale à l’échelle du groupe. Mon domaine d’intervention ne se limite d’ailleurs pas à la France : il couvre aussi la Suède, la Norvège, le Danemark ou encore l’Italie, c’est-à-dire les autres pays où est également implanté Ramsay Santé. Mes missions vont toutefois au-delà de cet objectif premier de simplification de l’accès aux données pour faciliter l’innovation digitale. Elles s’inscrivent aussi dans une démarche transverse, avec l’ambition de capitaliser sur la force du collectif et des différentes approches mises en œuvre au sein du groupe, afin d’accélérer le partage des connaissances et les retours d’expériences, notamment avec les pays nordiques. Il s’agit donc de favoriser la diffusion des bonnes pratiques entre ces pays, qui restent néanmoins assez autonomes. Chacun dispose, par exemple, d’une équipe data locale. 

Au quotidien, quels sont les profils de vos interlocuteurs ?  

La santé étant un secteur très hétérogène, ces profils sont très variés et reflètent la grande diversité des métiers : médecins, infirmiers, directeur des opérations… Par exemple, je travaille en collaboration avec la direction de la recherche pour la création d’un entrepôt de données de santé, et pourvoir ainsi capitaliser sur les 12 millions de visites annuellement enregistrées par le groupe. Mais, comme je le disais, je suis en lien avec une multitude de profils, médicaux comme non médicaux. L'innovation peut être partout, sur le champ clinique bien sûr, mais aussi dans l'accompagnement de nos patients et de nos collaborateurs. Là aussi, nous nous inspirons de ce qui se fait ailleurs, dans les pays nordiques ou au sein des entreprises. Notre objectif est, somme toute, de mettre le digital au service des parcours car, nous en sommes persuadés, il est voué à y jouer un rôle de plus en plus prégnant. 

Pourriez-vous nous donner un exemple des partages d’expériences internationales ? 

Nous pouvons prendre ici l’exemple de la Suède, où existent de nombreux outils permettant au patient d’échanger avec les professionnels le prenant en charge. Nous sommes justement en train d’adapter, pour la France, un de ces systèmes pour la prise en charge en santé mentale. Il devrait être opérationnel dans l’année, et fera ensuite l’objet d’une évaluation. Cela dit, si les pays nordiques nous inspirent, eux aussi puisent dans nos idées. Je pense notamment à un moteur intelligent, capable d’écouter une consultation et d’accompagner le médecin dans la rédaction de son compte-rendu. S’inspirant d’un outil français, une entreprise danoise accompagne aujourd’hui des établissements nordiques pour créer un outil correspondant à leurs attentes et qui pourrait nourrir de nouveaux usages. 

N’y a-t-il pas une volonté d’unification des outils digitaux au sein du groupe ? 

Nous essayons autant que possible de favoriser cette unification, notamment pour bénéficier d’économies d’échelle, mais tout homogénéiser n’est pas possible, et d’ailleurs pas souhaitable. Bien sûr, nous incitons les pays à investir dans les domaines identifiés comme source de valeur. Mais chaque pays et chaque établissement a des spécificités qui lui sont propres, en fonction de son histoire, de ses organisations, de sa langue… Il est aussi nécessaire d’en tenir compte. L’écosystème de la santé est très fourni, voire complexe : chaque entité, chaque domaine d’expertise médicale, a ses besoins et ses contraintes. La technologie qui sait tout faire partout et de manière précise, je n’y crois pas. 

Vous évoquiez plus haut la création d’un entrepôt de données de santé (EDS). Sera-t-il commun à l’ensemble des pays où est implanté Ramsay Santé ?

Nous croyons beaucoup en cet entrepôt, pour notamment soutenir les activités de recherche et venir en appui aux projets d’innovation des 10 000 praticiens du groupe. Mais les législations relatives aux EDS étant spécifiques à chaque pays, il ne s’agit pas, pour le moment, de créer un entrepôt international. Tous les pays utiliseront cependant le même modèle de données, ce qui facilitera leur croisement, par exemple dans le cadre d’une étude clinique multipays. Ce modèle sera d’ailleurs similaire à celui utilisé par Ramsay Health Care, en Australie, pour ouvrir encore le champ des possibles et faire bénéficier la recherche et l’innovation de données issues de presque 20 millions de passages par an.  

Quid des enjeux de sécurité ?

Ils occupent une place centrale dans nos travaux autour de l’EDS. Un comité éthique sera ainsi chargé d’évaluer et d’autoriser l’accès à des packs de données anonymisées, dans le cadre de projets bien spécifiques. Ces accès seront d’ailleurs eux-mêmes contrôlés. Nous mettons tout en œuvre pour garantir une sécurité forte, les services informatiques de notre groupe y veillent activement. Le délégué à la protection des données (DPO) est également largement engagé sur le projet, car il est impératif que tous aient confiance dans l’EDS. 

Un mot, pour finir, sur l’engagement de Ramsay Santé dans des projets impliquant l’utilisation de l’intelligence artificielle ?

Nous investissons beaucoup dans cette technologie, dans tous les pays où nous sommes présents. En Suède, par exemple, un outil d’IA a déjà reçu l’accord pour être utilisé en deuxième lecture des mammographies. Deux années de travail ont été nécessaires pour y aboutir, mais la technologie est aujourd’hui pleinement opérationnelle et a permis de réduire le temps d’attente pour l’obtention d’un rendez-vous, qui est passé de six semaines à une seule désormais. Ses bénéfices sont donc quantifiables, pour les patients comme pour les professionnels de santé, qui subissent moins de pression. Les outils d’IA permettent d’imaginer de nombreuses applications, dans de nombreux domaines et pour de nombreux profils – accompagner les nouveaux salariés et les usagers, analyser les verbatim des patients, générer des comptes-rendus… Mais, plus que la technologie en tant que telle, la principale révolution repose véritablement sur les nouvelles modalités d’utilisation de la data. La donnée est de plus en plus présente et permet le partage et la mise en œuvre de l’innovation.  

> Article paru dans Hospitalia #65, édition de mai 2024, à lire ici 
 

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