L’appui à la mise en œuvre des coopérations inter-hospitalières est un axe stratégique majeur pour l’ANAP, qui y a consacré de nombreuses publications. Pouvez-vous nous en parler ?
Pierre Péron : Ces coopérations représentent en effet un véritable levier de performance qui fait écho au cœur de métier de l’ANAP. L’Agence a donc mis au point différents outils pour accompagner leur mise en œuvre, soit de façon transversale, soit par métier. Les outils MELOG s’inscrivent dans la continuité de cette démarche, en se penchant plus particulièrement sur trois fonctions logistiques fondamentales pour assurer la continuité de l’activité hospitalière et médico-sociale : la stérilisation, la restauration et la blanchisserie. Leur objectif ? Permettre aux établissements de choisir les organisations les plus performantes, à la fois en termes de service rendu aux patients (qualité et sécurité de la prise en charge), de performance sociale (amélioration des conditions de travail du personnel) et de performance médico-économique (efficience des actions permettant une juste allocation des ressources hospitalières).
Les fonctions logistiques retenues pour MELOG se prêtent bien à la mutualisation. Quelle est aujourd’hui la situation sur le terrain ?
Poids lourds des fonctions supports, la blanchisserie et la restauration n’abordent pas le concept de mutualisation de la même manière. Si, en blanchisserie, les coopérations sont anciennes, elles sont plus récentes en restauration, puisque le repas est considéré comme un soin à part entière. Et elles sont très rares en stérilisation, du moins en France : cette activité, qui intervient à la périphérie des soins, engage la responsabilité individuelle du pharmacien. Ce sont donc trois métiers où les pratiques, les cultures, et l’offre disponible sur le marché divergent. Mais ce sont aussi autant de contextes qui peuvent contribuer à améliorer la performance des établissements de santé. C’est pourquoi MELOG se décline en trois formats, MELOG-Stérilisation, MELOG-Repas et MELOG-Linge.
Penchons-nous plus particulièrement sur MELOG-Repas. Comment cet outil a-t-il été développé ?
Nous nous sommes dès le départ appuyés sur l’Union Des Ingénieurs Hospitaliers en Restauration (UDIHR). Il s’agit là d’une méthodologie classique pour l’ANAP, qui fait systématiquement appel aux acteurs de terrain pour élaborer ses productions. Le groupe de travail a également associé des représentants d’établissements publics, privés et ESPIC, à la fois sur le champ sanitaire et médico-social, mais aussi des représentants des opérateurs économiques (sociétés de restauration, équipementiers, …) et des métiers concernés : responsables d’unités de production, ingénieurs en restauration, ainsi que des bénéficiaires du service tels que les cadres de santé, les directeurs d’établissements et les représentants des usagers. Ces travaux, animés avec l’aide d’une société de conseil, ont servi de base à nos équipes informatiques pour les développements techniques. Les trois volets de MELOG ont d’ailleurs la même architecture d’ensemble, offrent les mêmes fonctionnalités, et sont adaptés à chaque métier.
Pierre Péron : Ces coopérations représentent en effet un véritable levier de performance qui fait écho au cœur de métier de l’ANAP. L’Agence a donc mis au point différents outils pour accompagner leur mise en œuvre, soit de façon transversale, soit par métier. Les outils MELOG s’inscrivent dans la continuité de cette démarche, en se penchant plus particulièrement sur trois fonctions logistiques fondamentales pour assurer la continuité de l’activité hospitalière et médico-sociale : la stérilisation, la restauration et la blanchisserie. Leur objectif ? Permettre aux établissements de choisir les organisations les plus performantes, à la fois en termes de service rendu aux patients (qualité et sécurité de la prise en charge), de performance sociale (amélioration des conditions de travail du personnel) et de performance médico-économique (efficience des actions permettant une juste allocation des ressources hospitalières).
Les fonctions logistiques retenues pour MELOG se prêtent bien à la mutualisation. Quelle est aujourd’hui la situation sur le terrain ?
Poids lourds des fonctions supports, la blanchisserie et la restauration n’abordent pas le concept de mutualisation de la même manière. Si, en blanchisserie, les coopérations sont anciennes, elles sont plus récentes en restauration, puisque le repas est considéré comme un soin à part entière. Et elles sont très rares en stérilisation, du moins en France : cette activité, qui intervient à la périphérie des soins, engage la responsabilité individuelle du pharmacien. Ce sont donc trois métiers où les pratiques, les cultures, et l’offre disponible sur le marché divergent. Mais ce sont aussi autant de contextes qui peuvent contribuer à améliorer la performance des établissements de santé. C’est pourquoi MELOG se décline en trois formats, MELOG-Stérilisation, MELOG-Repas et MELOG-Linge.
Penchons-nous plus particulièrement sur MELOG-Repas. Comment cet outil a-t-il été développé ?
Nous nous sommes dès le départ appuyés sur l’Union Des Ingénieurs Hospitaliers en Restauration (UDIHR). Il s’agit là d’une méthodologie classique pour l’ANAP, qui fait systématiquement appel aux acteurs de terrain pour élaborer ses productions. Le groupe de travail a également associé des représentants d’établissements publics, privés et ESPIC, à la fois sur le champ sanitaire et médico-social, mais aussi des représentants des opérateurs économiques (sociétés de restauration, équipementiers, …) et des métiers concernés : responsables d’unités de production, ingénieurs en restauration, ainsi que des bénéficiaires du service tels que les cadres de santé, les directeurs d’établissements et les représentants des usagers. Ces travaux, animés avec l’aide d’une société de conseil, ont servi de base à nos équipes informatiques pour les développements techniques. Les trois volets de MELOG ont d’ailleurs la même architecture d’ensemble, offrent les mêmes fonctionnalités, et sont adaptés à chaque métier.
Pierre Péron, manager à l’ANAP
Justement, quelles sont ces fonctionnalités ?
Les outils MELOG ne sont pas des outils « expert », au sens où ils ne proposent aucune solution d’organisation territoriale ni n’effectuent de calculs tendanciels ou prédictifs. Parfaitement neutres, ils constituent un moyen au service d’un projet de transformation des organisations s’inscrivant dans une dynamique territoriale. Les hypothèses d’organisation et le choix des performances à atteindre sont à l’initiative des utilisateurs, qui ont la main sur les données d’entrée et de sortie. Ils doivent décrire la situation initiale, puis réfléchir aux organisations futures et identifier leurs effets sur les ressources et les structures. Ils peuvent ensuite s’appuyer sur MELOG pour établir et consolider le bilan de l’existant, puis simuler les impacts des nouveaux objectifs de performance.
Les outils MELOG s’articulent autour de trois séquences. Pouvez-vous nous les décrire ?
Nous proposons en effet une exploration en trois étapes : le Diagnostic Initial (DI), le Scénario Zéro (SZ), et les Scénarios Alternatifs (SA). Les utilisateurs sont invités, dans un premier temps, à dresser le bilan des situations existantes dans chaque établissement ou sur chaque site : qualité du service rendu, conditions de travail, performance médico-économique, adéquation avec les exigences règlementaires, performance des équipements, maturité organisationnelle, volume et typologie des activités, etc. Mais ce diagnostic initial ne permet pas toujours d’effectuer des comparaisons pertinentes entre les différents partenaires d’un projet : de grandes disparités peuvent exister, notamment en matière de niveau de service. D’où justement la deuxième étape, celle du scénario zéro. Objet d’un travail collectif, il est centré sur les objectifs que les partenaires veulent atteindre ensemble. Cette réflexion impose à chacun d’identifier les actions à mener et les moyens à mettre en œuvre pour combler l’écart entre sa situation initiale et les objectifs poursuivis – ce qui facilite la comparaison entre établissements. L’approche partagée des objectifs de performance peut alors être menée avec plus de pertinence.
Troisième étape, les scénarios alternatifs. Quelle est la finalité de cette séquence ?
Il s’agit de mener une réflexion plus approfondie, en étudiant d’autres possibilités organisationnelles qui permettraient d’atteindre l’objectif de performance commun. Le choix est en effet vaste, allant de la concentration des moyens de production à la spécialisation des sites sur des segments de processus, en passant par la répartition des volumes de production en fonction des capacités, l’externalisation totale ou partielle à des opérateurs économiques tiers, ou la combinaison de ces possibilités. Il faut donc explorer ces différentes hypothèses, connaître leur impact sur chaque établissement et mesurer leurs effets sur la performance collective, à partir d’indicateurs robustes, structurés et multidimensionnels. La séquence « SA » permet de mieux comprendre les conséquences des différentes possibilités organisationnelles afin de choisir celle qui sera la plus pertinente pour améliorer à la fois le service rendu, les conditions de travail et l’efficience d’ensemble. Les outils MELOG se positionnent à ce titre comme de véritables outils d’aide à la décision, qui peuvent couvrir différents cas d’usage – mutualisation, externalisation, ré-internalisation, dans le cadre d’un projet de collaboration inter-établissements ou à l’échelle locale.
Les outils MELOG ne sont pas des outils « expert », au sens où ils ne proposent aucune solution d’organisation territoriale ni n’effectuent de calculs tendanciels ou prédictifs. Parfaitement neutres, ils constituent un moyen au service d’un projet de transformation des organisations s’inscrivant dans une dynamique territoriale. Les hypothèses d’organisation et le choix des performances à atteindre sont à l’initiative des utilisateurs, qui ont la main sur les données d’entrée et de sortie. Ils doivent décrire la situation initiale, puis réfléchir aux organisations futures et identifier leurs effets sur les ressources et les structures. Ils peuvent ensuite s’appuyer sur MELOG pour établir et consolider le bilan de l’existant, puis simuler les impacts des nouveaux objectifs de performance.
Les outils MELOG s’articulent autour de trois séquences. Pouvez-vous nous les décrire ?
Nous proposons en effet une exploration en trois étapes : le Diagnostic Initial (DI), le Scénario Zéro (SZ), et les Scénarios Alternatifs (SA). Les utilisateurs sont invités, dans un premier temps, à dresser le bilan des situations existantes dans chaque établissement ou sur chaque site : qualité du service rendu, conditions de travail, performance médico-économique, adéquation avec les exigences règlementaires, performance des équipements, maturité organisationnelle, volume et typologie des activités, etc. Mais ce diagnostic initial ne permet pas toujours d’effectuer des comparaisons pertinentes entre les différents partenaires d’un projet : de grandes disparités peuvent exister, notamment en matière de niveau de service. D’où justement la deuxième étape, celle du scénario zéro. Objet d’un travail collectif, il est centré sur les objectifs que les partenaires veulent atteindre ensemble. Cette réflexion impose à chacun d’identifier les actions à mener et les moyens à mettre en œuvre pour combler l’écart entre sa situation initiale et les objectifs poursuivis – ce qui facilite la comparaison entre établissements. L’approche partagée des objectifs de performance peut alors être menée avec plus de pertinence.
Troisième étape, les scénarios alternatifs. Quelle est la finalité de cette séquence ?
Il s’agit de mener une réflexion plus approfondie, en étudiant d’autres possibilités organisationnelles qui permettraient d’atteindre l’objectif de performance commun. Le choix est en effet vaste, allant de la concentration des moyens de production à la spécialisation des sites sur des segments de processus, en passant par la répartition des volumes de production en fonction des capacités, l’externalisation totale ou partielle à des opérateurs économiques tiers, ou la combinaison de ces possibilités. Il faut donc explorer ces différentes hypothèses, connaître leur impact sur chaque établissement et mesurer leurs effets sur la performance collective, à partir d’indicateurs robustes, structurés et multidimensionnels. La séquence « SA » permet de mieux comprendre les conséquences des différentes possibilités organisationnelles afin de choisir celle qui sera la plus pertinente pour améliorer à la fois le service rendu, les conditions de travail et l’efficience d’ensemble. Les outils MELOG se positionnent à ce titre comme de véritables outils d’aide à la décision, qui peuvent couvrir différents cas d’usage – mutualisation, externalisation, ré-internalisation, dans le cadre d’un projet de collaboration inter-établissements ou à l’échelle locale.
Quelles sont aujourd'hui les problématiques soulevées par la mutualisation de la fonction repas ?
Le principal écueil, qui concerne autant la fonction repas que les autres fonctions supports, est de s’en remettre à la mutualisation pour résoudre des problèmes préexistants. Or aucune solution n’en viendra à bout si les acteurs n’ont pas communiqué en amont, pour décloisonner leurs organisations et remettre en question leurs processus. L’autre écueil classique est de considérer la mutualisation, l’externalisation ou la ré-internalisation comme une solution a priori unique, sans étudier d’autres hypothèses comme la combinaison des différentes possibilités. D’où justement l’intérêt de l’approche en trois séquences, qui permet d’acquérir une nouvelle culture projet placée sous le signe du pragmatisme. Il faut, enfin, faire attention à ce que le projet de mutualisation ne dégrade pas le niveau de service. Il peut ainsi être tentant, pour un Groupement Hospitalier de Territoire, de centraliser la production culinaire au sein de l’établissement sanitaire support afin de réduire les coûts de production à l’unité. Mais quid de l’EHPAD dont l’unité de production culinaire offre un niveau de service plus adapté aux besoins des résidents ? La centralisation de la production dans l’établissement support, dont les patients ne présentent pas le même profil, ne risquerait-elle pas d’affaiblir la qualité de service au sein de cet EHPAD, avec de possibles conséquences sur la dénutrition des résidents ? Il est ici nécessaire de s’affranchir de tout dogmatisme pour retenir l’organisation la plus pertinente. C’est pourquoi les outils MELOG sont neutres, et intègrent de nombreux indicateurs afin de simuler les impacts d’une variété de scénarios.
Quelles perspectives pour MELOG-Repas ?
L’outil est aujourd’hui testé par des établissements volontaires, ce qui nous permettra de le faire évoluer en fonction des premiers retours. Un pilote similaire a été mis en œuvre pour MELOG-Stérilisation. Des actions d’information, d’aide à la prise en main et des études de cas devraient par ailleurs être mises en place en 2018 pour accompagner le déploiement des outils MELOG, dont la vocation est avant tout pédagogique : il s’agit de favoriser l’acquisition d’une culture projet rigoureuse, portée de manière partagée et menée en lien avec des indicateurs factuels.
1 - Agence Nationale d’Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux.
2 - Mutualisation-externalisation logistique.
Par Joëlle Hayek. Interview publiée dans le numéro 39 d'Hospitalia, magazine à consulter en intégralité ici.
Le principal écueil, qui concerne autant la fonction repas que les autres fonctions supports, est de s’en remettre à la mutualisation pour résoudre des problèmes préexistants. Or aucune solution n’en viendra à bout si les acteurs n’ont pas communiqué en amont, pour décloisonner leurs organisations et remettre en question leurs processus. L’autre écueil classique est de considérer la mutualisation, l’externalisation ou la ré-internalisation comme une solution a priori unique, sans étudier d’autres hypothèses comme la combinaison des différentes possibilités. D’où justement l’intérêt de l’approche en trois séquences, qui permet d’acquérir une nouvelle culture projet placée sous le signe du pragmatisme. Il faut, enfin, faire attention à ce que le projet de mutualisation ne dégrade pas le niveau de service. Il peut ainsi être tentant, pour un Groupement Hospitalier de Territoire, de centraliser la production culinaire au sein de l’établissement sanitaire support afin de réduire les coûts de production à l’unité. Mais quid de l’EHPAD dont l’unité de production culinaire offre un niveau de service plus adapté aux besoins des résidents ? La centralisation de la production dans l’établissement support, dont les patients ne présentent pas le même profil, ne risquerait-elle pas d’affaiblir la qualité de service au sein de cet EHPAD, avec de possibles conséquences sur la dénutrition des résidents ? Il est ici nécessaire de s’affranchir de tout dogmatisme pour retenir l’organisation la plus pertinente. C’est pourquoi les outils MELOG sont neutres, et intègrent de nombreux indicateurs afin de simuler les impacts d’une variété de scénarios.
Quelles perspectives pour MELOG-Repas ?
L’outil est aujourd’hui testé par des établissements volontaires, ce qui nous permettra de le faire évoluer en fonction des premiers retours. Un pilote similaire a été mis en œuvre pour MELOG-Stérilisation. Des actions d’information, d’aide à la prise en main et des études de cas devraient par ailleurs être mises en place en 2018 pour accompagner le déploiement des outils MELOG, dont la vocation est avant tout pédagogique : il s’agit de favoriser l’acquisition d’une culture projet rigoureuse, portée de manière partagée et menée en lien avec des indicateurs factuels.
1 - Agence Nationale d’Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux.
2 - Mutualisation-externalisation logistique.
Par Joëlle Hayek. Interview publiée dans le numéro 39 d'Hospitalia, magazine à consulter en intégralité ici.