L’Agence de l’Innovation en Santé (AIS) a été lancée le 31 octobre 2022 à l'occasion du comité de pilotage ministériel France 2030 Santé. À quels besoins répond-elle ?
Dr Lise Alter : Inscrite dans le cadre du « Plan Innovation Santé France 2030 », l’AIS porte plusieurs missions, dont les principales visent à accélérer l'accès des patients à l'innovation et à favoriser l'émergence de ces innovations. Elle se positionne à cet égard comme une structure de pilotage et de coordination des travaux interministériels en matière d'innovation en santé. Notre objectif est de couvrir l’ensemble de la chaîne, en assurant un réel continuum entre la recherche et le développement, l’accès au marché et l’industrialisation, pour une meilleure mise en cohérence des enjeux spécifiques à chaque étape – ce qui permettrait de répondre, en partie, à certaines vulnérabilités mises en évidence durant la crise sanitaire.
Une autre mission a trait au suivi du « Plan Innovation Santé France 2030 » …
Rattachée au secrétariat général pour l'investissement, l’AIS assure en effet le suivi de ce programme national orienté vers l'accélération des innovations relatives à la gestion des maladies infectieuses émergentes et des menaces NRBC [nucléaire, radiologique, biologique et chimique, NDLR], au numérique en santé et aux dispositifs médicaux. Trois volets stratégiques qui témoignent d’une réelle volonté de faire de la France la nation la plus souveraine et la plus innovante en Europe. Mais au-delà de ces orientations clés, le « Plan Innovation Santé France 2030 » intègre également un volet Investissements majeur. Il mobilise ainsi, au total, plus d'un milliard d'euros pour la recherche biomédicale, portant notamment une politique ambitieuse pour la création de bioclusters de dimension mondiale, la constitution d’instituts hospitalo-universitaires de pointe ou encore l’appui à des programmes de recherche hospitalo-universitaires. Pour résumer, il s’agit d’un plan massif, qui a et aura des impacts forts sur le secteur de la santé dans son ensemble.
Quid de vos autres missions ?
L'agence est organisée autour de trois grands pôles, qui constituent autant de grandes missions : la Prospective en santé, l’Accompagnement, l’Accélération et la transformation. Le premier, en particulier, cherche à anticiper à la fois l'arrivée des innovations et leurs impacts organisationnels et financiers, afin de faciliter leur intégration au sein du système de santé. Grâce à ses travaux, nous comptons également mieux identifier les besoins médicaux non couverts ou traités de manière insuffisante, afin que les pouvoirs publics puissent par la suite les décliner à travers des programmes de recherche prioritaires.
Qu’en est-il du pôle Accompagnement ?
Il est, vous l’aurez compris, amené à accompagner des projets innovants partout en France. Cet appui bénéficie d’ailleurs déjà à un premier groupe de 20 lauréats, identifiés à travers le programme French Tech Health20. Plus concrètement, les prestations du pôle Accompagnement se divisent en trois volets. D’abord, un accès prioritaire offert aux projets nécessitant des autorisations pour la mise en place d’essais cliniques, soumis à des contraintes règlementaires spécifiques ou devant faire l’objet d’une évaluation en vue de leur remboursement. Nous sommes donc ici en lien avec la Haute Autorité de Santé et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) pour mettre en place des « fast track », ou circuits rapides, afin d’accélérer ces processus. Ensuite, un accompagnement adapté aux solutions innovantes ne relevant pas, aujourd’hui, d’un cadre règlementaire, juridique ou financier qui permettrait leur déploiement. Nous travaillons ici au cas par cas, pour justement faire évoluer ce cadre et permettre leur développement.
Quel est le troisième et dernier volet ?
Le « passage à l’échelle », troisième dimension de cet accompagnement, s’adresse aux innovations déjà accessibles ou qui ont fait la preuve de leurs bénéfices. Nous cherchons alors à créer les conditions les plus favorables pour élargir leur déploiement auprès des professionnels et des établissements de santé. Sur ce point, nous pouvons être amenés à mobiliser plusieurs leviers, y compris à l’échelle internationale grâce à nos partenariats avec l’agence Business France et les réseaux de la French Tech. Cela dit, sur le sol français, nous utiliserons surtout le levier des achats hospitaliers. L'idée, bien sûr, n'est pas d'inciter les établissements à acheter tout et n'importe quoi, mais bien d’aider aux premiers pas, afin que les entreprises innovantes éprouvant quelques difficultés à s’ancrer dans le système de soins puissent atteindre un volume de clients suffisant et s’inscrire ainsi dans un cercle vertueux.
Vous avez engagé, il y a peu, un Tour de France de l’innovation en santé. Pourriez-vous nous en parler ?
L’ancrage local et territorial représentant une dimension importante de notre démarche, nous développons actuellement une communauté de partenaires, pour amplifier nos dispositifs d'accompagnement, identifier des projets prioritaires qui pourraient bénéficier de notre appui, mais aussi repérer les nouveaux besoins et freins potentiels. Pôles de compétitivités, Délégations régionales académiques à la recherche et à l'innovation (DRARI), Directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS), Secrétaires généraux pour les affaires régionales (SGAR), Agences régionales de santé (ARS), établissements de santé, universités, incubateurs, accélérateurs, organismes de transferts technologiques en santé… Le panel d’acteurs régionaux pouvant être mobilisés est large. Cet objectif rejoint d’ailleurs aussi les missions de notre pôle Accélération et transformation. Travaillant en lien étroit avec le pôle Accompagnement, il cherche à faire remonter les difficultés systémiques rencontrées sur le terrain, pour ensuite faire évoluer et simplifier les processus règlementaires et administratifs, en collaboration avec les institutions et les agences sanitaires.
L’AIS est encore une « jeune » structure. Où en êtes-vous actuellement dans la mise en place de ces différents services ?
Nous constituons aujourd’hui nos équipes, avec une dizaine de collaborateurs recrutés à ce jour et une quinzaine au total d’ici l’été 2023. Deux personnes sont actuellement positionnées au pôle Accompagnement, trois au pôle Accélération et transformation, une au pôle Prospectif et deux au pôle Financement, soit celui chargé du suivi du Plan Innovation France 2030. Les profils sélectionnés viennent de tous horizons, le secteur public, le secteur privé, des Medtech, des CHU, des agences publiques… Cette diversité représente indéniablement un atout pour notre structure, qui bénéficie ainsi de compétences variées.
Comment les travaux de l’AIS s’articulent-ils avec ceux des autres organismes intervenant déjà sur le champ de l’innovation en santé ?
Nous collaborons, bien évidemment, avec toutes les structures actives dans le monde de la santé et de l'innovation, qu’il s’agisse du médicament, des dispositifs médicaux, de l’imagerie, du numérique en santé ou des processus organisationnels. Par exemple, et puisque l’un de nos principaux objectifs est de fluidifier le parcours règlementaire, nous entretenons des liens étroits avec les agences sanitaires. Sur le volet numérique, nous sommes notamment en relation avec la Direction du numérique en santé (DNS) et l’Agence du numérique en santé (ANS). Bien qu’elles se recoupent par moment, nos actions ne sont pas ici les mêmes : la DNS et l’ANS couvrent un éventail plus large en matière de stratégie numérique, tandis que le champ de notre agence est plus large en matière d’innovation. Nous avons donc des points de convergence, mais aussi des spécificités très différenciantes. C’est là tout l’intérêt de développer une structure dédiée, uniquement et largement, à l’innovation en santé.
Un dernier mot sur vos travaux au quotidien ?
Le suivi du Plan Innovation France Santé 2030 nous occupe beaucoup, car nous animons toute la communauté interministérielle liée à son déploiement. En parallèle, chaque pôle met en place les missions qui sont les siennes avec, en premier lieu, des définitions méthodologiques et le cadrage de ses travaux. Par exemple, face aux très nombreuses sollicitations des porteurs de projets innovants, le pôle Accompagnement a créé une démarche simplifiée, disponible en ligne sur innovation-sante.fr. En quelques clics, les porteurs peuvent s’identifier et enregistrer leur demande. Le volume des requêtes étant déjà conséquent, nous ne serons probablement pas en capacité d’accompagner tous les projets. Mais ce référencement est crucial pour acquérir une bonne connaissance de l'écosystème français de l'innovation en santé et pouvoir ainsi l’aider au mieux dans son développement.
Article publié dans l'édition de mai 2023 d'Hospitalia à lire ici.
Dr Lise Alter : Inscrite dans le cadre du « Plan Innovation Santé France 2030 », l’AIS porte plusieurs missions, dont les principales visent à accélérer l'accès des patients à l'innovation et à favoriser l'émergence de ces innovations. Elle se positionne à cet égard comme une structure de pilotage et de coordination des travaux interministériels en matière d'innovation en santé. Notre objectif est de couvrir l’ensemble de la chaîne, en assurant un réel continuum entre la recherche et le développement, l’accès au marché et l’industrialisation, pour une meilleure mise en cohérence des enjeux spécifiques à chaque étape – ce qui permettrait de répondre, en partie, à certaines vulnérabilités mises en évidence durant la crise sanitaire.
Une autre mission a trait au suivi du « Plan Innovation Santé France 2030 » …
Rattachée au secrétariat général pour l'investissement, l’AIS assure en effet le suivi de ce programme national orienté vers l'accélération des innovations relatives à la gestion des maladies infectieuses émergentes et des menaces NRBC [nucléaire, radiologique, biologique et chimique, NDLR], au numérique en santé et aux dispositifs médicaux. Trois volets stratégiques qui témoignent d’une réelle volonté de faire de la France la nation la plus souveraine et la plus innovante en Europe. Mais au-delà de ces orientations clés, le « Plan Innovation Santé France 2030 » intègre également un volet Investissements majeur. Il mobilise ainsi, au total, plus d'un milliard d'euros pour la recherche biomédicale, portant notamment une politique ambitieuse pour la création de bioclusters de dimension mondiale, la constitution d’instituts hospitalo-universitaires de pointe ou encore l’appui à des programmes de recherche hospitalo-universitaires. Pour résumer, il s’agit d’un plan massif, qui a et aura des impacts forts sur le secteur de la santé dans son ensemble.
Quid de vos autres missions ?
L'agence est organisée autour de trois grands pôles, qui constituent autant de grandes missions : la Prospective en santé, l’Accompagnement, l’Accélération et la transformation. Le premier, en particulier, cherche à anticiper à la fois l'arrivée des innovations et leurs impacts organisationnels et financiers, afin de faciliter leur intégration au sein du système de santé. Grâce à ses travaux, nous comptons également mieux identifier les besoins médicaux non couverts ou traités de manière insuffisante, afin que les pouvoirs publics puissent par la suite les décliner à travers des programmes de recherche prioritaires.
Qu’en est-il du pôle Accompagnement ?
Il est, vous l’aurez compris, amené à accompagner des projets innovants partout en France. Cet appui bénéficie d’ailleurs déjà à un premier groupe de 20 lauréats, identifiés à travers le programme French Tech Health20. Plus concrètement, les prestations du pôle Accompagnement se divisent en trois volets. D’abord, un accès prioritaire offert aux projets nécessitant des autorisations pour la mise en place d’essais cliniques, soumis à des contraintes règlementaires spécifiques ou devant faire l’objet d’une évaluation en vue de leur remboursement. Nous sommes donc ici en lien avec la Haute Autorité de Santé et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) pour mettre en place des « fast track », ou circuits rapides, afin d’accélérer ces processus. Ensuite, un accompagnement adapté aux solutions innovantes ne relevant pas, aujourd’hui, d’un cadre règlementaire, juridique ou financier qui permettrait leur déploiement. Nous travaillons ici au cas par cas, pour justement faire évoluer ce cadre et permettre leur développement.
Quel est le troisième et dernier volet ?
Le « passage à l’échelle », troisième dimension de cet accompagnement, s’adresse aux innovations déjà accessibles ou qui ont fait la preuve de leurs bénéfices. Nous cherchons alors à créer les conditions les plus favorables pour élargir leur déploiement auprès des professionnels et des établissements de santé. Sur ce point, nous pouvons être amenés à mobiliser plusieurs leviers, y compris à l’échelle internationale grâce à nos partenariats avec l’agence Business France et les réseaux de la French Tech. Cela dit, sur le sol français, nous utiliserons surtout le levier des achats hospitaliers. L'idée, bien sûr, n'est pas d'inciter les établissements à acheter tout et n'importe quoi, mais bien d’aider aux premiers pas, afin que les entreprises innovantes éprouvant quelques difficultés à s’ancrer dans le système de soins puissent atteindre un volume de clients suffisant et s’inscrire ainsi dans un cercle vertueux.
Vous avez engagé, il y a peu, un Tour de France de l’innovation en santé. Pourriez-vous nous en parler ?
L’ancrage local et territorial représentant une dimension importante de notre démarche, nous développons actuellement une communauté de partenaires, pour amplifier nos dispositifs d'accompagnement, identifier des projets prioritaires qui pourraient bénéficier de notre appui, mais aussi repérer les nouveaux besoins et freins potentiels. Pôles de compétitivités, Délégations régionales académiques à la recherche et à l'innovation (DRARI), Directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS), Secrétaires généraux pour les affaires régionales (SGAR), Agences régionales de santé (ARS), établissements de santé, universités, incubateurs, accélérateurs, organismes de transferts technologiques en santé… Le panel d’acteurs régionaux pouvant être mobilisés est large. Cet objectif rejoint d’ailleurs aussi les missions de notre pôle Accélération et transformation. Travaillant en lien étroit avec le pôle Accompagnement, il cherche à faire remonter les difficultés systémiques rencontrées sur le terrain, pour ensuite faire évoluer et simplifier les processus règlementaires et administratifs, en collaboration avec les institutions et les agences sanitaires.
L’AIS est encore une « jeune » structure. Où en êtes-vous actuellement dans la mise en place de ces différents services ?
Nous constituons aujourd’hui nos équipes, avec une dizaine de collaborateurs recrutés à ce jour et une quinzaine au total d’ici l’été 2023. Deux personnes sont actuellement positionnées au pôle Accompagnement, trois au pôle Accélération et transformation, une au pôle Prospectif et deux au pôle Financement, soit celui chargé du suivi du Plan Innovation France 2030. Les profils sélectionnés viennent de tous horizons, le secteur public, le secteur privé, des Medtech, des CHU, des agences publiques… Cette diversité représente indéniablement un atout pour notre structure, qui bénéficie ainsi de compétences variées.
Comment les travaux de l’AIS s’articulent-ils avec ceux des autres organismes intervenant déjà sur le champ de l’innovation en santé ?
Nous collaborons, bien évidemment, avec toutes les structures actives dans le monde de la santé et de l'innovation, qu’il s’agisse du médicament, des dispositifs médicaux, de l’imagerie, du numérique en santé ou des processus organisationnels. Par exemple, et puisque l’un de nos principaux objectifs est de fluidifier le parcours règlementaire, nous entretenons des liens étroits avec les agences sanitaires. Sur le volet numérique, nous sommes notamment en relation avec la Direction du numérique en santé (DNS) et l’Agence du numérique en santé (ANS). Bien qu’elles se recoupent par moment, nos actions ne sont pas ici les mêmes : la DNS et l’ANS couvrent un éventail plus large en matière de stratégie numérique, tandis que le champ de notre agence est plus large en matière d’innovation. Nous avons donc des points de convergence, mais aussi des spécificités très différenciantes. C’est là tout l’intérêt de développer une structure dédiée, uniquement et largement, à l’innovation en santé.
Un dernier mot sur vos travaux au quotidien ?
Le suivi du Plan Innovation France Santé 2030 nous occupe beaucoup, car nous animons toute la communauté interministérielle liée à son déploiement. En parallèle, chaque pôle met en place les missions qui sont les siennes avec, en premier lieu, des définitions méthodologiques et le cadrage de ses travaux. Par exemple, face aux très nombreuses sollicitations des porteurs de projets innovants, le pôle Accompagnement a créé une démarche simplifiée, disponible en ligne sur innovation-sante.fr. En quelques clics, les porteurs peuvent s’identifier et enregistrer leur demande. Le volume des requêtes étant déjà conséquent, nous ne serons probablement pas en capacité d’accompagner tous les projets. Mais ce référencement est crucial pour acquérir une bonne connaissance de l'écosystème français de l'innovation en santé et pouvoir ainsi l’aider au mieux dans son développement.
Article publié dans l'édition de mai 2023 d'Hospitalia à lire ici.
Lise Alter
Médecin de santé publique et titulaire d’un master en économie et gestion des services de santé, Lise Alter a été conseillère médicale au sein de la Direction générale de la santé du ministère de la Santé de 2012 à 2013, puis médecin-conseil à la Caisse nationale de l’Assurance maladie (CNAM) jusqu’en 2014. Après quatre années passées au sein d’un laboratoire, elle intègre la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) en 2018 au poste d’adjointe à la sous-directrice du pilotage de la performance des acteurs de l’offre de soins. En 2020, Lise Alter est nommée directrice de l’évaluation médicale, économique et de santé publique à la Haute Autorité de Santé (HAS). Le 31 octobre 2022, elle est nommée au poste de directrice générale de l’AIS, lors du comité de pilotage ministériel « Santé » de France 2030. Le Dr Lise Alter prend la direction effective de l’Agence de l’Innovation en Santé le 21 novembre 2022.
Médecin de santé publique et titulaire d’un master en économie et gestion des services de santé, Lise Alter a été conseillère médicale au sein de la Direction générale de la santé du ministère de la Santé de 2012 à 2013, puis médecin-conseil à la Caisse nationale de l’Assurance maladie (CNAM) jusqu’en 2014. Après quatre années passées au sein d’un laboratoire, elle intègre la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) en 2018 au poste d’adjointe à la sous-directrice du pilotage de la performance des acteurs de l’offre de soins. En 2020, Lise Alter est nommée directrice de l’évaluation médicale, économique et de santé publique à la Haute Autorité de Santé (HAS). Le 31 octobre 2022, elle est nommée au poste de directrice générale de l’AIS, lors du comité de pilotage ministériel « Santé » de France 2030. Le Dr Lise Alter prend la direction effective de l’Agence de l’Innovation en Santé le 21 novembre 2022.