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Guillemette Jacob, ou l'engagement citoyen en santé


Rédigé par Aurélie Pasquelin le Jeudi 2 Février 2023 à 10:54 | Lu 927 fois


Après un cancer du sein, Guillemette Jacob a co-créé Les Seintinelles, une plateforme de recherche collaborative reliant citoyens et chercheurs académiques. Cette volonté permanente de développer des liens entre des mondes différents est au cœur de toutes les actions de cette responsable marketing, qui l’applique aussi bien dans le cadre de sa vie associative comme de sa vie professionnelle. Rencontre.



Alors âgée de 36 ans, Guillemette Jacob est confrontée à la maladie : un cancer du sein pris charge à l’Institut Curie bouleverse sa vie. Aujourd’hui, à 48 ans, elle a « laissé la maladie derrière » elle, mais continue à se souvenir de cette période durant laquelle elle a notamment rencontré le Pr Fabien Reyal. Ensemble, ils ont créé la plateforme de recherche collaborative Les Seintinelles.

Depuis bientôt neuf ans, celle-ci met en relation chercheurs académiques et citoyens pour créer plus rapidement des groupes d’études. « Lors de ma prise en charge, le Pr Fabien Reyal m’avait notamment détaillé une difficulté fréquemment rencontrée par les chercheurs : trouver des volontaires pour leurs études », se souvient Guillemette Jacob. Professionnelle du marketing et de la communication, elle décide alors d’utiliser ses compétences pour trouver une solution, même partielle, au problème.

Les Seintinelles, « trait d’union » entre chercheurs et citoyens

« Nous avons principalement pris exemple sur l’association américaine Army of Women et développé Les Seintinelles, une plateforme qui favorise l’engagement proactif : elle permet aux citoyens de se porter volontaires pour participer à des études académiques dans le domaine de la santé », poursuit celle qui préside aujourd’hui l’association du même nom. Le principe des Seintinelles est on ne peut plus simple. Inspirée des modalités d’inscription à une newsletter, la plateforme invite les volontaires à renseigner leur adresse mail ainsi que quelques informations personnelles pertinentes, telles que le sexe, l’année de naissance, le département de résidence ou encore le rapport direct ou indirect à la maladie. Autant d’éléments ensuite enregistrés dans la base de données de l’association, qui peut alors envoyer aux volontaires des mails présentant les travaux sélectionnés.

Un bouton spécifique permet à chaque « Seintinelle » de se positionner sur une étude en particulier. « Nous ne demandons pas le nom ni l’adresse exacte, car notre objectif est réellement d’impliquer le citoyen. Nous l’informons seulement sur les besoins en matière de recherche. Libre à lui de décider ensuite, et en toute connaissance de cause, s’il souhaite s’impliquer dans une étude », ajoute Guillemette Jacob. Et la démarche fonctionne : en neuf années d’existence, Les Seintinelles ont mené le recrutement intégral ou partiel de 48 études, générant ainsi plus de 45 000 participations uniques. Parmi eux, des hommes, des femmes, des personnes de tout âge, malades ou non… « Malgré notre nom, Les Seintinelles ne se concentrent pas uniquement sur le cancer du sein : nous adressons tous les types de cancer et avons, pour cela, besoin de tous les profils », insiste la présidente.

Faire le lien entre des mondes différents

Toutes issues de la recherche académique, les études mises en avant par Les Seintinelles ne sont pas sélectionnées au hasard : elles suivent un processus formalisé, incluant un certain nombre de démarches classiques ainsi qu’un passage devant le comité scientifique de l’association. « Les discussions sont nombreuses avec les chercheurs qui font appel aux Seintinelles, pour que tous aient conscience du fonctionnement et des limites de notre démarche. Après tout, celle-ci est basée sur le principe du volontariat, notre vivier n’est donc pas représentatif de la population dans son ensemble », poursuit celle qui attache une grande importance au dialogue et à la médiation.

Travaillant toujours dans le domaine du marketing, en tant que prestataire indépendant pour des marques comme L’Oréal, Moët Hennessy ou Ipsos, intervenant également en tant qu’enseignante au sein de la School of Life, Guillemette Jacob multiplie les expériences et touche à plusieurs secteurs d’activité, trouvant là de nombreuses sources « de valeur ajoutée ». « Les Seintinelles se positionnent comme un trait d’union, un médiateur, entre les citoyens et les chercheurs. Cette recherche de liens entre des mondes différents préside aussi à ma vie de tous les jours et se retrouve dans ma double implication dans le monde associatif et le monde économique », poursuit l’intéressée, persuadée que tous deux « ne s’opposent pas » mais « tendent à converger ». Et elle cherche justement à apporter ici sa pierre à l’édifice.

La santé, « un bien commun »

Résolument inscrite dans tous les aspects de sa vie, cette volonté de construire des ponts s’illustre donc dans les différents projets portés par Guillemette Jacob. Le plus éloquent est naturellement la création de l’association Les Seintinelles, basée sur « la croyance que la santé est un bien commun, que nous devons tous contribuer à défendre » et où la collaboration est « une valeur » cardinale. Ses fondateurs et membres mettent ainsi un point d’honneur à expliquer les différentes démarches, et n’oublient pas de tenir les volontaires au courant des avancées des études sélectionnées. L’implication des chercheurs est ici nécessaire, car ils sont amenés à expliquer leurs travaux, leur méthodologie et leurs finalités avant, pendant et après l’étude. « Cette transparence est nécessaire pour pouvoir impliquer les citoyens. Tous doivent bien comprendre les attendus des chercheurs afin de s’engager en toute confiance au service du système de soin », poursuit la présidente de l’association.
 
Et l’engagement de Guillemette Jacob ne semble pas faiblir puisque la présidente et ses équipes réfléchissent à de nouvelles opportunités pour étendre leur champ d’action. L’association Les Seintinelles s’est ainsi rapprochée du consortium WeShare pour développer des outils de recherche utiles aux chercheurs. Dans ce cadre, des questionnaires normés seront, par exemple, encodés dans l’outil numérique de l’association. « Ce projet s’inscrit dans la continuité de notre démarche et fait écho à notre volonté de mutualiser les outils au service des chercheurs et pour le recrutement de volontaires », ajoute Guillemette Jacob qui espère la formation de communautés de ce genre pour d’autres familles de pathologies, car « la problématique du recrutement de volontaires ne se limite pas aux cancers mais concerne la majorité des maladies ».

> Plus d’informations sur le site https://www.seintinelles.com/ ou par mail à contact@seintinelles.com

Article publié dans l'édition de décembre 2022 d'Hospitalia à lire ici.
 

 






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