Connectez-vous S'inscrire

Le magazine de l'innovation hospitalière
Actu

Ces réformes qui ont affaibli l’hôpital


Rédigé par Rédaction le Lundi 13 Juillet 2020 à 14:30 | Lu 2742 fois


Véritable électrochoc pour certains, la crise sanitaire a mis en lumière les dysfonctionnements de notre système de santé. Depuis une vingtaine d’années, pourtant, les réformes se succèdent. Laissant peu de temps aux équipes pour s’adapter, elles ont peu à peu affaibli l’hôpital et plus particulièrement l’hôpital public.



©DR
©DR
Bénéficiant d’investissements massifs au cours des « trente glorieuses », les hôpitaux français ont pourtant failli s’effondrer ces dernières semaines. Afflux important de patients, manque de personnel, de médicaments et de fournitures… Comment en est-on arrivé là ? Création des Agences Régionales d’Hospitalisation (ARH), réforme du droit des malades, Plan Hôpital 2007, loi Hôpital Patients Santé et Territoires (HPST), loi de modernisation du système de santé, #MaSanté2022… Depuis le milieu des années 90, les réformes se sont enchaînées, déstabilisant par là même un modèle bien ancré.

La tarification à l’activité (T2A)

Mise en place par une ordonnance du 2 mai 2005 dans la continuité du plan Hôpital 2007, la tarification à l’activité (T2A) est certainement l’une des réformes ayant eu le plus d’impact sur le monde hospitalier. Qualifiée de « véritable révolution culturelle »dans un rapport du Sénat daté de 2006, elle impose aux hôpitaux un renouveau de leur modèle économique. Privilégiant les recettes sur les dépenses, elle engendre également une convergence tarifaire entre public et privé. Source de débats aujourd’hui comme en 2005, ce point est longuement discuté dans un document de la Fédération Hospitalière Française, daté d’octobre 2005 et intitulé Hôpitaux publics et cliniques privées, une convergence tarifaire faussée. La FHF y rappelle notamment la lourde charge d’activités non programmées et de pathologies lourdes qui pèsent sur l’hôpital public. Malgré ces réclamations, la T2A se met progressivement en place au sein des établissements français qui souffrent déjà, pour beaucoup, d’un déficit financier.

La loi Hôpital, Patients, Santé, Territoires

Trois années plus tard, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot annonce « une réforme majeure, une réforme historique »qui dessine les traits de la loi HPST. Publiée au Journal Officiel le 22 juillet 2009, la réforme est massive : 4 titres, 133 articles et 310 textes d’application dont 8 ordonnances. Particulièrement décriée par le monde de la santé, elle s’attaque à de nombreux sujets comme la modification des statuts, l’instauration des Agences Régionales de Santé (ARS), la définition des 14 missions du service public, l’organisation en pôles d’activités…
Créées en remplacement des ARH, les ARS voient leurs compétences s’élargir. Alliée au changement des statuts des établissements de santé, cette évolution implique une prise de contrôle de l’État sur les hôpitaux, dont les ARS deviennent le bras armé. La loi HPST leur permet ainsi d’intervenir dans la nomination des chefs d’établissements, qui récupèrent nombre de décisions autrefois prises par le conseil d’administration devenu conseil de surveillance. L’organisation interne des établissements évolue, elle aussi, pour se concentrer sur les pôles d’activités dorénavant dirigés par des chefs de pôles. Véritable « révolution managériale »pour le rapport parlementaire présidé par Jean-Pierre Fourcade, cette réorganisation implique un changement majeur du mode de fonctionnement des établissements. 
Perçue alors comme « la réforme de trop »qui impose « une logique de rationnement », la loi HPST « achève de verticaliser le système de santé en instaurant des lignes hiérarchiques claires », résumait le chercheur Frédéric Pierru, dans les colonnes du journal Le Mondele 29 avril 2009. 

Le ministère de Marisol Touraine

Face à ce ras-le-bol, beaucoup se réjouissent lorsque Marisol Touraine lance en 2012 son « Pacte de confiance pour l’hôpital ». Fin de la convergence tarifaire, modification de la T2A, pouvoir accru pour les Commissions Médicales d’Établissements (CME)… Les attentes du monde de la santé sont grandes. 
Il faudra pourtant attendre juin 2014 pour qu’un projet de loi soit présenté. Très discutée au parlement, la loi de modernisation du système de santé est finalement adoptée le 21 janvier 2016. Ambitieuse, elle intègre plusieurs champs allant de la définition d’un service public hospitalier à la généralisation du tiers-payant, en passant par la création des Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT). « Projet un brin fourre-tout, mal préparé, […] il a au final cristallisé une kyrielle de mécontentements et de malentendus, soulignant la rupture entre les professionnels de santé et le gouvernement », résume Éric Favereau, journaliste spécialisé en santé dans son article "La laborieuse gestation d’une loi paradoxale", paru dans Les Tribunes de la santé 53. 

#MaSanté2022

Comme leurs prédécesseurs, les membres de La République en Marche ont eux aussi voulu apporter leur pierre à l’édifice des réformes de la santé. Parue au Journal Officiel le 24 juillet 2019, la loi relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, issue de #MaSanté2022, instaure une profonde réforme de la carte hospitalière en modifiant les statuts des hôpitaux de proximité et en créant le Projet Territorial de Santé (PTS). Dans les établissements français, cette nouvelle réforme passe mal, engendrant une série de manifestations et de grèves. On notera, par exemple, la grande manifestation du 14 novembre 2019 ou encore la création, en septembre 2019, du Collectif Inter-Hôpitaux qui affiche pour but « la défense de l’hôpital public ».
 

Et après ?

Au moment de la crise sanitaire, ces mouvements résonnent de manière particulière. En mai 2020, le Président de la République reconnaît ainsi des « erreurs » lors de sa visite à l’Hôpital de La Pitié-Salpêtrière au cours de laquelle il promet de nouveaux investissements. Affichant un déficit de 650 millions d’euros en 2018 contre 470 millions en 2016, les hôpitaux français ont en effet besoin d’argent. 


Article publié sur le numéro de juin d'Hospitalia à consulter ici : https://www.hospitalia.fr/Hospitalia-49-Special-Covid-19-MERCI-_a2230.html  
 






Nouveau commentaire :
Facebook Twitter