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IPA : nouvelles compétences, nouvelles pratiques


Rédigé par Aurélie Pasquelin le Mardi 24 Janvier 2023 à 13:47 | Lu 1484 fois


Créé par la loi de 2016 pour la modernisation de notre système de santé puis adossé à la création d’un diplôme spécifique, le statut d’Infirmier en Pratique Avancée (IPA) trouve peu à peu sa place au sein des établissements de santé. Partout, des soignants se saisissent de cette évolution qu’ils appelaient de leurs vœux et opèrent déjà des missions en lien avec cette nouvelle pratique.



« L'infirmier exerçant en pratique avancée dispose de compétences élargies, par rapport à celles de l'infirmier diplômé d'État. […] L'infirmier exerçant en pratique avancée apporte son expertise et participe, en collaboration avec l'ensemble des professionnels concourant à la prise en charge du patient, à l'organisation des parcours entre les soins de premier recours, les médecins spécialistes de premier ou deuxième recours et les établissements et services de santé ou médico-sociaux ». Intégrés au Code de la santé publique, les décrets n°2018-629 et n°2018-633 du 18 juillet 2018, qui eux-mêmes découlent de la loi Santé de 2016, définissent les différentes missions des Infirmiers en Pratique Avancée (IPA). Ce statut relativement récent s’est ensuite progressivement déployé dans les instituts de formation pour être, depuis quelques mois, réellement visible au sein des établissements de santé français.

« Une réelle évolution » …

Participant à la prise en charge globale des patients, à l’organisation des parcours et pouvant conduire des entretiens avec les patients, les IPA disposent de compétences plus larges que les Infirmiers Diplômés d’État (IDE). « Nous pouvons par exemple pratiquer des examens cliniques ou prescrire certains médicaments, dispositifs médicaux et examens », détaille Coralie Bozec, IPA en mention oncohématologie. Ancienne IDE, cette Bretonne ayant travaillé à Paris et en Suisse exerce depuis quelques mois au Centre Hospitalier de Dinan et au Centre de lutte contre le cancer Eugène Marquis de Rennes.
 
« Déjà présent en Suisse depuis plusieurs années, l’exercice d’IPA représente une réelle évolution dans mes fonctions et missions », ajoute l’intéressée, qui a autofinancé les deux années de formation lui ouvrant le droit à ce statut. Car, pour devenir IPA, il faut en effet remplir plusieurs conditions définies par le Code de la santé publique. En particulier, trois années d’expérience en tant qu’IDE, complétées par une formation spécialisée de deux ans dans une Université sont nécessaires pour être enregistré en tant qu’IPA.

… pour aller plus loin dans sa spécialité

Malgré les difficultés pour justement financer cette formation de deux ans, plusieurs IDE ont sauté le pas et se sont engagés pour eux aussi « évoluer » dans leurs missions, comme en témoignent Coralie Bozec mais aussi Amaël Marneur, IPA exerçant au sein du service de diabétologie et de neurologie vasculaire du Centre Hospitalier de Saint-Malo. Diplômée depuis juillet 2022 et en fonction depuis le mois de septembre, cette dernière était déjà titulaire d’un diplôme universitaire de diabétologie avant de se lancer dans la formation d’IPA.
 
« J’ai toujours souhaité me spécialiser. Je me suis donc naturellement tournée vers le diplôme universitaire puis vers le diplôme d’IPA », précise la jeune IPA qui a également dû autofinancer sa formation. Mais ce statut avait retenu son attention. En particulier, la possibilité de mettre en œuvre un réel suivi des patients, de tenir des consultations et de proposer un programme d’éducation thérapeutique lui semblaient « tout particulièrement intéressants ». « Les consultations et téléconsultations, l'accompagnement de projets et notamment la valorisation de l'éducation thérapeutique réalisée dans le service, sont autant de tâches que je n’étais pas amenée à effectuer auparavant », constate-t-elle aujourd’hui avec le sourire.

Une nouvelle profession…

Et les patients lui font bon accueil. Ces derniers considèrent ainsi positivement le suivi effectué par l’IPA, qui est néanmoins attentive à recueillir au préalable leur accord écrit. « Au début de la consultation, je prends le temps d’expliquer ce qu’est un IPA, quelles sont mes missions mais aussi mes limites », précise Amaël Marneur. Même constat de la part de Coralie Bozec, qui entend toutefois quelques « Au revoir docteur » à la fin de certaines consultations. « Deux ans après que les premiers IPA sont sortis de formation, il est normal que les patients ne soient pas encore tout à fait familiarisés avec notre métier », ajoute l’infirmière, persuadée qu’à terme « l’habitude viendra ».
 
Pour le corps médical, ce nécessaire temps d’adaptation sera certainement plus court. Si, à sa création, ce nouveau métier avait fait les frais d’une certaine défiance de la part de quelques médecins et organisations médicales, les doutes semblent s’être aujourd’hui atténués, parallèlement à une meilleure définition et une meilleure perception des missions des IPA. « Dans les deux centres où j’interviens, les équipes médicales sont ravies d’avoir des “bras” supplémentaires, notamment en oncologie où l’IPA se focalise davantage sur les soins supports et sur la tolérance aux traitements anticancéreux », témoigne Coralie Bozec, qui compte déjà sur trois collègues IPA au sein du Centre Marquis de Rennes, et bientôt deux autres au CH de Dinan.

… en plein développement

 À Saint-Malo, deux IDE sont également parties en formation IPA cette année et viendront prochainement grossir les rangs de la profession. « Avant d’entamer ma formation, et durant tous les stages réalisés pour l’obtention de ce statut, j’ai toujours eu à cœur d’expliquer l’IPA et ses différentes missions », indique Amaël Marneur qui poursuit aujourd’hui cet engagement. Depuis deux ans, elle intervient ainsi à l’Institut de Formation en Soins Infirmiers de la cité corsaire pour présenter son métier aux étudiants de deuxième année. « Pour beaucoup, ce temps d’explication est nécessaire pour qu’ils puissent mieux appréhender le statut d’IPA, découvrir ses différentes missions, mais aussi réfléchir aux évolutions possibles dans le cadre de leur futur métier », explique l’infirmière qui identifie néanmoins deux freins majeurs : le financement difficile de la formation, et une valorisation salariale encore très partielle. Après quinze années d’exercice en tant qu’IDE, auxquelles s’ajoutent deux années de travail dans le secteur privé et deux autres consacrées à sa formation, elle n’a en effet été réintégrée qu’au premier échelon d’IPA, soit un salaire moindre que celui auquel elle pouvait prétendre auparavant. Si ce point « reste encore à travailler », Amaël Marneur et Coralie Bozec sont néanmoins « ravies de prendre part au développement » de cette nouvelle profession. « Nous sommes régulièrement sollicitées par des personnes qui souhaitent des informations sur les IPA et les formations possibles », indique Coralie Bozec, heureuse de constater que ce statut longtemps attendu rencontre aujourd’hui un franc succès.

Article publié dans l'édition de décembre 2022 d'Hospitalia à lire ici.
 






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