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Le magazine de l'innovation hospitalière
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« L’innovation est un état d'esprit »


Rédigé par Joëlle Hayek le Mercredi 18 Octobre 2023 à 15:20 | Lu 1102 fois


Convaincu que l’avenir du système de santé s’invente de manière collective et collaborative, le Fonds FHF Recherche et Innovation cherche à fédérer l’écosystème autour d’une démarche structurée, qui elle-même entend mieux mettre en lumière l’omniprésence de l’innovation en milieu hospitalier. Le point avec le Docteur Guillaume Mercy, directeur du Fonds depuis le 1er janvier 2023.



Vous avez rejoint le Fonds FHF en 2018. Pourriez-vous nous en parler ?

Dr Guillaume Mercy : C’est effectivement une aventure à laquelle j’ai pris part aussitôt mon doctorat en sciences de la vie terminé, mais cela faisait déjà plusieurs années que je travaillais sur l’intégration et le management de l’innovation dans les établissements de santé. À cet égard, j’avais déjà eu l’occasion de collaborer avec Enguerrand Habran, alors directeur du Fonds FHF. J’ai d’ailleurs rejoint cette entité à sa demande, d’abord en tant que chef de projet Innovation puis d’adjoint au directeur. Je dirige désormais le Fonds depuis le 1er janvier 2023 et compte bien poursuivre la dynamique initiée depuis sa création en 2014.

Pourriez-vous nous rappeler ses missions ?

Elles s’articulent autour de trois grands axes. D’abord la promotion d’une culture de l’innovation à l’Hôpital et de son corollaire, le management de l’innovation qui, correctement structuré, peut être un réel vecteur d’efficience. Ensuite la conduite du changement, pour aider à la compréhension des transformations en cours au sein de l’écosystème et mieux anticiper celles à venir. Enfin l’accompagnement des innovateurs hospitaliers, essentiellement sur le plan méthodologique mais aussi en facilitant leur mise en relation avec les acteurs industriels. Ces missions se matérialisent notamment à travers la plateforme Hospi’Up, qui a récemment connu de nouveaux développements.

Par exemple ?

Outre le guide – sur lequel nous reviendrons – et la base de données des innovations, déjà présents dans sa première version, la plateforme a intégré trois nouveaux outils dans la V2 sortie en février 2022. S’y est ainsi ajoutée une cartographie des acteurs innovants, qui recense onze catégories de partenaires (laboratoires de recherche, incubateurs, accélérateurs, écoles d’ingénieurs, etc.) avec lesquels les Hôpitaux pourraient collaborer. La V2 propose également un outil d’appels à projets et d’appels à manifestation d’intérêt, ouvert à tous les établissements publics de santé et leur offrant de ce fait les mêmes opportunités, quelle que soit leur taille, pour faire connaître leurs besoins auprès des innovateurs en santé. J’évoquerai pour finir un nouvel outil d’aide à la contractualisation, permettant à ce jour de générer trois modèles de contrats types, l’accord de confidentialité, le contrat de co-conception, et le contrat de validation de tests. Cette base devrait continuer à s’enrichir pour favoriser la montée en compétences de l’écosystème.

Vous avez mentionné le Guide Hospi’Up, dont la V3 est aussi sortie il y a quelques mois. Que pourriez-vous nous en dire ?

Parmi ses principales nouveautés, je citerai notamment une série d’entretiens menés d’une part avec des directeurs généraux et des directeurs de l’innovation dans des CHU, afin de bénéficier de leur retour d’expérience sur ce champ précis, et d’autre part avec des acteurs du monde industriel, pour connaître leur vision sur la manière dont une direction de l’innovation devrait s’organiser à l’Hôpital. Ce croisement des regards est à mon sens riche d’enseignements pour tous les établissements souhaitant s’engager sur cette voie. La V3 du Guide Hospi’Up intègre également un outil dédié à la commande publique, et permettant de mieux identifier la procédure qui, dans le Code des marchés publics, serait la mieux adaptée à la commercialisation ou à l’achat d’une innovation donnée – un dispositif s’inscrivant dans la continuité des travaux notamment menés par la DGOS avec le programme PHARE et, plus récemment, le guide des acheteurs publics.

Toutes ces initiatives font écho à la conviction, portée et défendue par le Fonds FHF, que l’innovation se retrouve aujourd’hui à tous les étages et dans tous les secteurs de l’Hôpital.

Longtemps, l’innovation était en effet uniquement considérée sous le prisme de la recherche clinique. Cette vision a commencé à évoluer avec l’arrivée du numérique mais c’est l’épidémie Covid qui a véritablement fait sauter les verrous. En obligeant les établissements de santé à repenser leurs organisations – et donc à innover –, la pandémie a à la fois été un catalyseur et un déclic. L’on s’est alors rendu compte que l’innovation était partout. Des CHU ont créé des directions de l’innovation, la Banque des territoires a lancé les appels à projets Tiers-lieux d’expérimentation numérique, l’Agence de l’innovation en santé a vu le jour… et la dynamique continue de s’accélérer, comme l’a d’ailleurs mis en lumière l’espace Hôpital de demain présenté lors de la dernière édition de SantExpo : les solutions proposées par la cinquantaine de start-ups sélectionnées couvraient la quasi-totalité du parcours patient et des fonctions hospitalières. Ce sont autant de transformations qu’il est nécessaire d’accompagner, en particulier sur le plan méthodologique. C’est justement là l’une des raisons d’être du Fonds FHF.

Justement, quels sont vos projets à court et moyen terme ?

Nous poursuivrons nos travaux autour de l’hôpital de demain, pour d’une part continuer à mettre en exergue cette dimension protéiforme de l’innovation dans les établissements de santé, et d’autre part les accompagner toujours mieux dans le management de l’innovation. La plateforme Hospi’Up, le MOOC « L’innovation dans les établissements de santé » du Fonds, offrent déjà beaucoup de matière pour pouvoir structurer des directions de l’innovation. Les modèles proposés à ce jour sont toutefois essentiellement pensés pour les gros établissements, qui disposent des ressources suffisantes pour les déployer. Aussi souhaitons-nous aussi développer des modèles adaptés aux spécificités des hôpitaux locaux, afin qu’ils puissent également s’engager sur cette voie et en tirer rapidement des bénéfices. En parallèle, et pour que cette dynamique soit véritablement pérenne, nous cherchons à faire connaître aux établissements de santé, la norme ISO 56000 relative au management de l’innovation. Cela dit, les recommandations de cette norme sont assez proches du contenu de notre MOOC et du guide Hospi’Up, preuve, s’il en est, que nous avions visé juste.

Un mot, pour finir, sur les leviers qui pourraient accélérer l’innovation à l’Hôpital ?

Le premier levier est sans surprise financier : l’innovation devrait faire l’objet d’une enveloppe dédiée et pérenne au sein des budgets hospitaliers, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui… Le deuxième est d’ordre culturel : l’innovation est un état d’esprit qui, pour s’épanouir et prospérer, doit être impulsé et soutenu par les directions générales. Ce n’est qu’avec cet appui qu’elle pourra véritablement s’affirmer comme un terrain propice à la transformation des organisations, à tous les niveaux – y compris ceux longtemps restés hors champ, comme la qualité de vie au travail et la gestion des ressources humaines. Enfin, et bien que l’innovation ne s’en tienne pas au seul volet technologique, la disponibilité de systèmes d’information hospitaliers réellement matures en termes de gestion et de partage des données de santé, sera à terme un réel accélérateur pour sa diffusion.

> Article publié dans l'édition de septembre d'Hospitalia à lire ici.

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