La médecine de ville a été très sollicitée sur le front du Covid-19. Comment s’est-elle positionnée au sein des organisations sanitaires ?
Dr Jacques Battistoni : La place réservée à la médecine de ville a varié tout au long de l’épidémie. Proche de zéro lors des deux premiers stades, elle a peu à peu grandi jusqu’à être reconnue comme le premier recours pour le déconfinement. Nous sommes désormais mobilisés pour la prescription des tests virologiques, la mise en quarantaine des patients dépistés positifs et la déclaration des cas à l’Assurance Maladie. Nous retrouvons donc notre place : les soins de premier recours et l’accompagnement des malades.
Au plus fort de la crise, dans quelle mesure avez-vous pu coopérer avec les établissements de santé ?
Le clivage traditionnel ville-hôpital n’a pas permis de mettre en place de réelles coopérations à l’échelle nationale, ce qui est regrettable. Une réflexion devra d’ailleurs être initiée en ce sens pour rééquilibrer les liens entre la ville et l’hôpital et permettre à chacun de jouer pleinement son rôle. Centrées sur le « tout hospitalier », les premières phases de la crise n’ont pas eu le résultat escompté : les contaminations se sont multipliées. Plus tard, alors que les hôpitaux étaient saturés ou presque, les médecins généralistes enregistraient une baisse des consultations pouvant atteindre 50%. Mais il n’a pas été fait appel à nous : les établissements hospitaliers ont développé des outils de suivi des malades, comme « Covidom », sans nous consulter ; l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) a organisé le dépistage et le suivi des cas. Pourtant ce n’est pas là le rôle de l’hôpital ! Même si les tensions entre la ville et l’hôpital étaient particulièrement sensibles en Île-de-France, les exemples sont légion partout en France. Nous avons besoin de renouer le dialogue et que chacun respecte la place de l’autre.Seules des coopérations réelles nous permettront de générer, ensemble, une réponse globale à un évènement sanitaire d’envergure.
Justement, comment favoriser ces coopérations à l’avenir ?
Certains outils spécifiques devraient être mis en place. La médecine générale y travaillait, mais l’épidémie est arrivée trop vite : ils n’étaient pas encore pleinement opérationnels. Les Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) auraient par exemple pu jouer un rôle majeur dans la réponse à cette crise sanitaire. Regroupant les professionnels de santé d’un même territoire – pour un bassin compris entre 30 000 et 200 000 habitants –, elles facilitent en effet les échanges entre les hospitaliers et les libéraux et contribuent dès lors à la continuité, et donc à la qualité, des soins. Et c’est loin d’être un vœu pieux ! Là où elles existent, elles ont largement contribué à une bonne organisation des soins de proximité. En effet, j’évoquais précédemment les liens difficiles entre médecine de ville et médecine hospitalière. Mais force est de constater que dans les territoires où les CPTS avaient déjà été instaurées, le dialogue avec l’hôpital semble avoir été, dans la majorité des cas, plus aisé.
Sur un autre registre, cette crise s’est traduite par un développement exponentiel des téléconsultations. Comment les médecins généralistes se sont-ils adaptés à cette nouvelle modalité ?
Le recours massif aux téléconsultations a effectivement été nécessaire pour, notamment, éviter la contamination des soignants. Il a également été utile pour détecter les cas de Covid-19, mais aussi pour suivre les patients atteints de maladies chroniques. C’était enfin une opportunité, pour les médecins généralistes, de faire face à la baisse des consultations en présentiel lors du confinement. Mais peu maîtrisaient véritablement ces nouveaux outils. Beaucoup de médecins ont dû apprendre le fonctionnement des logiciels de façon accélérée, et quelques semaines ont été nécessaires pour une prise en main sereine. Aujourd’hui, à l’heure du déconfinement s’ajoute celle du bilan : nous pouvons nous rendre compte des avantages et des limites de la téléconsultation.Dans le cas du Covid-19, par exemple, la téléconsultation ne nous permettait pas d’effectuer une auscultation pulmonaire ou de mesurer la saturation d’oxygène dans le sang. Dans la majorité des cas, nous l’utilisions donc en première intention et si un doute persistait, nous orientions les patients vers le centre Covid le plus proche. En tout état de cause, cette modalité nous a permis de maintenir le contact avec nos patients mais aussi d’effectuer un premier tri dans le cadre du Covid-19. Les pratiques seront-elles durablement transformées ? Nous en saurons plus dans quelques mois.
Dr Jacques Battistoni : La place réservée à la médecine de ville a varié tout au long de l’épidémie. Proche de zéro lors des deux premiers stades, elle a peu à peu grandi jusqu’à être reconnue comme le premier recours pour le déconfinement. Nous sommes désormais mobilisés pour la prescription des tests virologiques, la mise en quarantaine des patients dépistés positifs et la déclaration des cas à l’Assurance Maladie. Nous retrouvons donc notre place : les soins de premier recours et l’accompagnement des malades.
Au plus fort de la crise, dans quelle mesure avez-vous pu coopérer avec les établissements de santé ?
Le clivage traditionnel ville-hôpital n’a pas permis de mettre en place de réelles coopérations à l’échelle nationale, ce qui est regrettable. Une réflexion devra d’ailleurs être initiée en ce sens pour rééquilibrer les liens entre la ville et l’hôpital et permettre à chacun de jouer pleinement son rôle. Centrées sur le « tout hospitalier », les premières phases de la crise n’ont pas eu le résultat escompté : les contaminations se sont multipliées. Plus tard, alors que les hôpitaux étaient saturés ou presque, les médecins généralistes enregistraient une baisse des consultations pouvant atteindre 50%. Mais il n’a pas été fait appel à nous : les établissements hospitaliers ont développé des outils de suivi des malades, comme « Covidom », sans nous consulter ; l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) a organisé le dépistage et le suivi des cas. Pourtant ce n’est pas là le rôle de l’hôpital ! Même si les tensions entre la ville et l’hôpital étaient particulièrement sensibles en Île-de-France, les exemples sont légion partout en France. Nous avons besoin de renouer le dialogue et que chacun respecte la place de l’autre.Seules des coopérations réelles nous permettront de générer, ensemble, une réponse globale à un évènement sanitaire d’envergure.
Justement, comment favoriser ces coopérations à l’avenir ?
Certains outils spécifiques devraient être mis en place. La médecine générale y travaillait, mais l’épidémie est arrivée trop vite : ils n’étaient pas encore pleinement opérationnels. Les Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) auraient par exemple pu jouer un rôle majeur dans la réponse à cette crise sanitaire. Regroupant les professionnels de santé d’un même territoire – pour un bassin compris entre 30 000 et 200 000 habitants –, elles facilitent en effet les échanges entre les hospitaliers et les libéraux et contribuent dès lors à la continuité, et donc à la qualité, des soins. Et c’est loin d’être un vœu pieux ! Là où elles existent, elles ont largement contribué à une bonne organisation des soins de proximité. En effet, j’évoquais précédemment les liens difficiles entre médecine de ville et médecine hospitalière. Mais force est de constater que dans les territoires où les CPTS avaient déjà été instaurées, le dialogue avec l’hôpital semble avoir été, dans la majorité des cas, plus aisé.
Sur un autre registre, cette crise s’est traduite par un développement exponentiel des téléconsultations. Comment les médecins généralistes se sont-ils adaptés à cette nouvelle modalité ?
Le recours massif aux téléconsultations a effectivement été nécessaire pour, notamment, éviter la contamination des soignants. Il a également été utile pour détecter les cas de Covid-19, mais aussi pour suivre les patients atteints de maladies chroniques. C’était enfin une opportunité, pour les médecins généralistes, de faire face à la baisse des consultations en présentiel lors du confinement. Mais peu maîtrisaient véritablement ces nouveaux outils. Beaucoup de médecins ont dû apprendre le fonctionnement des logiciels de façon accélérée, et quelques semaines ont été nécessaires pour une prise en main sereine. Aujourd’hui, à l’heure du déconfinement s’ajoute celle du bilan : nous pouvons nous rendre compte des avantages et des limites de la téléconsultation.Dans le cas du Covid-19, par exemple, la téléconsultation ne nous permettait pas d’effectuer une auscultation pulmonaire ou de mesurer la saturation d’oxygène dans le sang. Dans la majorité des cas, nous l’utilisions donc en première intention et si un doute persistait, nous orientions les patients vers le centre Covid le plus proche. En tout état de cause, cette modalité nous a permis de maintenir le contact avec nos patients mais aussi d’effectuer un premier tri dans le cadre du Covid-19. Les pratiques seront-elles durablement transformées ? Nous en saurons plus dans quelques mois.
Article publié sur le numéro de juin d'Hospitalia à consulter ici : https://www.hospitalia.fr/Hospitalia-49-Special-Covid-19-MERCI-_a2230.html